– C'est vrai, mais il reste une part d'appréciation personnelle sur des faits qui ne sont pas toujours clairement établis. Toujours est-il que je trouve que la conférence de citoyen est un outil très intéressant.
Concernant le rapport, je n'ai évidemment pas eu le temps d'en lire l'intégralité, mais j'ai notamment pu en survoler les titres. Je ne suis pas d'accord avec ce qui est écrit sur la pertinence du retraitement et de la production de MOX. La commission d'enquête a fait la démonstration – c'est d'ailleurs ce qu'indiquent Areva et EDF – que si les combustibles étaient stockés directement plutôt que d'être retraités cela ne coûterait pas plus cher et peut-être même moins cher, tout en évitant beaucoup de transports et d'opérations particulièrement problématiques en termes de sûreté. Vous ne serez pas surpris de ma position, conforme à celle du mouvement écologiste.
Nous pensons aussi que la quatrième génération est un leurre. À cet égard, je rejoins ce qui a été dit sur le fait que toutes les technologies de quatrième génération posent des problèmes de sûreté. Je suis aussi d'accord sur le fait qu'il n'est pas acceptable que le CEA ne veuille pas appliquer les consignes de l'ASN en matière de sûreté pour le projet de réacteur ASTRID. Quand j'ai interrogé l'Administrateur général du CEA en commission d'enquête, il a indiqué être en désaccord avec ce que proposait l'ASN en matière de sûreté. Cela pose problème, car nous sommes tous d'accord ici pour dire que la parole de cette autorité indépendante ne doit pas être remise en cause.
Je suis aussi d'accord sur le fait qu'il faut sécuriser le financement des charges futures, que ce soit pour le démantèlement ou le stockage des déchets radioactif. Il est exclu que les générations futures payent à notre place les conséquences de notre consommation d'électricité. Par conséquent, je partage ce qui est dit sur la CNEF, sa reconduction et son renouvellement. D'ailleurs, la Cour des comptes, dans le rapport qu'elle a rendu à la commission d'enquête, soulignait la nécessité d'écarter les demandes de dérogations des producteurs de déchets.
En revanche, l'affirmation d'un « impératif du stockage en profondeur » représente un point de désaccord. Sur ce point, je ne partage pas l'analyse de Jean-Yves Le Déaut sur la prééminence des dangers des piscines à Fukushima. Cela signifierait qu'il ne faudrait pas non plus de piscine dans les centrales françaises, alors qu'elles sont indispensables pour refroidir les combustibles usés, impossibles à transporter en l'état sur de longue distance. S'il est vrai que les piscines françaises ne sont pas positionnées en hauteur comme le sont les japonaises, elles ne sont pas non plus « bunkérisées », contrairement à ce qui est prévu pour l'EPR, ce qui pose question. Cette question ne se confond pas avec celle du stockage en sub-surface.
Comme il a été fait allusion aux travaux de la commission d'enquête sur les coûts de l'électricité, je me permets de lire la conclusion qui a été adoptée à la majorité par celle-ci sur les déchets radioactifs, comme peut en témoigner Christian Bataille qui était présent :
« [La commission] Regrette de n'avoir pu, dans le calendrier qui était le sien, avoir connaissance des coûts potentiels d'un site d'enfouissement de déchets à Bure. Elle s'interroge sur la persistance d'écarts importants entre les évaluations respectives des différents acteurs et souligne, comme la Cour des comptes, la nécessité d'aboutir rapidement à un coût entériné par les pouvoirs publics. Prend acte de la volonté de l'ANDRA et du Gouvernement, suite au débat public, de conduire une phase pilote préalable d'expérimentation avant toute décision. Rappelle la demande de l'ASN de clarification de l'inventaire et de la nécessité d'évaluation des coûts selon les différents scénarios possibles. Insiste sur le rôle du Parlement dans la définition préalable des conditions de récupérabilité, dans le respect des principes fixés par la loi. Estime que la recherche sur l'entreposage en sub-surface de longue durée devrait être conduite en parallèle. Estime que, comme cela a toujours été le cas concernant les déchets nucléaires, la décision finale devrait revenir au Parlement. Souligne, par ailleurs, l'importance de veiller dans la durée au traitement le plus sécurisé de l'ensemble des matières radioactives présentes sur le territoire, et de leur conditionnement dans le respect des règles fixées par l'ASN. »