Je sais que Mme la ministre s’est fait l’apôtre de la démocratie participative mais j’imagine que vous respectez également la démocratie représentative. Or, nous sommes ici les représentants du peuple. Si une concertation doit avoir lieu, c’est aussi et d’abord avec nous ! Vous dites que le débat a déjà eu lieu, avec tel comité, telle organisation, avec tel groupe de la majorité, mais vous refusez le principal, au sein de l’Assemblée nationale, dans notre hémicycle, avec la représentation nationale.
Pourquoi ? Soit vous voulez éviter de dévoiler au grand jour vos divisions et vos vicissitudes, soit vous voulez éviter d’aborder les vrais sujets. Celui du prix de l’énergie en témoigne. Nous avons essayé de vous démontrer que vous aviez oublié la compétitivité, la dimension européenne, que votre parti pris idéologique en matière nucléaire vous pousse à engager la France dans des choix stratégiques dont les conséquences économiques, sociales et environnementales seront graves.
Le pire, c’est que beaucoup de députés de la majorité, qui sont des gens sérieux, le savent bien et s’en rendent compte. Eux-mêmes s’interrogent quant à l’opportunité et la pertinence d’un tel texte, et ne comprennent pas la pertinence d’un certain nombre de choix stratégiques. Les centrales nucléaires ne sont pas installées uniquement chez les députés de l’opposition. Les députés de l’opposition ne sont pas les seuls à être attachés à la filière nucléaire. Sur l’autel d’un accord qui nous semble aujourd’hui dépassé et passéiste, le risque est grand de faire des choix énergétiques dangereux pour la compétitivité de la France par rapport à l’Allemagne et aux autres pays européens.
Nous risquons de perdre notre dernier avantage comparatif, le coût de l’énergie. J’espère que l’avenir vous donnera raison mais j’en doute quand j’entends dire que vos choix énergétiques permettront de réaliser des économies d’énergie qui conduiront à diminuer la facture énergétique des Français, alors même que la Commission de régulation de l’énergie prévoit que cette facture augmentera de 30 % à l’horizon 2017 – et encore cette prédiction ne tient-elle pas compte de ce texte.
Il est dommage que ces questions centrales n’aient été que peu abordées et que Mme la ministre ne se soit pas davantage investie dans le débat. Nous aurions aimé avoir des réponses, connaître vos convictions. Finalement, nous n’aurons pas pu aborder les vrais sujets mais c’est ainsi et nous devrons en tirer les conséquences. Espérons au moins que ce texte vous servira de leçon quant au recours abusif à la procédure d’urgence et au temps programmé.
Déclarer l’urgence pour un texte qui vise un horizon à 2025 ou 2030 s’apparente plutôt à de la précipitation, laquelle n’est pas bonne conseillère. Elle sert plutôt à masquer un certain nombre de choses, ce qui est bien dommage. Les acteurs de l’énergie attendaient autre chose de ce débat. La transition énergétique aurait dû être beaucoup plus engageante pour nous tous. Je regrette ce simulacre de débat là où nous avions rendez-vous avec les Français, autour de la question centrale de l’indépendance énergétique.
Nous avons construit, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les conditions de notre indépendance alimentaire en bâtissant l’Europe. De la même manière que nous avons créé la Communauté européenne du charbon et de l’acier, nous devons mettre en place cette Communauté européenne de l’énergie. Quand on voit le peu de concertation qui entoure les choix énergétiques des différents pays, la manière dont vous avez abordé ce problème, et dont vous avez refusé d’intégrer la Communauté européenne de l’énergie, je suis convaincu que nous devrions tous ensemble revoir ce texte, au Sénat et en commission. Surtout, nous devons travailler pour remettre enfin la France sur le chemin, non pas de la décroissance durable, mais de la croissance et de l’énergie positive.
Le 13/10/2014 à 16:27, laïc a dit :
"Je sais que Mme la ministre s’est fait l’apôtre de la démocratie participative..." Je me demande ce qui pousse M. Abad à dire cela, je ne crois pas que Mme Royal ait tenté d'organiser la moindre consultation populaire sur le thème du mix énergétique. Moi, personnellement, on ne m'a jamais rien demandé, d'ailleurs j'ignorais même l'expression "mix énergétique" avant de fureter sur les comptes rendus des séances en hémicycle de l'assemblée nationale...
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