Intervention de Isabelle Martin

Réunion du 18 septembre 2014 à 10h00
Mission d'information sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi

Isabelle Martin, secrétaire confédérale de la CFDT :

Je rappellerai deux ou trois points qui doivent faire l'objet d'une vigilance particulière.

Tout d'abord, je souscris à ce qu'a dit tout à l'heure Pascal Pavageau à propos de la tentative de captation du CICE des sous-traitants par les donneurs d'ordres. Ce problème a été évoqué non seulement par les organisations syndicales mais aussi par Pierre Pelouzet, le médiateur des relations interentreprises, qui a lancé l'alerte de manière très forte. C'est un point essentiel, car l'objectif du CICE n'est pas de renforcer la domination des sous-traitants par les donneurs d'ordres, mais au contraire de rééquilibrer le partage de la valeur ajoutée.

Ensuite, mais je n'entrerai pas dans le détail car je ne suis pas spécialiste de ces questions, il y aurait bien, selon nos experts, un enjeu comptable autour de l'imputation du crédit d'impôt en tant que tel ou son imputation dans le résultat d'exploitation, surtout pour les grands groupes, dont la fiscalité est pilotée par le haut. Il y va de la traçabilité. Mais ce n'est pas nouveau : cela concerne le CICE comme d'autres sujets.

J'en viens aux préconisations. Il convient d'inscrire la question de l'évaluation dans le cadre de la stratégie. À cet égard, le comité d'évaluation national est important, ne serait-ce que parce que les administrations de l'État, qui n'ont pas forcément l'habitude de parler, peuvent confronter les différentes données. La question de la cohérence de l'appareil statistique est un élément d'évaluation en soi. L'évaluation, au-delà des grands chiffres, est quelque chose d'un peu nouveau dans notre pays. Par ailleurs, le fait que l'ensemble des partenaires sociaux soient associés à ce comité permet de conjuguer des approches différentes. Nous avons d'ailleurs demandé que le champ d'intervention du comité de suivi du CICE soit étendu au suivi de l'ensemble des aides publiques – cela figure dans la feuille de route et il serait bon que ce soit rapidement mis en oeuvre – afin que ce dispositif ne soit pas traité de manière isolée. Il y va de la traçabilité, de la transparence et de l'affectation de l'ensemble des aides publiques. C'est important en matière de contrôle, notamment parlementaire, et pour l'efficacité du dialogue social.

J'ajoute que la loi prévoyait la mise en place de comités de suivi régionaux. Or, à notre connaissance, et en dépit de nos demandes, ils n'ont pas été installés, ce qui est regrettable. Ils seraient en effet particulièrement utiles, tout d'abord parce que l'on s'aperçoit que le bénéfice du CICE se concentre sur quelques régions, ensuite parce qu'ils favoriseraient un dialogue de proximité et permettraient à l'État d'examiner la manière dont sont tenus les engagements en régions, enfin parce qu'ils seraient une instance de recours pour les organisations syndicales lorsqu'elles constatent un effet d'aubaine ou un abus manifestes. L'État pourrait donc être un peu plus volontaire en la matière.

J'en viens au dialogue social dans l'entreprise, sachant que, pour l'instant, nous en sommes à l'année zéro du dispositif. À cet égard, on ne peut pas se satisfaire d'une justification ex post, qui est toujours plus ou moins sérieuse. Les situations sont extrêmement contrastées en ce domaine. De manière générale, on constate que les entreprises où un dialogue s'est noué autour du CICE sont celles dont les directions acceptent déjà de partager un certain nombre d'informations, sinon sur leur stratégie, du moins sur leur budget. C'est donc la qualité du dialogue social existant, au-delà de la familiarité du dispositif, qui permet de disposer d'une information de qualité. C'est pourquoi je disais que les éléments prévus en la matière par la loi sur le CICE sont fort utiles pour nourrir l'information et la consultation sur la stratégie de l'entreprise. Peu de comités d'entreprise ont formulé des avis, mais ces avis sont intéressants parce qu'ils portent sur les projets de la direction ; un approfondissement du dialogue est donc possible les années suivantes. Il ne s'agit pas forcément de bousculer le dispositif, mais, l'information-consultation devant intervenir avant le 1er juillet, on est plutôt dans une logique de vérification des comptes que dans une logique budgétaire. Ce n'est pas un élément essentiel – il nous avait d'ailleurs échappé à l'époque –, mais il serait peut-être bon que la consultation s'inscrive dans une logique prévisionnelle.

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