Intervention de Emmanuel Martin

Réunion du 23 septembre 2014 à 10h00
Mission d'information sur la candidature de la france à l'exposition universelle de 2025

Emmanuel Martin, délégué général du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs :

Le Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs, que je représente aujourd'hui, est le syndicat des éditeurs de jeux vidéo. Dans la galaxie du numérique, nous occupons les bureaux du fond du couloir à gauche !…Nous sommes un mode un peu particulier, car nous passons beaucoup de temps à sauter sur des champignons, à ranger des bonbons et à tirer sur tout ce qui bouge. Cela dit, nous aimons nous voir comme des ambassadeurs du numérique. De fait, notre média est le premier contact qu'ont les enfants ou les adultes avec le numérique. Le jeu vidéo est un cas particulier, mais en même temps le cas type de la relation du public avec le numérique.

On peut suivre cette relation dans la façon exponentielle dont le jeu vidéo a grandi. Il y a quinze ans, en 1999, 20 % de la population française jouait régulièrement contre 50 % aujourd'hui. L'âge moyen des joueurs était de 21 ans ; il est de 38 ans aujourd'hui. Les femmes représentaient 10 % de cette population de joueurs ; aujourd'hui un joueur sur deux est une femme.

Cette entrée du jeu vidéo – et encore une fois du numérique derrière lui – dans le grand public est sans doute un des phénomènes les plus marquants de ces dix dernières années. C'est également toute la difficulté pour notre industrie de se projeter en 2025. En effet, nous sommes aujourd'hui sur des cycles d'innovation de temps courts, de l'ordre de trois, quatre ou cinq ans. Honnêtement, je ne sais pas de quoi sera fait le jeu vidéo en 2025. Mais, encore une fois, le jeu vidéo est celui où les innovations rentrent en contact avec le grand public. C'est pour cela que pour notre industrie, l'idée d'une exposition universelle à Paris en 2025 est une fabuleuse perspective. Tout ce qui, justement, nous donne un cap pour aller à la rencontre du plus grand nombre est pour nous enthousiasmant.

Il convient d'être tout à fait clair sur les tendances que l'on observe dans le jeu vidéo et dans le numérique en général. Il se trouve que nous sommes passés d'un monde extrêmement technologique, de technologie « dure » (la 3D, l'intensité graphique de l'immersion) à un monde beaucoup plus souple avec, notamment, l'immersion totale dans la réalité virtuelle ; souvenez-vous du récent achat de l'Oculus Rift, cette technologie de casques d'immersion 3D, par Facebook, pour plus de 2 milliards de dollars. Ces technologies souples permettent à l'utilisateur d'être au centre d'un monde virtuel qui révèle la dimension sociale du jeu vidéo, devenu une transverse absolument considérable de notre industrie. En effet, aujourd'hui, le jeu vidéo ne se conçoit pas autrement que dans le lien avec une communauté, une communauté d'expériences et de joueurs. C'est sans doute ce qui pourrait guider la réflexion de notre industrie dans la perspective d'une exposition universelle.

Pour être tout à fait concret, nous avons créé il y a quatre ans un salon dédié aux jeux vidéo, la Paris Games Week. Le concept de ce salon était de rendre réelles, une fois par an, toutes les communautés virtuelles qui s'agitaient autour du jeu vidéo. En quatre éditions, il est devenu le cinquième plus gros salon français et le troisième salon au monde. Nous avons la certitude que ce succès est dû à nos communautés.

Pour nous, une exposition universelle, c'est la perspective d'aller toujours plus à la rencontre des communautés. C'est la possibilité de montrer ce qu'est aujourd'hui le patrimoine de la France en matière de jeux vidéo ; nous avons une histoire particulièrement riche, nous avons des grands noms de l'histoire du jeu vidéo, et la France est aujourd'hui une des places fortes du jeu vidéo mondial. Mais c'est aussi la possibilité de montrer en quoi le jeu vidéo est un formidable moyen de stimuler la curiosité, de faciliter l'apprentissage et de créer des liens, des communautés, des intérêts. Ce processus global qui prend le nom de « gamification » sera forcément une intéressante perspective dans l'idée de la dimension numérique de l'exposition universelle.

Par exemple, vous pourrez lire aujourd'hui dans Les Échos un article sur « Ingress », un jeu en réalité augmentée, développé par une filiale de Google. C'est une façon de mettre le monde en jeu : avec son smartphone, on visite une ville dans la réalité ; mais le smartphone donne une autre géographie à la ville, donne d'autres indications sur la ville qui permettent de rentrer dans un scénario et un jeu.

Ces tendances vers la réalité virtuelle et aujourd'hui vers la réalité augmentée foisonnent dans le jeu vidéo et dans le numérique en général. Ce sont sans doute les perspectives vers lesquelles nous irons dans les dix prochaines années. Mais encore une fois, c'est le moyen, pour les communautés, de s'approprier le numérique à travers le jeu vidéo. C'est sans doute tout l'enjeu de ce que l'industrie du jeu vidéo pourrait apporter à l'exposition universelle.

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