Planète Sciences est un petit réseau, puisque nous avons un réseau de délégations régionales, en parallèle avec l'association nationale. Notre association est plus modeste et dédiée à la culture scientifique et technique.
Planète Sciences a cinquante ans d'existence. C'était, au départ, une association de clubs aérospatiaux, qui s'est développée au début des années quatre-vingt, avec l'expansion de la culture scientifique, technique et industrielle (CSTI) dans d'autres thématiques, et qui a mis en place les délégations territoriales, qui comptent aujourd'hui 70 permanents, 150 vacataires et touchent 200 000 jeunes. L'association a mis en place des activités dans différents domaines tels que l'environnement, la robotique et l'astronomie. Nous comptons, dans le cadre de la CSTI, parmi les associations majeures, avec Les Petits Débrouillards et La Main à la pâte. Toutes ces associations ont été créées au milieu des années quatre-vingt, lors de l'expansion de la culture scientifique et technique.
Nous travaillons aussi avec les associations généralistes, comme les Francas et la Ligue de l'enseignement. Il existe de nombreuses associations, qui constituent un milieu extrêmement dispersé. Cela fait sa force, mais aussi sa faiblesse, car il est, de ce fait, assez difficile de parler d'une seule voix. Nous avons eu, ces dernières années, du mal à nous faire entendre.
Comme la plupart des associations, nous n'avons aucun soutien fonctionnel ou structurel. Nous ne fonctionnons que par appels à projets, avec beaucoup de bénévoles. Du coup, le réseau est fragilisé, précarisé, mais cela donne une certaine dynamique aux gens, qui y croient et font preuve de détermination.
Quelle est la situation de notre secteur CSTI depuis 2000 ? J'ai hésité à employer le mot de « difficultés » car elles existent, c'est vrai, mais il n'y a pas que cela : il y a aussi quelques choses positives…
Nous répondons de plus en plus à des appels d'offres et à des appels à projets, ce qui nous fait perdre notre identité, car cela nous transforme en prestataires de services. Cela nous oblige à réfléchir aux moyens de ne pas être soumis aux règles du marché : devoir payer la TVA, se trouver en concurrence avec des sociétés commerciales qui répondent aux mêmes appels d'offres. Cela inhibe l'initiative et les développements propres. Cela épuise le vivier de bénévoles et augmente la charge administrative, et finalement, cela décourage.
Ce qui était vrai avec l'État l'est maintenant avec les collectivités territoriales et cela le devient avec les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) et les grands établissements scientifiques avec lesquels nous travaillons depuis très longtemps.
Concernant la chute des soutiens financiers, il y a d'abord eu l'État, il y a une dizaine d'années, puis les collectivités territoriales, depuis un ou deux ans. Dernièrement, ce sont les avantages en nature qui ont considérablement diminué parce que tout le monde serre les boulons, y compris dans les mairies de proximité. Nous sommes aujourd'hui dans une situation d'extrême difficulté.
Dans le même temps, nous bénéficions de financements complémentaires provenant de l'industrie et des grands EPIC, auprès desquels nous avons un certain écho. Mais cela ne compense pas la perte du budget qui, depuis le palier des années 2004-2005, est de l'ordre de 20 %. Le mécénat des entreprises est trop peu orienté vers la culture scientifique et technique, alors que c'est souvent pour eux un vivier et une façon de préparer les jeunes à la vie professionnelle.
Les emplois jeunes nous avaient énormément aidés. Ils avaient, au début des années 2000, permis une véritable expansion territoriale. Leur suppression nous oblige à recourir à des contrats à durée déterminée (CDD), ce qui fragilise tout notre système en augmentant le turnover et en nous contraignant à former de nouveau entrants. Les emplois tremplins ou les emplois d'avenir, par exemple, sont moins bien adaptés à l'animation scientifique.
Je souligne également la quasi-disparition, depuis 10 ans, de nos séjours de vacances scientifiques, soit au profit de sociétés commerciales qui n'ont pas hésité à nous faire des procès et à nous envoyer l'URSSAF pour récupérer la TVA, soit en raison de la difficulté à trouver des implantations et à payer l'encadrement nécessaire pour faire un travail de qualité. Si j'étends mon propos à l'éducation populaire, il est extrêmement dommageable que notre jeunesse ne puisse pas profiter de ces séjours.
Par ailleurs, il y a de moins en moins de conventions pluriannuelles. Il s'agit maintenant de conventions annuelles, sans garantie de reconduction. C'est un vrai problème, car une convention pluriannuelle apporte plus de sécurité.
