Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, le budget pour 2015 reflète l’échec de la politique menée par ce Gouvernement.
Échec, car ce Gouvernement est incapable de respecter ses prévisions. Il a une nouvelle fois revu à la baisse ses objectifs de déficits publics pour les années 2014 à 2017.
Le déficit public est prévu à 4,3 % du PIB en 2015 et le retour à l’équilibre est reporté à 2019. Les écarts par rapport à la loi de programmation des finances publiques votée il y a deux ans à peine sont, eux, considérables : moins 4,3 % du PIB de déficits publics en 2013 au lieu de moins 3 % ; moins 4,4 % de déficits publics en 2014 en lieu et place de moins 2,2 % du PIB.
Échec, parce que ce budget est marqué par le non endiguement des déficits. Le déficit continue de déraper avec 3 milliards de plus que prévu dans la loi de finances rectificative de juillet. Trois milliards de déficit supplémentaire, c’est colossal !
Échec, car ce Gouvernement s’était engagé à se conformer aux règles de discipline budgétaire de la zone euro, c’est-à-dire à ramener son déficit public à 3 % du PIB dès 2015. Or, cet objectif est reporté à 2017. Le Gouvernement ne tient donc pas sa promesse.
Pire encore, la Commission européenne pourrait émettre un avis réservé sur le projet de budget pour 2015 et demander qu’il soit modifié afin de respecter les engagements en matière de réduction des déficits. Le président de l’Eurogroupe a d’ailleurs plaidé ce lundi pour que la France modifie sa copie avant de la rendre mercredi à la Commission.
Devrons-nous subir la même humiliation que l’Autriche, qui a été obligée de modifier sa loi de finances au nom de la discipline budgétaire collective sous la menace d’une sanction équivalent à 0,2 % du PIB ?
Échec aussi car les dépenses publiques sont en hausse d’un point par rapport à 2012. En 2014, elles représentent 57,7 % du PIB, soit environ 1 200 milliards. Elles ont atteint leur niveau record depuis plus de cinquante ans. Cette situation rend impossible toute diminution de nos déficits publics et, par conséquent, de notre dette.
Échec encore car, pour la première fois, la dette publique française franchit la barre des 2 000 milliards d’euros. Rapportée à la richesse nationale elle s’élève à 95,1 % du PIB. Désormais c’est une dette dépassant les 100 % du PIB qui se profile.
Les mesures proposées dans ce projet de loi de finances 2015 relèvent du trompe l’oeil.
La preuve : la suppression de la première tranche d’imposition sur le revenu, celle qui s’applique à la fraction des revenus comprise entre 6 011 et 11 991 euros par part. Neuf millions de ménages seront donc moins imposés. Toutefois, pour compenser la suppression de la première tranche, vous avez choisi d’abaisser de 11 991 à 9 690 euros le seuil de la tranche d’imposition à 14 %. Dans les faits, cela signifie que, pour les ménages modestes, une très légère augmentation de revenu se traduira par une augmentation significative de l’impôt, le phénomène étant manifestement voué à s’amplifier en 2016 sur l’imposition des revenus de 2015.
Depuis 2012, le rendement de l’IRPP a en gros progressé de 10 milliards. À travers ce budget, vous proposez aujourd’hui de diminuer ses recettes de 3,2 milliards en supprimant la tranche à 5,5 %.
Par ailleurs, on nous annonce une augmentation nette de 600 millions d’euros des recettes de l’impôt sur le revenu.
Donc, compte tenu des 3,2 milliards d’euros – coût de la suppression de la première tranche – la fiscalité des ménages progressera en fait de 3,8 milliards d’euros en 2015.
De plus, cette suppression est contrebalancée par de nouvelles hausses d’impôts : alourdissement de la fiscalité sur le diesel, montée en puissance de la taxe carbone, relèvement des cotisations retraite, hausse de la contribution au service public de l’électricité, augmentation de la redevance télé. La liste est longue et non exhaustive.
Pour résumer, monsieur le ministre, la suppression de la première tranche d’imposition sur le revenu aura un double effet : renforcer l’hyper-concentration de l’impôt sur le revenu ; faire porter davantage l’effort fiscal sur les classes moyennes – ce que vous refusez de voir.
Monsieur le ministre, à travers ce budget, vous demandez aux contribuables, aux entreprises, aux collectivités territoriales, aux chambres consulaires de la rigueur et des efforts alors que l’État est incapable de s’appliquer de telles contraintes car aucune réforme structurelle efficiente n’a été engagée.
Ce n’est pas aux Français de payer le prix de vos erreurs ou de votre négligence.
En conclusion, je ne peux évidemment soutenir ce budget qui souffre d’impréparation, d’absence d’anticipation, d’iniquité et d’irréalisme.