Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, chers collègues, vous me permettrez de faire enfin entendre une voix dissonante.
Une fois encore le projet de loi de finances ne traduit qu’une préoccupation : la baisse de la dépense publique !
Qu’importe si celle-ci se fait au détriment des ménages et des collectivités territoriales.
Qu’importe si elle porte préjudice aux services publics.
Qu’importe si elle porte atteinte à l’emploi.
Le dogme de la réduction de la dépense publique semble s’être imprimé dans l’ADN de notre gouvernement.
Il faudrait baisser la dépense publique parce que le poids de la dette nous écrase et il faudrait relancer l’économie par une distribution sans précédent d’argent public aux entreprises, sans contreparties et sans contrôle.
Telle fut l’unique perspective de ces trente mois d’action gouvernementale, pour un résultat nul en matière de lutte contre le chômage et de croissance et au prix d’une succession des revers électoraux.
On ne cesse de rendre les Français, les élus de la République et les collectivités territoriales responsables de la dette publique, alors qu’une de ses principales causes est l’enrichissement des banques et de leurs actionnaires.
En effet, pour une dette qui dépasse aujourd’hui 2 000 milliards, les banques ont encaissé depuis 1973 et la loi Pompidou-Rothschild 1 600 milliards d’euros d’intérêts. Ces chiffres devraient suffire à faire réfléchir notre assemblée.
Ce projet de loi de finances porte en lui ce que nous regrettons depuis des mois : il tend à faire payer aux ménages et aux collectivités territoriales la facture des cadeaux faits aux entreprises.
Permettez-moi, dans cette discussion générale, de m’arrêter sur la question des collectivités territoriales : 3,67 milliards d’euros de baisse des dotations dès 2015, 11 milliards d’euros d’ici 2017. Après la suppression de la taxe professionnelle en 2010 par Nicolas Sarkozy et l’instauration d’une contribution économique territoriale sur laquelle les collectivités n’ont qu’une marge de manoeuvre réduite, apparaît maintenant une série de baisses de dotations, dont 1,5 milliard cette année, et de ponctions nouvelles pour les collectivités.
S’ajoute à cela une réforme des collectivités territoriales illisible, incomprise et impossible à mettre en oeuvre d’ailleurs : je pense en particulier aux métropoles. Tout cela démontre comment, lorsque l’organisation de la République est abordée à travers le seul prisme comptable, l’échec est souvent – pour ne pas dire toujours – au rendez-vous.
En même temps, les communes, toujours aux avant-postes, se retrouvent à financer une mesure pour le moins contestée – je parle évidemment de la mise en oeuvre des rythmes scolaires – d’autant que le fonds d’amorçage doit disparaître du droit commun pour l’année scolaire 2015-2016.
Quand on étrangle les collectivités territoriales, c’est le service public local qui est étranglé, c’est la capacité des collectivités territoriales, notamment des communes, à agir comme correctrices des inégalités ; c’est l’accès au sport, à la culture, au logement, aux loisirs, aux structures d’enfance et de petite enfance qui perd du terrain. Au-delà, c’est l’ensemble de l’économie qui est affecté par ce choix court-termiste et contre-productif de réduction drastique de la DGF.
Moins de moyens pour les collectivités, c’est moins d’emploi public et privé, c’est moins d’appels d’offres avec un effet boomerang terrible pour les artisans, TPE, PME, qui en sont souvent les premiers bénéficiaires. Quelle contradiction !
Et je vois ce matin – sans doute un pur hasard – qu’est publié un rapport de la Cour des comptes sur les collectivités territoriales. Dans cette véritable profession de foi libérale, on parle de comptabilité et non de politique publique locale ; la masse salariale, les dépenses de fonctionnement, les ratios se substituent à la vraie vie qui sonne en ces mots : « inégalités, service public, écoles, démocratie, insertion, solidarité… », bref à la vraie vie des Français.
Ce chemin qui nous est proposé, et que détaille avec zèle la Cour des comptes, ressemble à celui de l’Allemagne où, à force de désinvestissement local, il devient impossible de trouver une place en crèche et où, pour des raisons économiques et structurelles, les Allemands en sont réduits à placer les personnes âgées, leurs parents, dans des maisons de retraites en Slovaquie ou en Pologne…
Pour notre part, au groupe GDR, nous abordons la lecture de ce texte en proposant un chemin inverse, qui consiste à dégager des moyens pour les services publics, pour les collectivités territoriales avec, par exemple, la mise en place d’une taxe sur les transactions financières dont la finalité serait d’abonder la contribution économique territoriale. Cela suppose de dépasser le dogme libéral de la réduction forcenée de la dépense publique et en nous donnant les moyens d’une autre politique qui passera forcément par une réforme fiscale de grande ampleur, maintes fois annoncée et jamais concrétisée.
Les amendements que nous défendons vont dans ce sens, sur le seul chemin d’une politique de gauche ambitieuse qui donne un véritable souffle à la France et aux Français.