Intervention de Jacky Chorin

Réunion du 17 septembre 2014 à 18h00
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Jacky Chorin, secrétaire fédéral de Force ouvrière, FO :

On nous assure que ce texte n'est pas une loi anti-EDF. En tout cas, ce n'est pas une loi pro-EDF. On y vise en effet le nucléaire, l'hydraulique et, à présent, la distribution : nous assistons donc à un quasi-démantèlement de l'entreprise. Ensuite, on nous dit qu'il ne s'agit pas d'une loi électrique. Or les trois quarts des questions qui nous ont été posées portent sur l'électricité.

M. Baupin a demandé si ce texte reprenait le pouvoir sur l'énergie : pour cela, encore faudrait-il cesser de mettre en concurrence l'électricité et le gaz. En fait, le texte ne traite que du nucléaire. Mais, comme il ne fait pas confiance aux pouvoirs publics, actuels ou futurs, il tente d'installer une usine à gaz pour contraindre l'entreprise à appliquer des décisions dont il subodore qu'elles ne seront pas exécutées. C'est du jamais vu ! Ce n'est ni sur Total ni sur GDF Suez que l'on fait peser des contraintes de gouvernance, mais sur EDF, entreprise dont l'État détient 85 % du capital. Peut-être y a-t-il un problème interne au sein de l'État qui m'échappe. Mais la réponse apportée par le projet de loi est baroque. Si un problème de pouvoir se pose, il est possible le régler. Notre syndicat a des propositions à formuler en la matière : considérant la mise en concurrence de l'électricité et du gaz comme un échec, nous pouvons vous proposer des amendements afin d'en revenir à un service public national qui avait fait les preuves de son efficacité.

S'agissant du gaz de schiste, nous avons participé aux travaux réalisés par Jean-Claude Lenoir et Christian Bataille dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). Il va de soi que nous sommes, comme tout le monde ici, attachés à la protection de l'environnement. Cela ne doit cependant pas empêcher que la recherche se poursuive. Tous les opérateurs énergéticiens français – publics, parapublics et privés – sont aujourd'hui en train d'investir dans le gaz de schiste. Un tel décalage nous interroge.

Nous sommes tout à fait opposés à l'autonomisation d'ERDF, nouvelle tentative pour casser le groupe EDF. Le prétexte retenu pour prendre une telle mesure est que le niveau d'investissement de la filiale ne serait pas atteint. Or je rappelle que l'État est tout de même propriétaire d'EDF, qu'il siège donc dans les conseils de surveillance ainsi qu'au conseil d'administration de l'entreprise. C'est pourquoi il me semble que l'on veut une fois de plus porter atteinte à celle-ci. Si le niveau d'investissement d'ERDF est insuffisant, que l'on utilise les moyens à disposition pour faire appliquer la règle. Mais d'en tirer comme conséquence qu'il faudrait casser en permanence un opérateur public qui, au demeurant, jouit d'une bonne image auprès des Français, cela est ressenti par ses personnels comme une forme d'acharnement.

S'agissant de Fessenheim, le plafonnement de la capacité nucléaire signifierait que, dès lors que l'on mettrait sur le réseau Flamanville III, il faudrait arrêter deux centrales équivalentes. Subissant actuellement le pacte de responsabilité, nous pouvons vous dire tout le mal que nous en pensons. La proposition qui nous est faite consiste à arrêter une centrale qui marche. Une indemnité est mentionnée dans l'étude d'impact du projet de loi, mais on n'en connaît pas le montant : nous trouvons cela irresponsable ! On peut certes fixer des objectifs de politique énergétique, mais, en arrêtant une centrale qui marche, on démoralise complètement les personnels. Cela revient à leur faire comprendre que, quels que soient les efforts qu'ils accomplissent, il faudra arrêter la centrale dans laquelle ils travaillent pour la seule raison qu'on a décidé, à un moment donné, qu'il fallait le faire. De plus, l'étude d'impact renvoie à EDF le soin de décider quelle centrale fermer sous prétexte que c'est elle qui a la capacité d'apprécier la situation et qui a la connaissance intime du mécanisme. Ce n'était donc pas la peine de dire qu'il fallait fermer Fessenheim.

En ce qui concerne l'emploi, 100 000 des 220 000 salariés du nucléaire doivent être remplacés d'ici à 2020. Quelles conséquences le projet de loi tire-t-il des 100 000 embauches nouvelles qui devront être effectuées ? Un problème se pose par ailleurs dans le secteur éolien, où le statut n'est pas appliqué et où règne aujourd'hui le dumping social. Quant aux embauches dans ce secteur, elles ne sont pas à la hauteur des destructions d'emplois qui pourraient se produire dans le nucléaire si, d'aventure, on fermait plusieurs centrales.

Enfin, je retiens que certains élus souhaiteraient une note sur l'hydraulique : je maintiens que la directive sur les concessions qui a été négociée au Parlement européen, puis votée par les gouvernements des États membres, permet de maintenir des droits exclusifs dans ce secteur. Je vous fournirai également une note sur le périmètre du statut.

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