Intervention de Ségolène Royal

Séance en hémicycle du 1er octobre 2014 à 15h00
Transition énergétique — Présentation

Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie :

… et enfin, la motivation et l’engagement de tous les élus de nos territoires, par-delà les clivages politiques.

Ma troisième observation est que vous légiférez à un moment où, dans le monde, les choses évoluent à vive allure, ce qui ouvre à la France des possibilités nouvelles mais l’oblige aussi à presser le pas. J’étais, il y a une dizaine de jours, au sommet de l’ONU, à New York ; j’ai été frappée de voir avec quelle énergie – si j’ose dire – des pans entiers du monde de l’industrie et des affaires aux États-Unis s’engagent désormais de tout leur poids dans l’économie verte.

Certes, il reste des lobbies pétroliers qui financent abondamment les tenants du climato-scepticisme, mais c’est là un combat d’arrière-garde au regard de celui, tourné vers l’avenir, des partisans déterminés, grands groupes et start-up innovantes, PME de la « nouvelle économie climatique ».

Ils ont compris que l’inaction a un coût ; ils ont compris que le dérèglement climatique et la multiplication des événements météorologiques extrêmes menacent les économies et risquent d’être la source de pertes faramineuses ; ils ont compris que la croissance verte, qui réconcilie économie et écologie, devient le nouveau gisement d’innovations technologiques et de production de richesses.

Ce basculement procède de l’intérêt bien compris, mais il est aussi une contribution très significative à l’évolution du rapport de forces mondial en faveur de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables. À nous d’y intégrer le volet social afin de construire la social-écologie. Sur tous les continents, des villes et des régions, souvent regroupées en réseaux mondiaux, ont déjà fait la preuve que des solutions existent et que cela fonctionne. C’est en étant exemplaires dans notre pays que nous pourrons peser lors du sommet mondial que la France accueillera en décembre 2015.

À New York, alors que nous participions ensemble à la marche pour le climat, M. Ban Ki-moon m’a dit combien il comptait sur la France pour entraîner et mobiliser le monde.

Ma quatrième observation concerne les liens entre le climat et la biodiversité – pour le pire et pour le meilleur.

Pour le pire, car le dérèglement climatique détruits les équilibres écosystémiques, qui nous rendent pourtant de nombreux services. Les espèces végétales et animales n’ont plus le temps de s’adapter : en quarante ans, 52 % des espèces vertébrées ont disparu de la planète, à mesure que sont détruits les forêts, les mers et les récifs coralliens qui les abritent, les terres qui nous nourrissent, mais aussi l’eau, sans laquelle il n’est pas de vie possible et pour laquelle, déjà, bien des conflits se dessinent.

Mais aussi pour le meilleur, car les ressources d’une biodiversité intelligemment protégée et valorisée atténuent les émissions de gaz à effet de serre et les pollutions, contribuent à prévenir les effets du changement climatique – sécheresse, cyclones, tempêtes – et protègent mieux de ses conséquences. C’est vrai, par exemple, des forêts côtières et des mangroves qui ralentissent le déferlement des inondations, des apports de l’agro-écologie et de l’ingénierie écologique, et même de la biodiversité en ville où l’effet rafraîchissant des arbres peut faire rempart aux canicules urbaines.

Je tenais à souligner ce lien, car les choix énergétiques, les types d’agriculture ou d’urbanisation et la protection de la nature en milieu urbain, rural et péri-urbain, sont interdépendants.

Mesdames et messieurs les députés, le premier sommet de la terre proclamait en 1972 : « Tout être humain a deux patries, la sienne et la planète ». Le projet de loi qui vous est présenté permet de prendre efficacement soin de l’une et de l’autre en apportant à nos entreprises – industrielles, artisanales et de services – de nouvelles perspectives d’expansion protectrices de notre environnement. Il apportera aux citoyens les résultats concrets qu’ils attendent, à commencer par des emplois durables, qui permettent une montée en qualification soutenue par des plans de formation professionnelle comme ceux que nous avons mis en place avec la Fédération du bâtiment et ma collègue ministre du logement. Il leur apportera également du progrès social, du pouvoir d’achat et du bien-être. Mais aussi, et ce n’est pas moins vital, l’espoir de vivre mieux dans un pays qui reprend son destin énergétique en main et, plus largement, peut à nouveau croire en un avenir qui ne se limite pas à ce qui vient après le présent, mais l’éclaire, lui donne un sens et vaut le coup d’être désiré et bâti par tous.

Dans les territoires dont vous êtes les élus, vous voyez bien que, sur le terrain, le mouvement est lancé. Il doit être approfondi, accéléré et consolidé. C’est l’objectif de ce projet de loi.

J’ai travaillé avec beaucoup d’entre vous lors de la préparation de ce texte, y compris avec les élus de l’opposition membres de la commission spéciale. J’ai pu apprécier notre souci commun d’engager des réalisations concrètes au service de tous les Français. Un beau et grand débat de société nous rassemble aujourd’hui pour doter la France de la législation la plus avancée de tous les pays d’Europe, car elle est la seule, à ce jour, à intégrer toutes les dimensions de la transition énergétique et de la croissance verte.

J’aimerais, je vous l’avoue, qu’à l’issue de cette discussion parlementaire nous puissions partager, au-delà des clivages partisans, la conviction d’avoir permis à notre pays d’inventer le futur en agissant avec efficacité dès aujourd’hui.

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