Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 15 octobre 2014 à 16h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Alain Vidalies, secrétaire d'état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

J'apporterai une réponse générale aux questions portant sur le financement de l'AFITF.

Il conviendra de réfléchir à froid aux raisons de l'échec de l'écotaxe et du péage de transit poids lourds. Mme Martine Lignières-Cassou s'est interrogée sur la nature de cette taxe : elle a raison. Dès l'origine, le système ne pouvait qu'engendrer des difficultés, la loi garantissant la répercussion de la taxe des transporteurs sur les chargeurs – une innovation singulière puisque le législateur s'immisçait dans les rapports contractuels, ce qui a provoqué des dérapages regrettables alors que l'objectif initial était largement partagé.

Cet échec est également dû à la méthode retenue : le contrat Ecomouv' impliquait des charges de fonctionnement très importantes, et sans doute aurait-il fallu réfléchir à deux fois avant de confier le prélèvement d'une taxe à une entreprise privée, ce qui constituait une première en France.

Ce projet a engendré incompréhensions et affrontements, y compris lorsque le Gouvernement a décidé de suspendre le péage de transit poids lourds dans sa forme actuelle et de mettre en place un groupe de travail, que je réunirai demain jeudi et dont l'objectif est très clair : trouver une nouvelle formule de financement des infrastructures par les poids lourds. L'objectif initial de l'écotaxe demeure inchangé.

Vous avez évoqué différentes pistes, notamment la création d'une vignette. Aucune proposition ne sera a priori exclue du débat qui s'ouvrira demain. Le groupe de travail évoquera aussi les autres questions auxquelles est confronté le secteur des transports, notamment en matière de droit social.

Nos objectifs en matière de pérennisation du financement de l'AFITF sont clairs. Outre la recette en provenance de l'augmentation de 2 centimes sur le litre de gazole assumée par les véhicules légers, les négociations devront déterminer une recette pérenne. Il est hors de question pour le Gouvernement de renoncer à ce principe, qui du reste n'a jamais fait débat, même chez les transporteurs. C'est aux modalités de son application que le Gouvernement a renoncé, en raison du blocage dont elles ont fait l'objet.

Chacun reconnaîtra plus tard que notre décision de suspendre la taxe était la bonne, car elle nous permet de sortir d'un système contesté pour aller vers un système accepté par tous, qui assurera le financement pérenne de l'AFITF. Je ne saurais évidemment vous annoncer les choix qui résulteront de la discussion avec les transporteurs.

M. Philippe Duron a évoqué le projet de loi pour l'activité et l'égalité des chances économiques, qui a fait l'objet d'une communication du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique devant le conseil des ministres de ce matin. Ce projet contient une proposition visant à libérer le secteur des autocars, la France accusant un retard en la matière. Les autocars – M. Jean-Jacques Cottel les a également évoqués – sont, pour un grand nombre de nos concitoyens, le seul moyen de transport accessible du point de vue financier. Il faudra veiller à ce que cette libéralisation ne pose pas de problème aux collectivités locales.

La mise en oeuvre du dossier de l'autoroute ferroviaire atlantique soulève quelques contestations au plan local, dont il est toujours possible de débattre. Nous attendons l'avis de l'Autorité de la concurrence à la suite de celui, défavorable, de l'ARAF. Ces avis complémentaires pourront faire l'objet, le moment venu, d'un débat sur le modèle – l'objectif, quant à lui, est clair. Le Gouvernement souhaite prendre une décision définitive. Je rappelle que les avis de l'enquête publique et de la Commission européenne sont favorables.

M. Martial Saddier a abordé le contrat Ecomouv' : une phase d'expertise et d'analyse juridique précise a succédé à la suspension du contrat. Les décisions, qui sont liées à la négociation en cours, seront prises assez rapidement. Nous devrons évidemment payer le prix d'une éventuelle résiliation du contrat par le Gouvernement. C'est pourquoi celui-ci s'emploie actuellement à le chiffrer. Les chiffres parus dans la presse sont un maximum ; il n'y aura aucune surprise en la matière.

S'agissant du plan de relance autoroutier, la réponse officielle de la Commission européenne sera connue le 29 octobre.

M. Yannick Favennec s'est interrogé sur la pérennisation du financement de l'AFITF. Le Gouvernement souhaite s'engager sur un financement pérenne et consensuel. Tel est mon objectif. Les semaines à venir devraient permettre de préciser le dispositif, qui pourra évidemment évoluer. Les recettes devront couvrir des périodes assez longues, compte tenu de la nature des travaux à réaliser.

L'engagement de l'Europe sur le canal Seine-Nord Europe et le Lyon-Turin est, comme l'a rappelé M. Rémi Pauvros, une opportunité qu'il ne faut pas laisser passer. L'Europe a fait un travail très positif en la matière puisque les corridors sont définis et que ces opérations bénéficient d'interlocuteurs et de fonds européens – les critères généralement avancés pour les projets européens permettent d'espérer 40 % de subventions pour ces deux opérations, ce qui rendrait possible leur réalisation, qui est jugée importante pour la construction européenne.

