Je tiens à vous remercier d'avoir convié l'AFM-Téléthon à cette audition sur les difficultés du monde associatif, sujet particulièrement prégnant dans le contexte de crise. J'ai bien sûr une pensée pour les petites et moyennes associations dont les difficultés sont ô combien plus importantes que la mienne. Je tenais à le souligner car, depuis plus de vingt-cinq ans, le Téléthon est organisé grâce à l'élan de générosité publique – qui représente une centaine de millions d'euros, soit environ 80 % de nos ressources –, mais aussi grâce à l'engagement de milliers d'associations locales présentent sur le territoire.
Chaque année, le Téléthon mobilise 5 millions de Français dans les rues, dont 1 million font un don, et 200 000 bénévoles nous aident à organiser cette magnifique opération de générosité publique au début du mois de décembre. Par ailleurs, tout au long de l'année, nous avons la responsabilité directe ou indirecte d'environ 1 000 salariés.
Je développerai quatre thèmes.
Le premier est le financement public. Je suis tout à fait solidaire des propos tenus devant votre commission sur les difficultés engendrées par la raréfaction de l'argent public, néanmoins je ne développerai pas ce point. En effet, pour la « maison » que je représente, la générosité des donateurs se substitue au financement public.
Notre première mission sociale consiste à mettre au point des traitements pour les malades. Dans ce cadre, nous finançons nos propres laboratoires – fédérés au sein de l'Institut des biothérapies des maladies rares –, mais aussi des unités de recherche d'organismes publics français – INSERM, CNRS, AP-HP, etc. Ainsi, l'argent du donateur finance une partie de la recherche en se substituant au financement public.
Notre seconde mission sociale est la prise en charge et l'accompagnement des malades dans l'attente de la découverte d'un traitement. Notre établissement situé près d'Angers, unique en France, accueille une cinquantaine de patients en situation d'extrême dépendance, auxquels sont prodigués des soins renforcés nécessaires à la qualité et à la sécurité de leur vie. Ce type de soins n'entrant pas dans le cadre des mécanismes de tarification actuels, l'AFM-Téléthon, grâce à la générosité exceptionnelle des Français, complète le budget de cet établissement pour un montant de l'ordre de 1 million d'euros par an.
Le deuxième thème a trait au développement du financement privé. À l'appui de mon propos, je vais évoquer les deux piliers fondamentaux de notre association.
Le premier pilier est l'innovation : innovation scientifique pour les médicaments, les biothérapies ; innovation sociale en lien avec le regard de la société sur les personnes en situation de handicap. Inscrite dans nos gènes, cette innovation doit être préservée pour faciliter le développement du financement privé. La mission parlementaire confiée à l'un de vos collègues sur la simplification du monde associatif y contribuera probablement.
Le second pilier est l'intérêt général. Si depuis tant d'années les Français continuent à nous soutenir avec une telle générosité, c'est parce qu'ils ont bien compris que nous menons des actions d'intérêt général. Il me semble particulièrement important de préserver cette garantie de l'intérêt général dans le cadre du développement du financement privé des actions du monde associatif. À cet égard, le rapport sur le développement du financement privé, remis par le Haut conseil à la vie associative au précédent gouvernement, nous semble intéressant, notamment sur le volet mécénat.
Au-delà du financement, l'un des enjeux du monde associatif est le développement de l'emploi. Je veux ici pointer deux difficultés.
La première est relative à la taxe sur les salaires. Ainsi, sous prétexte que les associations ne sont pas soumises aux impôts commerciaux, notamment la taxe à la valeur ajoutée, nous subissons une double peine : la taxe sur les salaires – dont le poids est considérable pour des structures comme les nôtres – et la non-récupération de la TVA sur nos dépenses soumises à TVA. Certes, un abattement a été voté récemment pour la taxe sur les salaires, mais uniquement pour les plus petites associations.
Seconde difficulté – qui me fait dire que nous subissons en réalité une triple peine – : les associations ne bénéficient pas du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).
Je tenais à souligner ce thème, car l'emploi est primordial pour nos associations et, plus encore, pour l'ensemble du tissu social en France.
Le quatrième thème important à nos yeux réside dans l'évaluation des actions associatives. Il y a une vingtaine d'années, le monde associatif français s'est attaché à améliorer la transparence financière de ses activités, laquelle, grâce notamment aux contrôles des commissaires aux comptes ou d'organismes tels le Comité de la charte du don en confiance, est aujourd'hui de niveau comparable à celle observée à l'étranger. Par contre, l'AFM-Téléthon plaide pour une meilleure évaluation a posteriori des actions du monde associatif français, idéalement sous l'égide de la puissance publique, ce qui favoriserait du même coup la nécessaire professionnalisation des salariés et des bénévoles, domaine dans lequel notre pays accuse un retard par rapport à certains pays étrangers.
En conclusion, l'important à mes yeux est la création d'un cercle vertueux entre financements, emplois, évaluation et professionnalisation des pratiques.