Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, chers collègues, « Personne ne devrait être surpris que l’Europe retombe dans le marasme. C’est le résultat entièrement prévisible des politiques erronées que les dirigeants européens s’entêtent à poursuivre, bien qu’il soit évident que ce sont des mauvais remèdes. » Cette phrase n’est pas de moi, elle est tirée de l’éditorial du New York Times du 17 août. Elle résume le diagnostic que l’on peut porter sur ces trois années de politiques européennes qui ont enfoncé l’ensemble de l’Europe dans la dépression.
Ces politiques erronées sont un cocktail de politiques économiques faites de coupes massives dans les dépenses publiques, de baisses du coût du travail, et, dans les pays d’Europe du Sud, de baisses des salaires. Ce sont des politiques qui, quand on les applique seul peuvent produire des résultats. Si vous êtes le seul à réduire les dépenses publiques, vous redresserez les finances publiques, car la croissance des autres vous permettra de dégager des recettes et, par conséquent, de réduire votre déficit. Mais lorsque tout le monde le fait, il se passe ce qui s’est passé en Europe : l’effet dépressif est tellement fort, le multiplicateur, comme nous le rappelle le FMI, est tellement élevé, que l’on perd en croissance, donc en recettes, ce que l’on croit avoir gagné sur les dépenses.
C’est la même chose pour les politiques d’ajustement du coût du travail. Si vous êtes le seul à mener une telle politique, vous améliorez votre compétitivité, mais en compliquant la vie de votre voisin. Lorsque tout le monde le fait, les effets « compétitivité » à l’intérieur de l’Europe s’effacent – il en reste à l’extérieur – et les prix baissent. C’est la déflation. Lorsque l’on mélange ce cocktail, on arrive à la situation européenne : une dépression, une récession forte. Il n’y a plus de croissance, et plus d’inflation.
J’ai beaucoup entendu citer M. Schröder. Je ne suis pas un admirateur de l’ancien chancelier, mais je rappelle qu’il a mené une politique de redressement de la compétitivité allemande quand les autres pays ne le faisaient pas, de 2002 à 2004. Durant cette période, il n’a pas réduit les dépenses, il a laissé le déficit se creuser. Ce n’est qu’après, et heureusement pour l’Allemagne, avant la crise, que le déficit a été réduit. On ne peut pas répliquer à l’échelle européenne des politiques qui peuvent avoir une efficacité lorsqu’on est seul à les conduire.