Madame Dumas, vous parliez des petites associations. Je partage votre souci : sur le territoire, la cohésion sociale se « tricote » petit à petit. On a besoin d'associations de proximité pour mettre les personnes en lien les unes avec les autres. Or les petites associations d'aide sociale, qui vivent de petites subventions, sont aujourd'hui en difficulté.
Je le constate moi aussi. J'essaie d'aider quelques associations nationales avec les crédits de subventions dont je peux disposer à la DGCS ; malheureusement, ceux-ci ont baissé dans la mesure où les dépenses obligatoires ont augmenté. Les départements se trouvent dans la même situation vis-à-vis des petites associations locales. Il s'agit généralement d'associations d'insertion et de centres sociaux. C'est un vrai problème et je me demande s'il ne faudrait pas essayer de sanctuariser une partie des crédits de l'action sociale au profit de l'action sociale de terrain. Car si cette dernière ne pouvait pas être mise en place, nous y perdrions beaucoup.
J'en viens aux associations qui oeuvrent dans le champ de l'enfance. J'imagine que vous visiez les associations qui font, notamment, de l'aide aux devoirs. Car les contrôles existent dans les centres de loisirs sans hébergement et, plus généralement, à chaque fois qu'il y a prise en charge de mineurs. Cela ne relève pas de ma direction, mais de la DJEPVA – la direction de la Jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative. En revanche, ce sont les mêmes services territoriaux, les DRJSCS (directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale) et DDCS (directions départementales de la cohésion sociale) qui établissent ces contrôles dès qu'il y a accueil de mineurs.
Les seuls cas où il n'y a pas de contrôle a priori c'est lorsqu'il y a échange de prestations et de services sans accueil : soutien scolaire, cours, etc. Il est en effet difficile d'interdire l'initiative privée. Cela dit, en cas de problème, la réactivité doit être forte. Par exemple, le 119 est le numéro d'appel d'urgence qu'il faut composer dès que l'on a connaissance d'un risque ou d'un problème de maltraitance sur des enfants. Au-delà, il est vrai qu'on est un peu démuni…
Mme Fabre m'a interrogée sur les associations qui répondaient aux appels à projets des collectivités locales. Je crois que les DLA, qui sont destinés à soutenir les associations sur le terrain, sont à même de les aider dans leurs démarches. Cela dit, un besoin de simplification s'impose.
C'est bien à ce besoin de simplification que répond l'article 62 de la loi sur l'économie sociale et solidaire en permettant Gouvernement, de prendre par ordonnance des mesures visant, entre autres, à simplifier les démarches des associations. M. Yves Blein, député du Rhône, membre du Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire et rapporteur du projet de loi, a été nommé en mai 2014 parlementaire en mission pour préparer des ordonnances de simplification. Nous sommes donc en train d'y travailler avec lui.
Il existe déjà des systèmes de demandes de subventions en ligne, et je pense que les nouvelles technologies permettront de limiter le nombre de formulaires. Mais l'administration a besoin que les associations nous disent quelles procédures sont les plus complexes. On ne s'en aperçoit pas forcément depuis nos bureaux parisiens. M. le député Blein, au cours de sa mission, rencontrera sans doute beaucoup d'associations et fera des propositions de simplification que nous regarderons évidemment avec grande attention.
Madame Le Callennec, vous avez évoqué les appels à projets qui devraient plutôt être des « appels à idées ». Cela me semble extrêmement important. C'est pourquoi nous menons une bataille de tous les instants en ce sens. Les services de l'État, des départements et des ARS peuvent avoir tendance à définir à l'avance la réponse, parce que cela leur facilitera le dépouillement. Nous consultons régulièrement les appels à projets, qui doivent tous être mis en ligne (sur le site des ARS ou de la CNSA) et nous essayons de promouvoir les meilleurs, ceux qui définissent clairement le besoin mais laissent ouverte la réponse.
Vous m'avez par ailleurs demandé s'il y avait des différences de tarifs d'un territoire à l'autre. Bien sûr, ces différences existent. Nous essayons de développer des projets à moyen terme – car les réformes de tarification ne se font pas immédiatement – et d'assurer la transparence des tarifs et des pratiques – ce qui peut se faire beaucoup plus rapidement –, pour que chacun puisse se comparer aux autres. Nous y travaillons avec l'ensemble des ARS, qui tarifient le médico-social, et avec les services de l'État.
Nous travaillons beaucoup avec l'ensemble des services – y compris dans les départements – à des guides méthodologiques afin d'harmoniser les pratiques. C'est une autre façon de procéder, différente des circulaires qui étaient jusqu'à présent le mode de travail classique de l'administration. Il s'agit, par ce biais, de promouvoir et de diffuser les pratiques les plus intéressantes sur l'ensemble du territoire.
Il est ensuite évident qu'il faut développer le « CV citoyen » pour encourager le bénévolat. Mais c'est là une question de société : d'autres pays, notamment anglo-saxons, valorisent les étudiants qui ont eu des engagements associatifs, alors que ce c'est pas le cas de la France. Dans notre pays, les employeurs n'apprécient pas toujours qu'entre la fin des études et la recherche d'un premier emploi, on ait eu un engagement citoyen. Je crois que nous avons un vrai changement de paradigme à opérer.
Il faut également moderniser les conventions collectives de 1966 et de 1951, notamment en privilégiant, au cours de la carrière, la mobilité et l'acquisition de compétences ; jusqu'à présent, c'est l'ancienneté qui prime. On a bien tenté de faire évoluer la convention de 1951, mais les négociations sociales se sont avérées d'autant plus compliquées que nous ne sommes pas dans une période dans laquelle il y aurait « du grain à moudre ». Il est donc difficile de modifier les choses et de valoriser la mobilité ou l'expérience. Quoi qu'il en soit, nous essayons de travailler avec les partenaires sociaux sur ces conventions collectives, qui sont en effet un peu lourdes.
Enfin, monsieur le président, vous avez posé une question sur les entreprises associatives qui, à l'origine, pouvaient n'être que de petites associations comme celles créées par des parents qui s'intéressent à un handicap parce que leur enfant en est atteint.
Les entreprises associatives peuvent demeurer des associations, dans la mesure où des présidents acceptent de prendre le relais. Or il est parfois difficile de trouver des administrateurs et des présidents.
Si les associations n'arrivent pas à se développer avec un conseil d'administration bénévole mais souhaitent rester dans le monde de l'économie sociale et solidaire, elles peuvent aller vers un statut coopératif : elles se transforment en SCIC, c'est-à-dire en société coopérative d'intérêt collectif ; cette possibilité figure dans la loi sur l'économie sociale et solidaire. Bien sûr, ce n'est pas le but, mais c'est un moyen de sortir de l'impasse.
Dernier cas de figure : le regroupement entre associations ou la fusion. Cela ne peut se faire qu'à partir de la volonté des associations, et sur des projets associatifs qui se complètent et s'harmonisent. Cela ne peut donc, en aucun cas, résulter d'un ukase de la puissance publique. J'observe que certaines associations sont entrées dans des démarches de regroupement qui ont été fructueuses, et qui leur ont permis de ne pas quitter le mouvement associatif.
Et puis, monsieur le président, votre commission d'enquête offrira peut-être de nouvelles perspectives aux associations, qui seront encouragées à le rester.