J'abonde tout à fait dans ce sens. En début de carrière, je négociais chaque année l'aménagement et l'organisation du temps de travail, non pas pour procéder à des changements radicaux, mais pour nous adapter aux variations de l'activité au cours de l'année à venir. Au fil du déroulement de ma carrière, j'ai vécu, en tant qu'organisateur de négociations sur plusieurs dizaines de sites en France, ce que vient de décrire M. Bérard : la négociation sur l'aménagement du temps de travail est devenue d'une pauvreté absolue, au point parfois de ne même plus constituer un objet de discussion. Or l'aménagement et l'organisation du temps de travail doivent être rediscutés chaque année, car la vie de l'entreprise est différente d'une année sur l'autre et il importe de bien anticiper.
Si j'avais un seul message à vous délivrer, il serait le suivant : il faut vraiment simplifier les textes afin, sur le sujet qui nous intéresse ici, de redonner à la négociation collective une place qu'elle a perdue. L'enchevêtrement de textes auquel j'ai précédemment fait allusion a complètement inhibé cette capacité de négociation.
Par ailleurs, ne nous cachons pas que la réduction du temps de travail a également contribué à l'accroissement de l'automatisation, en particulier dans les entreprises industrielles où il fallait maintenir la productivité.
En matière d'aménagement du temps de travail, la situation des cadres est un point compliqué. Le régime des 35 heures ne signifie rien pour un cadre. Des forfaits heures ou jours à l'année ont été mis en place parce qu'ils n'ont pas forcément tous une mission d'encadrement. Souvent, les « cadres » sont en fait des experts techniques chargés de résoudre des problèmes ou de gérer des projets. Au-delà de la symbolique des 35 heures, tout en maintenant les garde-fous nécessaires, il faut que nous retrouvions des marges de manoeuvre.
Alors que, historiquement, la notion de modulation du temps de travail, attachée à l'évolution de la situation en cours d'année, faisait systématiquement l'objet d'une réflexion dans le cadre des négociations au sein de l'entreprise, j'ai constaté ces dernières années que les négociateurs en avaient perdu l'habitude. Là aussi, on peut imputer cette évolution à la complexité des textes en vigueur.