Intervention de Fabrice Pruvost

Réunion du 18 septembre 2014 à 10h00
Mission d'information sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi

Fabrice Pruvost, chargé de mission au pôle économique de la CGT :

Contrairement à mes camarades, je ne fais pas partie du comité du suivi, mais je suis tout de même destinataire des documents qui s'y rapportent, et j'y ai déjà assisté. Comme vous le savez sans doute, la CGT est très critique à l'égard de l'intérêt économique du CICE. Elle ne partage pas le diagnostic ayant présidé à sa création, à savoir qu'une réduction du coût du travail constitue un facteur de compétitivité. Pour nous, le principal problème de l'économie française ne réside pas dans le coût du travail, mais dans le coût du capital.

En 2009, selon les comptes de la Nation, les sociétés non financières ont consacré 77 % de leur excédent brut d'exploitation – c'est-à-dire leur profit brut – à rémunérer leurs actionnaires plutôt qu'à investir ou à innover. Cette proportion n'était que de 17,8 % en 1988, mais n'a cessé de progresser au cours des vingt dernières années, indépendamment des fluctuations économiques. En 2011, la CGT a demandé à une équipe de chercheurs universitaires lillois de travailler sur cette question ; leurs travaux ont conclu à un surcoût du capital compris entre 95 et 133 milliards d'euros. Ce surcoût est constitué de revenus du capital prélevés sur l'entreprise – intérêts et dividendes – sans aucune justification économique et ne rémunérant pas, en particulier, le risque entrepreneurial. À la suite de ces travaux, nous avons lancé une campagne revendicative ayant pour objet de poser, tant au niveau national qu'à celui des entreprises, la question du coût du capital. Pour la CGT, les entreprises françaises ne souffrent pas – globalement, je le précise – d'un taux de marge qui serait trop bas.

Évidemment, nous avons conscience de la nécessité de distinguer la situation des entreprises de taille intermédiaire (ETI), des PME et des très petites entreprises (TPE) de celle des grandes entreprises. Cependant, pour juger d'une façon pertinente de la situation, il faut tenir compte de ce que l'INSEE appelle « l'extrême dualisme du système productif français », imputable notamment au poids des grands groupes. Des travaux récents réalisés par l'INSEE à la suite de la nouvelle définition de l'entreprise introduite par le décret de 2008 font apparaître que, si les groupes français et étrangers ne représentent que 2 % du nombre d'entreprises en France, ils emploient 64 % des salariés et réalisent 70 % de la valeur ajoutée totale – hors le secteur financier et les assurances. Des travaux antérieurs avaient montré que l'explosion du nombre de groupes d'entreprises en France depuis la fin des années 1990 s'expliquait en partie par la diffusion du régime d'intégration fiscale.

J'ai préparé cette audition en contactant plusieurs de mes camarades au sein de différentes entreprises du secteur du commerce et de la métallurgie afin de recueillir leur avis. S'il est un peu tôt pour porter un jugement définitif, ils sont dubitatifs et regrettent la méconnaissance de la dimension « groupe » par le dispositif du CICE – ainsi la mise en place de la base de données économiques et sociales n'est-elle pas obligatoire au niveau des groupes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion