Cette attitude n’est pas au niveau du débat que nous attendons. Nous avons posé à plusieurs reprises la question de l’enjeu central, pour nous et pour les Français : celle du prix de l’énergie, celle de la facture énergétique.
Et pour une fois, madame la ministre, nous n’avons pas été déçus. Vous avez même répondu au-delà de nos espérances. J’ai bien noté – et cela sera inscrit au compte rendu des débats –, car nous allons nous donner rendez-vous dans les prochains mois et les prochaines années, que vous avez dit ce soir devant la représentation nationale que la facture énergétique des Français allait baisser.
J’ai bien noté aussi que vous avez dit que le rapport de la CRE prévoyait une augmentation de 30 % des tarifs de l’énergie, mais que grâce à votre projet de loi sur la transition énergétique, l’augmentation ne sera pas de 30 %, mais que les tarifs diminueront. Nous avons tous bien entendu vos propos, madame la ministre. Je veux bien vous faire crédit de cela. Simplement, nous allons nous donner des rendez-vous. Car lorsque vous prenez de tels engagements, à savoir la baisse de la facture énergétique des Français en pleine période de hausse des tarifs des prix de l’énergie, il va falloir les assumer.
Il ne serait ni sérieux ni respectueux des travaux du Parlement que de faire des déclarations à l’emporte-pièce et d’être obligé de les corriger ensuite en expliquant que ce sont des facteurs externes qui ont finalement aggravé le prix de l’énergie.
Honnêtement, j’aurais préféré que vous nous disiez que vous faites un choix, celui de la transition énergétique, que vous voulez réduire la part du nucléaire, que vous assumez le fait que cette réduction entraînera une hausse des prix de l’énergie, et que vous allez essayer de contenir cette hausse en prenant des mesures correctrices.
Le fait de ne pas assumer vos choix est bien pire. Non seulement vous affirmez que vous allez réduire la part du nucléaire dans le mix énergétique, mais qu’en plus, vous allez réduire la facture énergétique des Français. Si vous y réussissez, je vous dirai : bravo, mais j’aimerais que vous m’expliquiez comment vous y arriverez.
Pour ma part, j’aurais préféré entendre un discours de vérité. Je pense que les Français sont mûrs pour l’entendre. Ils en ont assez de la course aux promesses, des objectifs inatteignables qui ne créent que de la frustration. Ils en ont assez d’entendre tout et n’importe quoi. Ce soir, nous aurions aimé vous entendre dire : « J’ai fait un choix, un pari, celui de la transition énergétique. Ce pari aura un coût, un prix. Il aura des conséquences pour les Français, mais nous ferons tout pour le contenir au maximum. »
Vous auriez pu ainsi justifier votre politique par le chèque énergie ou par d’autres dispositions que vous souhaitez prendre pour lutter contre la précarité énergétique. Mais venir nous dire, comme vous le faites ce soir, que la facture énergétique des Français va diminuer, et qu’elle va diminuer grâce à vos choix stratégiques et énergétiques, c’est se moquer du monde et cela manque cruellement de sérieux.
Comme beaucoup de mes collègues, j’aurais préféré, à défaut d’obtenir des chiffres et d’avoir des trajectoires précises, entendre au moins un discours de vérité et vous entendre assumer vos convictions et vos positions. Pour notre part, nous pensons que l’équation qui consiste à réduire la part du nucléaire dans le mix énergétique tout en maintenant ou augmentant le pouvoir d’achat des Français en maîtrisant la facture énergétique est une équation impossible, irréaliste. Tout au contraire, vous allez faire exploser notre modèle social et notre modèle énergétique. Ce n’est pas avec des rustines comme le chèque énergie, ou d’autres, que vous allez corriger cela.
En vous entêtant dans vos choix et en n’assumant pas leurs conséquences politiques, économiques, sociales et environnementales, vous êtes bien loin de la réalité de la transition énergétique française. Plus les Français vont se rendre compte des conséquences de celle-ci, plus ils la rejetteront lorsqu’ils verront la facture énergétique. Après les débats que nous avons eus sur le matraquage fiscal, incessant et impétueux, je ne voudrais pas que les Français viennent nous voir dans nos circonscriptions pour se plaindre que leur facture énergétique a explosé non pour des facteurs externes, mais parce que ce gouvernement a fait des choix stratégiques visant à réduire la part du nucléaire, qui constitue notre dernier avantage comparatif. Je trouverais cela regrettable et c’est pourquoi je souhaiterais que vous assumiez vos positions. À défaut d’être d’accord avec nous, vous en seriez au moins sortis grandis. Aujourd’hui, nous subissons la double peine : d’une part, vous n’assumez pas vos convictions et d’autre part, la facture énergétique augmentera. Mais je vous donne rendez-vous dans les prochains mois et les prochaines années. Seuls les faits nous départageront et seuls les Français jugeront.