Ce projet de loi de finances pour 2015, accompagné de ce projet de loi de programmation des finances publiques, est en effet une étape que je pense décisive dans la mise en oeuvre des engagements qui ont été pris devant vous au printemps. Nous nous sommes engagés sur des mesures en faveur de la croissance et de l’emploi et, dans ce budget, nous les mettons en oeuvre.
Nous nous sommes engagés sur des mesures de maîtrise des dépenses et, dans ce budget, nous honorons cet engagement. La situation est certes plus difficile, en France comme en Europe, mais nous avons un cap et nous devons ne pas en dévier. Qu’il s’agisse d’économies de dépenses, de baisses de prélèvements sur les entreprises ou de baisses d’impôts sur les ménages, tout ce qui vous a été annoncé au printemps figure aujourd’hui dans ce texte. Tout ce sur quoi nous nous sommes engagés est aujourd’hui confirmé ou concrétisé.
Pourtant, la conjoncture ne nous y aide pas. Notre zone monétaire, la zone euro, traverse, vous le savez, une période de croissance faible, trop faible alors même qu’elle n’a toujours pas retrouvé globalement le niveau d’activité qu’elle connaissait avant la crise il y a six ans. L’inflation a atteint ses plus bas niveaux historiques – plus 0,3 % en septembre pour la zone euro – et ne retrouvera qu’à l’horizon de 2017 sa cible proche de 2 %.
Les décisions sans précédent prises par la Banque centrale européenne nous y aideront, c’est indéniable. Mais son président Mario Draghi a reconnu lui-même que la politique monétaire ne peut pas tout ou pas tout de suite. Cette situation pèse sur la capacité de nos économies à résorber leurs déséquilibres et sur celle de nos États, mais également des acteurs économiques – ménages et entreprises – à se désendetter.
Les derniers indicateurs ne sont pas bons, y compris chez nos partenaires qui jusqu’ici étaient les moteurs de la zone euro. En Allemagne en particulier alors que l’activité a déjà reculé de 0,2 % au deuxième trimestre, l’indice de production industrielle qui vient de paraître s’est replié de 4 % en août et les exportations de 5,8 %.
L’Italie rencontre de très grandes difficultés et devrait connaître en 2014 sa troisième année successive de récession. L’Espagne, dont l’économie avait heureusement redémarré – je dis « heureusement » car son niveau d’activité est encore inférieur de 6 % à celui de 2008 –, s’interroge et exprime des inquiétudes pour les mois à venir. Je le sais pour m’être entretenu aujourd’hui avec le ministre des finances espagnol.
Face à cette situation dans la zone euro plus difficile que prévu, il y a néanmoins des facteurs d’optimisme qui peuvent nous aider. Je pense notamment à la dépréciation de l’euro depuis quelques mois et à la baisse continue du prix du pétrole, ce qui va dans le bon sens.
Le contexte a donc évolué depuis le printemps et continue d’évoluer. La principale question qui se pose à nous aujourd’hui, celle à laquelle nous devons répondre, c’est l’adaptation de nos politiques économiques à ce contexte. Il ne s’agit plus d’apporter une réponse immédiate à une crise financière. L’enjeu aujourd’hui est de retrouver rapidement plus de croissance pour plus d’emploi. Nous devons éviter le scénario de l’enlisement dans une période de faible croissance et de faible inflation qui ferait peser des risques de déflation en cas de nouveau choc d’ampleur et qui, en augmentant durablement notre chômage structurel, pourrait peser sur notre potentiel de croissance.
Quelle est alors la voie ? Mario Draghi l’a dit et ne le cesse de le répéter : dans un contexte comme celui-ci, il vaut mieux faire trop que trop peu. J’en suis moi aussi convaincu.
Quatre leviers d’action doivent être actionnés par les autorités publiques. Face au risque d’une inflation durablement très faible, la politique monétaire doit rester accommodante et continuer à soutenir l’activité. Le rythme de consolidation budgétaire, autrement dit de réduction des déficits publics, doit être adapté face à une faiblesse de la demande qui pèse sur la croissance et l’inflation…