Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Réunion du 24 septembre 2014 à 9h00
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel, rapporteure pour les titres Ier et V :

Je tiens à saluer le formidable travail préparatoire au terme duquel a été déposé un texte qui donne force de loi à la feuille de route tracée par le Président de la République lors de la Conférence environnementale de 2013, et qui traduit les engagements de campagne du candidat François Hollande.

Depuis deux ans, une large concertation s'est tenue sur les territoires, qui a associé l'ensemble des acteurs intéressés par la transition énergétique : citoyens, associations, élus, chercheurs et acteurs économiques, tous se sont mobilisés. Un dialogue renforcé avec toutes les parties prenantes, dans le cadre du débat national sur la transition énergétique, du Conseil national de la transition écologique, et des Conférences environnementales annuelles a permis de poursuivre les efforts initiés par le Grenelle de l'environnement. Il s'agit donc d'un texte qui s'inscrit dans la continuité des actions menées par notre pays, et qui marque une rupture annonciatrice d'une croissance verte créatrice de richesses, d'emplois durables et de progrès.

Le titre Ier du projet de loi vise à « définir les objectifs communs pour réussir la transition énergétique, renforcer l'indépendance énergétique de la France et lutter contre le réchauffement climatique ». Il comprend deux articles définissant les objectifs des politiques publiques en matière d'énergie.

L'article 1er procède à la modification de trois des quatre articles du titre préliminaire du livre Ier du code de l'énergie, relatifs aux objectifs de la politique énergétique. La plupart des objectifs assignés à la politique énergétique figurent d'ores et déjà dans le code de l'énergie. Ils sont pour la plupart issus de la loi de programme, du 13 juillet 2005, fixant les orientations de la politique énergétique, dite loi POPE. Aujourd'hui, il s'agit de les moderniser de manière à rendre encore plus ambitieuse notre politique énergétique.

Ainsi, est consacré le principe selon lequel la politique énergétique vise « l'émergence d'une économie sobre en énergie et en ressources, compétitive et riche en emplois » grâce à « la mobilisation de toutes les filières industrielles et notamment celles de la croissance verte ». Définie comme un mode de développement économique respectueux de l'environnement, la croissance verte associe autant les industries directement liées à l'environnement – assainissement de l'eau, recyclage et valorisation énergétique des déchets, dépollution des sites, énergies renouvelables – que les secteurs traditionnels tels que les transports, l'agriculture et le bâtiment.

Par ailleurs, l'article 1er consacre les territoires à énergie positive (TEPOS), dont la reconnaissance constitue une étape importante pour la promotion de territoires propres engagés dans une démarche de transition énergétique. Cette disposition est évidemment à rapprocher de l'article 56 du projet de loi, qui vise à impulser une dynamique d'expérimentation de territoires à énergie positive, partagée entre l'État et les collectivités territoriales, l'objectif étant d'engager 200 expérimentations de territoires à énergie positive d'ici à 2017.

Enfin, l'article 1er actualise les objectifs quantitatifs assignés à la politique énergétique nationale, en déployant une feuille de route ambitieuse. Deux nouveaux objectifs quantitatifs d'importance viennent compléter ceux déjà formulés : la réduction de la consommation énergétique finale des énergies, et la réduction de la part du nucléaire à 50 % dans la production d'électricité. Nous aurons l'occasion de débattre de ces sujets dans le cadre de l'examen du titre VI rapporté par Philippe Plisson. Pour ma part, je suis convaincue que cette stratégie met en oeuvre de manière ambitieuse la transition énergétique et écologique. Il est temps de faire évoluer notre modèle énergétique et de faire face aux défis qui sont devant nous, à l'échelle nationale et internationale.

Le titre V consacré aux énergies renouvelables (EnR) était attendu : il est au coeur d'une transition énergétique ambitieuse, audacieuse, qui confirme le rang de la France parmi les nations à la pointe de la lutte contre le changement climatique.

L'ambition et l'audace sont au rendez-vous, et le soutien aux énergies renouvelables est renforcé. L'article 23 reconnaît les producteurs d'énergie verte comme de vrais acteurs de marché, qui ont toute leur place dans notre mix énergétique. Il ne s'agit plus, comme il y a dix ans, d'accompagner des filières encore balbutiantes, car la production d'énergie renouvelable en France est devenue une réalité tangible. Nous serons néanmoins attentifs à ce que le basculement vers une logique de marché ne soit pas trop abrupt, notamment pour les petites exploitations et les filières non matures.

De même, il faut se féliciter de l'introduction de nouvelles sanctions, à l'article 25, pour lutter contre le dévoiement des dispositifs d'aide. Aujourd'hui, beaucoup de producteurs d'énergie renouvelable, de bonne foi, constatent avec amertume la multiplication des fraudes. Celles-ci ternissent leur image et sèment le doute sur les capacités de développement vertueux du secteur. Nous attendons un signal fort du Gouvernement pour mettre en oeuvre ces sanctions grâce à des contrôles renforcés.

Enfin, il faut souligner, aux articles 26 et 27, la remarquable avancée que constitue la possibilité de développer, à l'échelle des territoires, des projets d'exploitation d'électricité renouvelable, qui associent habitants, collectivités et porteurs de projet. Le financement participatif dans le domaine du renouvelable constitue peut-être une des mesures les plus prometteuses du projet de loi : il permettra à la fois d'encourager les projets citoyens et d'améliorer l'adhésion des habitants qui en seront désormais un peu les propriétaires.

Afin de bien comprendre les dispositions du projet de loi relative à l'hydroélectricité, il convient de remettre le sujet en perspective. Nous partons de loin : en 2010 était actée la mise en concurrence sans condition du parc hydroélectrique français, mais cette décision n'était pas satisfaisante, comme nous l'avions relevé avec Éric Straumann, dans notre rapport d'information sur l'hydroélectricité. Aujourd'hui, la ligne a bougé, donnant lieu à de nouvelles possibilités. Ainsi, le barycentre est une méthode innovante, qui permet de prendre en compte des périmètres cohérents à partir de concessions dont les dates d'échéance sont désormais étalées dans le temps. Les sociétés d'économie mixte hydroélectrique permettent d'associer pleinement les acteurs locaux à la gestion de l'eau, qui est au centre de nombreux usages.

Nous défendrons des amendements pour améliorer le dispositif. L'un concernera notamment la mise en place de comités de gestion de l'eau lorsque l'État ne demande pas la création d'une société d'économie mixte (SEM) hydroélectrique. Un autre sera relatif à la possibilité de prolonger les concessions sous condition de travaux. De cette façon, la France se dotera d'une véritable « boîte à outils ». En fonction du contexte propre à chaque vallée, nous serons en mesure de trouver des solutions adaptées.

La loi de transition énergétique permettra de préserver le contrôle sur le parc hydroélectrique français et de garantir la mise en valeur d'une énergie renouvelable décisive. J'aime à le rappeler : l'hydroélectricité est la plus compétitive, la plus propre des énergies ; surtout, elle permet de stocker l'électricité.

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