Soyons clairs sur le cadre de nos discussions : elles ont trait, non pas à la politique économique et sociale de notre pays, mais au temps de travail, question que nous essayons d'examiner de façon aussi dépassionnée que possible, même si chacun a ses préjugés.
Cela implique d'être attentifs à la chronologie, tant aux conditions de la mise en place des 35 heures avec les lois Aubry I et Aubry II qu'à leur application concrète. Jean-Patrick Gille a insisté sur la réorganisation des process et du travail qu'avaient permise les négociations entreprise par entreprise. Il ne fait pas de doute qu'elles ont permis des gains de productivité dans certains cas.
D'un point de vue historique, monsieur Pilliard, vos fonctions au sein du MEDEF et votre poste de délégué général de l'UIMM, qui vous place au coeur d'une industrie qui a beaucoup souffert et qui continue de souffrir, ont fait de vous un témoin doublement privilégié, en particulier de la façon dont les process industriels ont été affectés, non seulement dans les très grandes entreprises mais aussi dans tout l'archipel que constituent les petites structures. Il nous intéresse de savoir comment la réduction du travail a été appliquée. Du temps du gouvernement Jospin, y a-t-il eu des difficultés ? La plupart des accords se sont traduits par le maintien du salaire nominal mais d'autres ont été marqués par des gels de rémunérations. Quelles ont été les répercussions sur l'emploi ?
Comment les choses ont-elles évolué par la suite ? Le cadre juridique n'est, en effet, plus tout à fait le même que celui qui avait été mis en place à l'issue de la loi Aubry II. Votre argument selon lequel il ne faudrait pas le même costume pour tout le monde pose la question de la durée légale, comme Jean-Patrick Gille l'a souligné. Ne reconnaissez-vous pas qu'il existe aujourd'hui des éléments de souplesse comme l'annualisation du temps de travail ou encore le forfait jours pour les cadres, qui leur permet d'avoir des « charrettes », comme disent les architectes lorsqu'ils sont en retard sur des projets à remettre à date fixe ? Le dispositif actuel vous paraît-il adapté ? Si non, doit-il être modifié et pourquoi ?
Enfin, un an à peine après la mise en place de la loi relative à la sécurisation de l'emploi, qui a transcrit très rapidement l'ANI, vous considérez que certaines de ses dispositions, comme les accords de maintien dans l'emploi, ne sont pas bonnes. J'aimerais savoir pourquoi.