Madame la présidente, madame la ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises lors de l’examen des motions de procédure, la transition énergétique est un sujet suffisamment important et fédérateur pour que le Gouvernement puisse compter sur mon indéfectible soutien.
Je ne souhaite pas revenir ici sur l’intérêt général du texte, puisque mes collègues l’ont fait avant moi, et de fort belle manière. Aussi, je m’arrêterai à nouveau sur le cas complexe de la Guyane.
Tout d’abord, je voudrais remercier mes collègues Erika Bareigts et Daniel Fasquelle qui, dans leur rapport sur l’adaptation du droit de l’énergie aux outre-mer, ont souligné « la situation très grave des communes de l’intérieur guyanais ». Il fait toujours bon de savoir que nous ne sommes pas seuls, nous autres élus guyanais, à tenter de faire sentir à la représentation nationale l’urgence qu’il y a à nous atteler ensemble à la définition de solutions pérennes susceptibles de juguler les graves difficultés que rencontrent des milliers de nos concitoyens d’ici et surtout d’ailleurs.
La Guyane fait figure de bon élève en matière de production d’énergies renouvelables – elles comptent actuellement pour 70 % de son mix électrique – et dispose nombreux atouts pour devenir la vitrine de l’excellence environnementale à la française. Malgré cela, à cause de l’immensité de son territoire et de sa démographie galopante, la notion de service public de l’énergie y est particulièrement mise à mal. Pas moins de 80 000 de nos citoyens sont ainsi inlassablement discriminés. Ils sont souvent alimentés en électricité par des réseaux de très petite taille qui grèvent lourdement les maigres budgets des collectivités municipales, quand ils ne sont pas tout simplement plongés en permanence dans la pénombre. Vous comprendrez donc à quel point il m’est difficile de parler ici de « croissante verte » tandis qu’une grande partie de notre population n’a pas accès à ce bien fondamental qu’est l’électricité.
Je ne puis m’y résoudre. Voilà pourquoi je militerai sans relâche, et avec toute la conviction qui s’impose, pour un abaissement du seuil d’intervention de l’opérateur national, qui est le seul en mesure de faire face à la tâche immense qu’est l’électrification de l’intérieur guyanais. C’est nécessaire du simple point de vue de l’égalité – voire de l’équité – entre les territoires, mais aussi entre les citoyens de notre pays.
Il ne faudra pas s’arrêter là. Quid du FACÉ, le fonds d’amortissement des charges d’électrification, qui, adapté aux réseaux hexagonaux, fait la part belle aux infrastructures existantes et ne réserve plus que 12 % de ses fonds à l’extension du réseau de distribution ? Nous devons absolument le repenser en profondeur, car il est particulièrement inadapté aux réalités guyanaises. C’est bien simple : les fonds réservés à la Guyane pour l’extension du réseau existant se sont résumés à une maigre enveloppe de 250 000 euros pour 2014.
Plus inquiétant encore, alors même que, comme je vous le disais précédemment, la plupart des hameaux de l’intérieur ne sont raccordés à aucun réseau, et se trouvent de ce fait exclus de la péréquation tarifaire, le programme spécial no 794 du FACÉ pour le financement de la production d’électricité dans les sites isolés n’a prévu aucune dotation pour la Guyane ni en 2013, ni en 2014.
Au-delà de ces régimes d’aides quasi obsolètes, nous devons nous interroger sur la répartition des rôles entre l’opérateur public d’électricité, EDF SEI – c’est-à-dire EDF Systèmes Énergétiques Insulaires – pour l’outre-mer, et les collectivités territoriales. Est-il réellement pertinent de confier la gestion d’ouvrages de production à des communes dont les budgets comptent parmi les plus faibles de France ? La question qui se pose ici est celle du service public dans son sens le plus fondamental !
Les débats à venir devront être à la hauteur des enjeux et des défis qui se dressent sur notre route : c’est impératif. Madame la ministre, chers collègues, je suis persuadé qu’ensemble, nous saurons enfin trouver une solution idoine aux difficultés que rencontre non seulement la Guyane, mais aussi toutes les zones non interconnectées. J’évoquais, dans une intervention précédente, le caractère très énergivore des installations de la base spatiale de Kourou. Le sentiment que la production et l’accès à l’énergie se font à une vitesse différente selon que l’on est riche ou pauvre est largement partagé au sein de nos populations. Le président François Mitterrand avait d’ailleurs trouvé anormal que la France et l’Union européenne « tirent des fusées sur fond de bidonvilles ».
Madame la ministre, les Guyanais et les populations d’outre-mer n’ont cessé, depuis mai 2012, de nous réitérer leur confiance et de placer en vous leurs espoirs. Faisons donc en sorte de ne pas les décevoir, en adoptant une attitude résolument positive et empreinte d’une belle empathie républicaine vis-à-vis des quelques amendements que nous avons déposés. D’avance, je vous en remercie.