Intervention de Barbara Romagnan

Réunion du 17 septembre 2014 à 14h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Romagnan :

J'ai fait partie d'un groupe de travail sur la précarité énergétique au sein du groupe socialiste, et il me paraissait important de montrer que la transition énergétique présente également des enjeux en termes de répartition des richesses. Certes, la transition énergétique a un coût mais la précarité énergétique a aussi un coût, comme d'ailleurs le fait d'être en retard dans les engagements que nous avons pris en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Les auditions menées au sein de la Délégation sur la précarité énergétique ont montré le manque de données sur les femmes. Or, parmi les précaires, la part des familles monoparentales est importante et celles-ci sont majoritairement composées de femmes avec des enfants. Parmi les personnes seules en milieu rural, il y a aussi beaucoup de femmes, notamment au-delà de 80 ans.

À cet égard, si la circulaire du 23 août 2012 prévoyait la prise en compte systématique dans la préparation des textes législatifs de leur impact en termes d'égalité entre les femmes et les hommes, tel n'a pas été le cas pour le projet de loi relatif à la transition énergétique, dont l'étude d'impact ne comporte aucune disposition sur ce point.

La précarité énergétique a été officiellement définie dans la loi en 2010, à la suite du Grenelle de l'environnement. Elle désigne la situation d'une personne dont l'accès au confort énergétique est compromis par la faiblesse de ses revenus ou par un logement ne disposant pas des conditions thermiques nécessaires pour y vivre sereinement. Cette définition repose donc sur trois critères : la faiblesse des revenus, la mauvaise qualité thermique du logement et le coût de l'énergie. Certaines enquêtes, comme l'enquête Phébus, prennent également en compte le critère de la sensation de froid.

Ce qui nous laisse penser que les femmes sont plus vulnérables à la précarité énergétique, c'est qu'elles sont plus exposées au risque de pauvreté. Parmi les « précaires énergétiques », le pourcentage de femmes seules est important, qu'elles soient chefs de famille monoparentale ou qu'elles vivent seules en zone rurale, souvent âgées. Ces femmes isolées et âgées sont souvent locataires du parc privé, n'osent rien demander et sont éloignées des administrations qui pourraient leur proposer de l'aide.

Nos intuitions ont été corroborées par les chiffres communiqués par les associations auditionnées par la Délégation, qui ont l'expérience du terrain. Cependant, nous avons constaté que les données chiffrées étaient anciennes (2006) et peu nombreuses concernant cette question de la surreprésentation des femmes seules et des familles monoparentales au sein des « précaires énergétiques ».

Avec la présidente Catherine Coutelle, nous avons donc adressé un courrier à la ministre de l'Écologie, du développement durable et de l'énergie, Mme Ségolène Royal, en vue de recueillir des chiffres plus précis et actualisés, d'autant que les associations craignent que la situation ne se soit aggravée avec l'augmentation des prix de l'énergie depuis quelques années.

De ces travaux, j'ai retenu trois pistes d'action :

– tout d'abord, accélérer la rénovation énergétique des logements, en se focalisant davantage sur les plus précaires ; le programme « Habiter mieux » est insuffisant face à cette problématique et par ailleurs, beaucoup de personnes n'osent pas solliciter de l'aide ;

– ensuite, s'agissant des dispositifs d'aide à la facture, l'article 60 du projet de loi relatif à la transition énergétique prévoit d'étendre le chèque énergie à l'ensemble des sources d'énergie, outre le gaz et l'électricité, mais il y a une limite : sans accroissement des financements, l'augmentation du nombre de bénéficiaires risque de réduire le montant de l'aide accordée, qui est relativement faible aujourd'hui – de l'ordre de 90 euros sur une facture annuelle moyenne de 1 600 euros ;

– enfin, nous pouvons agir au niveau des normes. Dans un premier temps, il s'agirait d'informer et d'accompagner des propriétaires, occupants ou non, qui ne sont pas nécessairement aisés, pour les aider à rénover leur logement, mais ensuite, pour ceux qui en ont les moyens, d'autres mesures pourraient être envisagées, y compris l'interdiction de louer un logement qui serait une « passoire énergétique », ou bien encore l'augmentation de la taxe foncière sur de tels logements. Tout cela se ferait naturellement par étapes.

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