Vous parlez d'une baisse du bénévolat. Il est toujours très présent chez nous. Ce sont des jeunes, qui ont souvent été de jeunes adhérents formés chez nous. On constate une légère désaffection, mais il s'agit davantage de gens qui ont envie de venir lors d'opérations événementielles pour se faire plaisir et qui ont plus de difficulté à venir participer à l'administration de nos associations. Globalement, nous avons perdu environ 15 % de nos effectifs dans le réseau. La situation est à peu près similaire dans les autres associations de ce secteur d'activité.
J'en viens aux programmes d'investissement d'avenir qui, au départ, semblent être une perspective exaltante puisqu'ils proposent de financer un projet à hauteur de 50 %, l'association devant réunir le reste des fonds. Mais trois ans après la mise en place du dispositif, je me demande si ce n'est pas une fausse bonne idée. Ces programmes sont en effet conçus pour des industriels ou de grands instituts qui peuvent investir de l'argent. Le suivi et l'administration, très compliqués et très prégnants, ont eu pour conséquence de faire de notre équipe une équipe monoprojet. Car si nous n'allions pas au bout du projet, nous risquions de mettre l'association et le réseau en grande difficulté.
Nous espérons nous en sortir, mais, s'agissant des modalités de financement, je ne suggérerais pas de réitérer l'expérience, sauf à trouver des formules adaptées au milieu associatif. Des sommes considérables étaient disponibles et nous avions proposé la rénovation de nos animations. J'espère que cela nous permettra tout de même de recréer une dynamique. Tout n'est pas mauvais dans ce dispositif, mais quand on est au milieu du gué, dans le cadre d'une opération de ce type, c'est extrêmement lourd, et les milieux associatifs ne sont pas éduqués, formés, pour répondre à la complexité de ces administrations, comme peuvent l'être de grandes entreprises.
S'agissant des temps d'activités périscolaires, nous avons lancé une opération pilote qui nous semble aujourd'hui assez satisfaisante. Toutefois, nos activités demandent plutôt des temps longs, car il est difficile, en moins d'une heure et demie, de déployer du matériel et de commencer à faire faire des expériences à des jeunes. C'est aussi un peu plus cher, ce qui nous met en difficulté par rapport à certaines de nos communes partenaires. Malgré tout, nous allons poursuivre l'expérience et nous orienter vers la formation d'animateurs locaux, ce qui est l'une de nos vocations. Nos associations ne peuvent pas tout faire, mais il faut former des gens à faire les animations, d'autant qu'ils sont sur place, ce qui nous évite d'avoir à déplacer des vacataires pour passer une heure ou une heure et demie dans un coin du département.
En matière de propositions, j'insiste sur la question du soutien aux réseaux, qui sont garants d'actions menées sur un territoire. Nous aimerions avoir partout le même niveau de qualité. Pour ce faire, il faut pouvoir réunir nos équipes, les former et se voir régulièrement. Tout cela coûte cher, et c'est de l'argent qu'on ne trouve pas dans des projets.
Il faut privilégier les appels à initiatives, les projets pluriannuels, et mettre en place des conventions qui permettent une stabilité et une pérennisation des emplois. J'insiste aussi sur la formation des salariés et sur la nécessité d'adapter les procédures des marchés publics pour les petites et moyennes structures, afin d'alléger le travail administratif qui consiste à remplir d'énormes dossiers. Il conviendrait également de privilégier le soutien aux acteurs de terrain, selon certains critères, comme les actions menées, les publics touchés, la qualité des actions. Ce sont là des contreparties légitimes à un soutien structurel.
Enfin, il faut mobiliser le privé et l'industrie. La CSTI profitant directement à l'industrie, il faudrait inciter les fondations à soutenir nos pédagogies et à favoriser le bénévolat interne au profit des associations. L'aide de professionnels permet aux jeunes d'être confrontés à la vie industrielle et à nos animateurs de se former avec des gens qui ont un vécu : ce serait très profitable. Il y a quelques initiatives en la matière, qu'il faut encourager, notamment dans les grandes entreprises.
S'agissant de la culture scientifique et technique, la gouvernance a été lancée il y a quelques années. Mais, aujourd'hui, tout est quasiment bloqué. Nos associations avaient été entendues afin que nous ne soyons pas perdants dans cette affaire. Nous avions l'impression que l'animation de terrain et les gens qui allaient au plus près des jeunes avaient été complètement oubliés dans la gouvernance. On nous a promis que ce ne serait plus le cas, mais les dossiers, comme les décisions, peinent à sortir. Je me permets de signaler cette nouvelle difficulté.