Intervention de Alain Calmette

Réunion du 8 octobre 2014 à 9h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Calmette, rapporteur :

Poursuivant la série de nos propositions, dans une seconde partie, je souhaiterais évoquer les mesures relatives à la solidarité financière.

Les exonérations fiscales et sociales étant insuffisantes pour renforcer l'attractivité des ZRR, et afin de mieux prendre en compte la problématique plus générale de la ruralité, nous sommes favorables à une réorientation des dépenses actuelles en privilégiant une nouvelle logique : un meilleur fléchage des transferts financiers, des aides à l'ingénierie territoriale et une territorialisation du dispositif.

Tout d'abord, il est nécessaire de sanctuariser les dotations pour les communes classées en ZRR à travers le maintien du niveau de la dotation générale de fonctionnement (DGF). La DGF a un effet péréquateur plus marqué que d'autres dotations, alors que ce n'est pas son objectif, en raison de son montant important et de sa structure qui intègre d'anciennes dotations à effet péréquateur. Son effet est défavorable aux communes les plus rurales, car, en 2014, la dotation aux communes de 500 à 1 000 habitants était de 125 euros contre 314 euros pour les villes de plus de 200 000 habitants. C'est pourquoi le maintien de la DGF est si important. Par ailleurs, nous estimons qu'il conviendra de prendre en compte, dans les critères de répartition de l'augmentation de la DSR – annoncée dans le projet de loi de finances pour 2015 –, le classement des collectivités en ZRR, car l'objectif premier de la DSR est bien la péréquation.

Ensuite, il nous semble important d'engager une refonte de la DETR, d'un montant d'environ 600 millions d'euros en 2014, tant en ce qui concerne les bénéficiaires que les autres actions éligibles, et, dans un premier temps, d'ouvrir la DETR au financement de l'ingénierie territoriale, les collectivités territoriales éprouvant des difficultés à trouver les ressources humaines nécessaires à la gestion des appels à projet. Enfin, dans le cadre d'une vision transversale, nous recommandons de réfléchir à l'instauration d'un fonds unique de revitalisation rurale, à gestion déconcentrée au niveau du département, et dont la dotation de départ, afin d'avoir un effet significatif, pourrait s'élever à un milliard d'euros, soit à peine plus que les différents fonds à caractère général (DETR, FBADT) ou sectoriel comme le FISAC.

En ce qui concerne les recommandations liées aux dispositions dérogatoires à mettre en oeuvre dans les ZRR, je souligne la difficulté d'appliquer certaines normes – par exemple celles liées à la sécurité, à l'accessibilité des personnes ou à l'environnement –, qui sont manifestement excessives et irréalisables dans les territoires ruraux.

Quelles sont donc nos propositions dans ce domaine ?

D'une part, autoriser les collectivités locales et les personnes privées relevant des territoires classés en ZRR à mettre en oeuvre des mesures de substitution aux normes réglementaires manifestement excessives, permettant de satisfaire à une obligation de résultats, en particulier en matière d'accessibilité des personnes handicapées. Ces mesures seraient étudiées sous le contrôle du préfet de département.

D'autre part, conduire des investigations juridiques pour recenser les mesures d'adaptation possibles liées aux enjeux écologiques en prenant en compte l'apport des ZRR à la qualité globale de l'environnement. Je citerai à titre d'exemple de mesure pénalisante celui de la construction d'une route en forêt et de la nécessaire compensation pour défrichement forestier, qui s'opère au détriment d'une parcelle agricole limitrophe.

La cinquième série de propositions relatives à l'évaluation et au suivi de la politique menée fait suite au constat de l'insuffisance d'informations sur l'ensemble des mesures relatives aux ZRR et du déficit d'évaluation des montants alloués ou des résultats. Nous préconisons d'améliorer l'information des acteurs concernés, sur les mesures existantes et les résultats obtenus ; de faciliter le retour d'expériences pour détecter les facteurs de blocage et les moyens de les lever ; d'améliorer de manière générale la lisibilité des politiques publiques en faveur des territoires zonés.

L'idée initiale était de s'inspirer de ce qui se pratique en matière de la politique de la ville grâce au rôle de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS) et de créer un observatoire des ZRR qui permettrait d'évaluer et d'assurer le suivi des politiques publiques menées en faveur des ZRR, de manière continue et régulière. Mais il n'est pas obligatoire de créer pour cela une nouvelle structure et il serait envisageable d'intégrer cet observatoire dans une entité existante comme l'Observatoire des territoires, ce qui conduira à confier un rôle primordial au CGET.

La politique en faveur des ZRR est emblématique d'une politique publique « à la française » qui n'a réussi, ni à éviter la superposition des mesures particulières dans une logique de zonage donc une logique de « guichets », ni à susciter, dans certains cas, la responsabilisation des acteurs locaux.

Les douze premières recommandations du rapport sont de deux ordres : certaines sont précises, notamment celles sur le zonage ou la révision des exonérations ; d'autres visent avant tout à ce que les ZRR soient prises en compte de façon spécifique et que les dispositions de portée générale soient adaptées à la spécificité des territoires.

L'interrogation qui demeure est celle-ci : comment concilier une logique de zonage – nécessaire pour disposer d'un dispositif resserré – avec une logique de projet, qui mobiliserait les collectivités dans une approche territoriale et les ministères concernés dans une approche sectorielle ?

Le zonage en ZRR doit donc constituer la clé d'entrée ou la carte de référence des politiques publiques en faveur de la ruralité à mettre en oeuvre. Cela concerne en premier lieu l'État mais aussi les régions, car il nous paraît important que celles-ci aient un rôle dans l'aménagement des territoires infrarégional et prolongent le dispositif en appliquant des politiques différenciées selon leurs propres objectifs.

Ce sera notre treizième et dernière proposition.

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