Le drame, c’est que ce qu’a produit l’Europe, dans cette période qui ressemble étrangement, et de façon inquiétante, aux déflations des années trente, c’est la négation même de ce qu’elle a été. Quand l’Europe a intégré des pays comme le Portugal ou l’Espagne, on redoutait que les salaires ne baissent dans les autres pays. Cela ne s’est jamais produit parce que la solidarité a joué et que les fonds structurels ont fonctionné. Tous les pays ont été tirés vers le haut. C’est la première fois de l’histoire depuis, malheureusement, les déflations des années trente, que l’Europe fait le contraire de ce qu’elle a fait durant un demi-siècle et procède à un ajustement par le bas.
Il faut mener une réflexion profonde sur la situation européenne. Je salue le fait que le Gouvernement porte ce discours, notamment depuis l’entretien que le Président de la République a accordé au journal Le Monde au mois d’août, dans lequel il explique que le problème de demande au sein de l’Europe est la conséquence des politiques d’austérité qui ont été conduites. Il est essentiel d’inverser les politiques européennes et de retrouver un peu de solidarité. Ce sera la meilleure façon de renouer avec la croissance.
Un mot sur la situation nationale. Là aussi, le discours a changé : le Gouvernement va moins vite dans la réduction des déficits. C’est évidemment ce que doivent faire les autres pays européens. Nous n’avons pas à nous excuser vis-à-vis de l’Europe. Si quelqu’un doit présenter ses excuses, c’est bien la Commission européenne, qui a plongé l’ensemble de l’Europe dans une récession qui n’a qu’un seul précédent dans l’histoire.
Si nous voulons sortir de cette récession, il nous faut ajuster notre politique économique. Je n’ai pas le temps de développer, mais je pense que si l’on consentait moins d’allégements et que l’on réduisait moins les dépenses, notre politique serait plus équilibrée. En revenant à l’objectif essentiel d’inversion de la courbe du chômage que portait le Président de la République, en agissant massivement sur les emplois aidés, nous parviendrions à sortir de la récession, car lorsque vous créez un emploi d’avenir, vous donnez de la confiance et du revenu, deux choses qui manquent à notre économie.
Un dernier point, soulevé par Michel Sapin dans son intervention : l’investissement est le pont entre le présent et le futur. Oui, l’investissement relance la demande à court terme et l’offre à long terme.
Ne nous trompons pas d’époque ! La modernité, ça n’est pas ajuster notre idéal de solidarité à une mondialisation libérale qui a échoué – la crise de 2008, c’est l’explosion des inégalités, la crise européenne, ce sont les égoïsmes nationaux. Nous devons réaffirmer ce que nous sommes, à gauche. Le principe de solidarité, que nous portons depuis toujours, voilà la vraie réponse à la crise !