Notre collègue Jean-Pierre Allossery ne pouvant malheureusement pas être parmi nous aujourd'hui, je lui ai proposé de le suppléer pour vous présenter son avis budgétaire sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
La jeunesse, vous le savez, est l'une des priorités du quinquennat de François Hollande. L'engagement associatif a, quant à lui, été déclaré « Grande cause nationale » pour l'année 2014. Au confluent de ces deux thèmes, le rapporteur a choisi de consacrer la partie thématique de son avis à l'engagement des jeunes, qui est essentiel non seulement à la formation de ces futurs citoyens mais également à la vitalité du tissu associatif. Jean-Pierre Allossery a souhaité dans ce rapport mieux comprendre l'engagement citoyen des jeunes pour mieux l'accompagner.
Contrairement à certaines idées reçues, l'engagement citoyen des jeunes est extrêmement dynamique. Loin d'être apathique, la jeunesse de notre pays s'engage sous de nombreuses formes, qu'il s'agisse d'aider de façon informelle les personnes de son quartier, de participer à des conseils municipaux de jeunes ou encore d'être bénévole au sein d'une association. Ainsi, en 2013, la France comptait 3,3 millions de jeunes bénévoles.
Sur ce point particulier, le rapport de Jean-Pierre Allossery montre que les motivations des jeunes sont en pleine mutation. Ils recherchent désormais, au travers de leur engagement associatif, à réaliser des actions concrètes, à l'efficacité palpable. Ayant une certaine prudence à l'égard de débats qui nous concernent plus directement, ils n'adhèrent plus forcément comme avant aux valeurs ou à l'identité d'une association en tant que telle. Peut-être ont-ils moins d'ambition quand il s'agit de changer le monde : ils souhaitent s'engager de façon plus concrète et plus pragmatique, en apportant leur aide aux associations de façon souvent plus ponctuelle.
L'engagement associatif des jeunes est par ailleurs marqué par d'importantes inégalités liées notamment à l'origine sociale : ceux qui s'engagent aujourd'hui sont surtout ceux qui ont les moyens de le faire, ceux qui n'ont pas besoin d'exercer une activité rémunérée en parallèle de leurs études, par exemple. La place des parents et de l'école comme prescripteurs d'engagement est essentielle mais ne doit pas être la seule clé pour accéder à l'engagement.
Il n'y a pas, à proprement parler, de crise du bénévolat des jeunes. Ceux-ci s'engagent dans la vie associative à peu près autant que les autres tranches d'âge, ce qui, compte tenu de leurs nombreuses contraintes – d'emploi du temps, de réussite scolaire ou de mobilité – est le signe d'une vraie volonté et d'une vraie vitalité.
Mais il est vrai que le bénévolat des jeunes a changé. D'ailleurs, certaines associations ont commencé à s'adapter à ces nouvelles formes d'engagement, en s'emparant des possibilités offertes par les technologies de l'information et de la communication, en adaptant les missions qu'elles proposent aux contraintes des jeunes, ou en leur permettant de prendre une part active à la vie de l'association.
L'État comme les collectivités territoriales conduisent, dans ce domaine, des politiques très volontaristes, de même que l'Union européenne avec le programme « Erasmus + ». Aujourd'hui, le dispositif public de soutien et de développement de l'engagement citoyen des jeunes repose essentiellement sur le service civique qui, bien que récent, connaît un véritable succès auprès des jeunes comme des associations.
Le Président de la République a souhaité que 100 000 jeunes puissent bénéficier de ce dispositif à l'horizon 2017. Cette montée en charge très ambitieuse, à laquelle chacun de nous est nécessairement sensible, soulève toutefois la question de son financement. Au-delà des financements européens issus de l'Initiative pour l'emploi des jeunes (IEJ), le Gouvernement a annoncé 100 millions d'euros supplémentaires sur la période 2015-2017. Il ne semble pas que cela soit suffisant pour atteindre l'objectif fixé.
Le rapporteur pour avis a étudié tant les propositions de la Cour des comptes que celles de M. François Chérèque, président de l'Agence du service civique, pour tenter de remédier à cette situation. Il n'est favorable ni à une diminution de la durée du volontariat, qui est aujourd'hui de 7,2 mois en moyenne, ni à une modulation de l'indemnité en fonction du temps hebdomadaire de volontariat, qui peut varier de 24 heures à 48 heures. En revanche, il semble nécessaire de faire participer d'autres ministères au financement du service civique, car les politiques publiques qu'ils conduisent tirent profit de l'action des volontaires. Si de nouvelles sources de financement pérennes ne sont pas dégagées au cours de deux prochaines années, une réflexion devra nécessairement s'engager sur le montant de l'indemnité servie aux jeunes volontaires et les modalités de l'aide au tutorat versée aux associations.
Sur le fond, le rapporteur souhaite que le service civique soit davantage orienté vers les jeunes ayant moins d'opportunités (JAMO), afin de remédier à l'autocensure qui les empêche souvent de participer à ce type de dispositif. Par ailleurs, les droits reconnus aux volontaires, par exemple en matière de logement, doivent être appliqués de la même façon sur l'ensemble du territoire et les avantages octroyés par certaines collectivités à leurs volontaires – en matière de transport, d'accès à la culture, de prime de volontariat – doivent, autant que possible, être harmonisés, afin que chaque volontaire bénéficie d'un statut similaire. Il s'agit de faire vivre la belle promesse républicaine de l'égalité entre tous les volontaires.
Au-delà du seul service civique, le rapport de Jean-Pierre Allossery montre à quel point l'engagement est un atout majeur tant pour les jeunes, qui s'épanouissent et acquièrent des compétences par ce biais, que pour la cohésion sociale et la société dans son ensemble. L'engagement associatif est une bonne habitude qui ne se perd pas : le bénévole d'aujourd'hui est aussi le bénévole ou le donateur de demain. Il est donc indispensable, pour la vitalité de ce tissu associatif si important en France, d'encourager autant que possible les jeunes en créant des parcours d'engagement progressifs, cohérents, reconnus et lisibles.
Le rapporteur pour avis formule, sur ce point, plusieurs propositions. Il appelle, d'une part, à assurer une plus grande porosité entre le milieu associatif et le milieu éducatif car les cloisonnements sont souvent trop importants. À l'école, l'aménagement des rythmes éducatifs (ARE) devrait y contribuer grandement ; au collège, on pourrait imaginer qu'un stage en association soit une condition d'obtention du brevet ; au lycée, il faut donner une impulsion réelle à la semaine de l'engagement ; à l'université, il faut aménager les parcours afin que les jeunes puissent prendre une année de césure, et les encourager, par l'octroi des crédits universitaires, à s'engager dans un projet associatif
Il faut aussi leur proposer un véritable statut, que le jeune soit volontaire du service civique ou simplement bénévole. Tous les jeunes ne peuvent pas bénéficier du service civique ; pour autant, tous ceux qui s'engagent de façon citoyenne doivent avoir les mêmes avantages, qu'il s'agisse de transport, d'accès au sport ou à la culture. Enfin, il faut s'assurer que la validation des acquis de l'expérience (VAE) leur soit rendue plus simple et plus accessible.
C'est donc un rapport à la fois riche et concret que le rapporteur a souhaité ouvrir à la discussion. Je ferai de mon mieux pour répondre à vos questions, notre collègue Jean-Pierre Allossery m'ayant toutefois fait savoir qu'il sera à votre disposition pour y répondre ultérieurement.