Intervention de Denis Baupin

Séance en hémicycle du 1er octobre 2014 à 15h00
Transition énergétique — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenis Baupin, rapporteur de la commission spéciale :

Le budget carbone et la stratégie bas carbone constituent des innovations majeures. Ils permettront à la France de piloter la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre. Inutile de dire qu’au moment où notre pays s’apprête à accueillir la plus importante conférence internationale sur le climat, ce signal est très attendu. Si nous voulons que cette conférence réussisse – et elle doit absolument réussir –, la France se doit d’être exemplaire ; ces outils lui en donnent les moyens.

Précisons qu’à l’occasion de nos travaux en commission – je veux d’ailleurs souligner ici la qualité du travail que nous y avons mené, sous la férule bienveillante de son président, et vous remercier, madame la ministre, de votre écoute et de votre volonté de co-élaboration –, nous avons eu l’occasion de compléter cet outil en le dotant de moyens de suivi des émissions liées à nos importations. Rien ne serait pire que de s’illusionner sur une réduction de nos émissions qui ne serait liée qu’à la délocalisation des activités industrielles. Ce serait une catastrophe à la fois pour l’environnement et pour l’emploi.

Le second outil est la PPE, la programmation pluriannuelle de l’énergie. Pour la première fois, nous nous dotons d’un outil transversal, multi-énergie, qui prendra en compte non seulement l’électricité et le gaz, mais aussi le pétrole, les réseaux de chaleur, les énergies renouvelables, ainsi que – et c’est un changement de logiciel crucial – la politique d’efficacité énergétique.

Étant donné l’importance de ces différents outils, il est apparu indispensable à notre commission non seulement de confirmer les étapes de concertation préalable à leur élaboration et à leur suivi, mais aussi de doter le Gouvernement d’un comité d’experts pluraliste, comme cela avait été unanimement souhaité lors du débat national sur la transition énergétique. Qu’il me soit permis de souligner ici combien ce débat préalable aura été utile, non seulement pour l’élaboration de la loi, mais aussi pour que tous les acteurs – entreprises, syndicats, collectivités locales, ONG – puissent confronter leurs points de vue. Il le sera également pour la mise en oeuvre même de cette loi. Si toutes les lois de la République étaient précédées de tels débats, nul doute que notre démocratie se porterait mieux et que la délibération publique serait plus efficace. J’ajouterai, si vous le permettez, que ce débat n’est sans doute pas étranger au fait que, selon un sondage publié hier, 75 % des chefs d’entreprise de notre pays attendraient avec impatience cette loi de transition énergétique.

Le titre sur la gouvernance est aussi celui qui organise le pilotage du mix électrique ; nul doute qu’il donnera lieu à de nombreux échanges. En organisant le plafonnement de la puissance nucléaire, en confiant au principal électricien l’élaboration d’un plan stratégique conforme à la programmation pluriannuelle, en attribuant au commissaire du Gouvernement un droit de veto, cette loi dote l’État d’outils indispensables pour tenir les engagements inscrits au titre I, notamment la réduction d’un tiers de la part du nucléaire dans la production d’électricité.

C’est d’autant plus vrai que notre commission, sur proposition du rapporteur Philippe Plisson, a inscrit pour la première fois dans le droit français une procédure d’encadrement de la prolongation de la durée de vie des réacteurs qui constitue une avancée majeure, en matière tant de démocratie que de sécurité pour nos concitoyens face aux risques industriels et de moindre vulnérabilité s’agissant de notre approvisionnement électrique.

Précisons aussi qu’au sein de ce titre VIII notre commission a tenu à inscrire dans la loi le statut de l’IRSN, outil indispensable du dispositif dual de sûreté nucléaire et de transparence de l’information.

Le troisième chapitre de ce titre VIII n’est pas le moins important : c’est celui qui organise la décentralisation de la politique énergétique. Cette loi confirme le rôle de la région comme chef de file de la transition énergétique et renforce la capacité des intercommunalités à piloter la politique énergétique sur leur territoire. D’ores et déjà, nos territoires ont été dotés d’outils de planification : les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie, ou SRCAE, au niveau régional, et les plans climat-énergie territoriaux, les PCET, au niveau local.

Planifier, c’est bien ; mettre en oeuvre, c’est beaucoup plus important. La loi dote donc ceux qui élaborent les plans des outils pour organiser concrètement cette transition énergétique.

Au niveau régional, ce sera le service public de l’efficacité énergétique, créé par la loi Brottes et confirmé au titre II de cette loi. Il s’appuiera notamment sur les plates-formes de la transition énergétique, mais aussi sur les espaces info-énergie, les agences locales de l’énergie et du climat et les agences régionales de l’énergie. Au niveau local, la loi fait des EPCI qui élaborent les plans climat les coordinateurs de la transition énergétique. Point important : à tous les niveaux territoriaux, la politique énergétique et climatique embarque avec elle la compétence qualité de l’air, ce qui permettra de démultiplier l’efficacité de l’action menée au profit de la santé de nos concitoyens.

Enfin, dernier sujet crucial, le titre VIII est aussi celui qui introduit une innovation très importante pour lutter contre la précarité énergétique : le chèque énergie. Cette avancée était très attendue, et ce, d’autant plus que notre pays compte plus de 8 millions de précaires énergétiques.

Les tarifs sociaux existants ont indéniablement leur utilité, mais ils souffrent de deux insuffisances : d’une part, ils bénéficient aux ménages qui se chauffent à l’électricité ou au gaz, mais pas aux nombreux ménages qui se chauffent au fioul et, d’autre part, ils permettent certes d’alléger la facture énergétique, mais ne contribuent pas à réduire la consommation. Avec le chèque énergie, on pourra pallier ces deux insuffisances : l’ensemble des ménages seront concernés et le chèque pourra être utilisé pour des achats permettant de réduire la consommation d’énergie, soit pour aménager le logement et maîtriser son chauffage, soit, comme j’aurai l’occasion de le proposer, en permettant par exemple l’achat de réfrigérateurs ou d’appareils d’eau chaude sanitaire performants sur le plan énergétique.

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