M. Olivier Falorni et Mme Suzanne Tallard se préoccupent de l'autoroute A831. La lettre du Premier ministre date du 1er août ; nous en sommes donc toujours à l'étude des solutions alternatives et du contournement de Marans ainsi que des mesures supplémentaires pour une meilleure insertion dans le milieu. Lorsque cette phase sera terminée, le Gouvernement fera connaître sa position.

Je partage vos interrogations, monsieur Olivier Falorni, sur l'origine des difficultés que rencontrent aujourd'hui les mytiliculteurs. Vous avez rappelé les réponses apportées par le Gouvernement, notamment au titre des cotisations sociales. Mon cabinet recevra les professionnels pour étudier le dossier au fond. La différence entre ce qui est attendu et ce qui sera versé sera, comme toujours, importante mais l'État a déjà consenti un effort de solidarité en direction de cette profession en difficulté. J'ignore s'il pourra aller plus loin. Il reste en tout cas attentif, aux côtés des parlementaires, à la situation de cette profession.

Monsieur Gabriel Serville, vous m'avez interrogé sur le désenclavement intérieur de la Guyane. Le futur contrat de plan État-région prévoit pour la Guyane une intervention à plus de 110 millions d'opérations au total, pour lesquelles l'État interviendra de manière importante. Il s'agira d'améliorer considérablement les conditions de circulation sur la RN1 et la RN2.

S'agissant de l'aérien, j'ai regretté, comme vous, les grèves des personnels de l'avitaillement, mais aussi des pompiers, qui affectent régulièrement les aéroports des Antilles-Guyanne. L'État a dû trop souvent avoir recours à la réquisition des agents pour assurer la continuité du service public.

Les dessertes aériennes intérieures à la Guyane sont aujourd'hui organisées par le conseil régional et aidées par l'État via une convention d'obligation de service public. Sur les lignes de Cayenne, les aides versées se sont élevées à 5,474 millions d'euros en 2013, dont 1,676 million à la charge de l'État. Je suis tout à fait favorable à votre proposition de poursuivre le travail sur le sujet.

Monsieur Jean-Louis Bricout, vous savez qu'il avait été demandé au conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) d'expertiser la RN2 en vue d'identifier les priorités d'aménagement en Picardie et Nord-Pas-de-Calais. Cette expertise a conclu que les premières priorités en Picardie se situent au sud de l'A26. Les financements prévus au CPER seront cohérents avec cette expertise et concerneront notamment les déviations de Gondreville, de Vaumoise, de Villers-Cotterêts et de Péroy-les-Gombries. Une discussion est en cours sur les choix à effectuer dans le cadre du mandat de négociation.

Le chalutage en eau profonde, sur lequel Mmes Laurence Abeille et Geneviève Gaillard m'ont interrogé, sera abordé au niveau européen au début du mois de novembre. Vous connaissez la procédure et l'état du dossier. Le Parlement européen a pris une décision équilibrée. Le Gouvernement est attentif à la fois à la nécessité de maîtriser ce mode de pêche et aux conséquences économiques des mesures qui pourraient être prises en la matière. Mme Ségolène Royal et moi-même avons effectué une démarche commune auprès de Bruxelles. C'est une question de développement durable et de protection des milieux qui se pose au plan européen. Rien ne serait pire que d'adopter des législations différentes, car il faut, en la matière, éviter toute compétition entre les différents pays.

La position du Gouvernement sur Notre-Dame-des-Landes est claire : il considère, comme l'a déjà souligné le Premier ministre, que la réalisation de ce nouvel aéroport est justifiée mais que les travaux ne sauraient débuter avant que tous les recours aient été jugés – à ce jour cinquante-deux sur plus d'une soixantaine ont été rejetés.

La liaison A75-Brioude devrait bénéficier, dans le CPER, d'un engagement de l'État. Il en sera de même de l'achèvement du contournement du Puy-en-Velay. La réponse de l'État pour la Haute-Loire me paraît à la hauteur des enjeux.

Madame Sylviane Allaux, je ne saurais être en désaccord avec le texte de loi s'agissant de la CMAF, d'autant qu'il n'y a pas d'enjeu en termes d'emplois ou de proximité de service : d'une part, tous les personnels conserveront leur emploi ; d'autre part, il n'existe aucune obligation pour les marins de s'y affilier, et 70 % d'entre eux sont d'ailleurs déjà affiliés à une caisse proche de leur territoire. La décision qui a été prise me paraît la bonne au regard de la rationalisation de la gestion : elle ne saurait donc être remise en cause.

L'exonération du versement transport (VT) relève du PLF pour 2015 : celui-ci ne fait que revenir sur un amendement à la loi de finances rectificative adoptée en juin 2014, qui élargissait le champ de l'exonération du VT à toutes les associations et diminuait, de ce fait, le financement du transport urbain. Il s'agit aujourd'hui de revenir aux dispositions antérieures à juin 2014, qui prévoient d'exonérer les associations reconnues d'utilité publique poursuivant un but non lucratif et dont les activités présentent un caractère social – celui-ci relève d'une jurisprudence précise.

MM. François-Michel Lambert et Jean-Yves Caullet ont évoqué le schéma directeur national de la logistique : j'ai déjà été sensibilisé à cette question et souhaite poursuivre le travail en ce sens.

L'axe Lyon-Turin fait l'objet d'un débat parmi vous : je tiens à rappeler qu'il s'agit d'un très grand projet sur le long terme, dont l'objectif est d'assurer un report modal massif. Il en est de même du canal Seine-Nord Europe. Il est difficile de créer du report modal dans le cadre de petits projets, surtout lorsque les contraintes géographiques sont importantes. Les régions et les pays sont favorables à ce projet. Les résistances du côté italien ont porté non sur le principe de la réalisation mais sur ses conséquences environnementales. Je ne peux que vous rappeler l'engagement du Président de la République et du Gouvernement de présenter un dossier commun avec l'Italie, avant le mois de février, afin d'obtenir un financement européen.

Monsieur François-Michel Lambert, la directive Bussereau prévoyait, après un accident survenu en Haute-Savoie, l'interdiction de rouvrir une ligne comportant des passages à niveau pour des raisons de sécurité. Elle a été adaptée afin de permettre le maintien de certains passages à niveau sous réserve du respect de critères de dangerosité – trafic du train et des voitures, visibilité. Je suis prêt à regarder de nouveau la question si, effectivement, cette directive provoque les difficultés que vous avez évoquées.

Je regarderai de près le problème de la SANEF, évoqué par M. Patrice Carvalho. Si les faits qu'il rapporte le justifient, je pourrai intervenir. Je lui répondrai directement.

S'agissant des sociétés gestionnaires des autoroutes, sujet sur lequel je serai auditionné par la mission d'information, chacun connaît l'avis de l'Autorité de la concurrence et le rapport de la Cour des comptes. Ce débat n'est pas sans effet sur celui du péage de transit poids lourds et du financement des infrastructures. C'est pourquoi le Premier ministre a pris l'initiative de rencontrer les sociétés d'autoroute, invoquant un objectif gagnant-gagnant, qui ne peut reposer que sur l'avis de l'Autorité de la concurrence et le rapport de la Cour des comptes. Je ne saurais vous donner une réponse plus précise ce soir, les négociations étant en cours.

S'agissant des conclusions de la commission Mobilité 21 évoquées par M. Michel Heinrich, je le répète, le Gouvernement souhaite trouver des ressources pérennes pour les mettre en oeuvre.

Madame Chantal Berthelot, vous m'avez interrogé sur les radars maritimes : un préfet a été nommé sur le sujet pour les Antilles. Le périmètre de son action pourra être utilement étendu à la Guyane. Il existe, du reste, un programme de renforcement de la VHF en Guyane structurant pour la navigation maritime dans ces zones. Toutefois, les questions évoquées étant interministérielles, le secrétariat général à la mer en assurera évidemment la coordination – il prouvera ainsi son utilité.

Je connais, par ailleurs, votre investissement dans la gestion du trait de côte, qui n'est pas sans poser des questions d'ordre structurel. L'engagement de cette démarche permet d'en mesurer l'enjeu : elle concerne l'ensemble des Français.

Le mandat de négociation relatif aux infrastructures routières en Guyane prévoit un total d'investissement de plus de 100 millions d'euros, avec des opérations sur la RN1 et la RN2. Il prévoit également la construction de nouveaux ponts pour plusieurs dizaines de millions d'euros. La négociation est en cours.

Madame Suzanne Tallard, le dossier du parc naturel marin sur l'estuaire de la Gironde et les Pertuis charentais est régulièrement suivi par Mme Ségolène Royal, qui a rencontré les acteurs. C'est un espace d'une grande importance pour la préservation des dernières populations d'esturgeons en Europe notamment. L'objectif est de contribuer à apporter des solutions aux enjeux de l'économie conchylicole actuellement en grande difficulté. S'agissant de la gouvernance du parc, il est envisagé de créer au sein du conseil de gestion des comités géographiques, qui pourront être autant d'enceintes de dialogue et de travail ainsi que, le cas échéant, de prise de décisions. Les services de l'État établissent actuellement les modalités de consultation des collectivités et des parties prenantes de manière coordonnée entre les différents départements concernés. La signature du décret de création du parc pourrait ensuite être rapide.

Monsieur Jacques Alain Bénisti, vous avez anticipé le débat budgétaire. Il existe, c'est vrai, un effet de ciseau entre la demande d'insonorisation et les ressources disponibles. La première a brutalement augmenté du fait de l'annonce par le gouvernement précédent d'un financement à 100 % limité à deux ans – annonce qui a mobilisé les riverains –, tandis que les secondes ont été réduites sur certains aéroports.

Comme vous l'avez noté, il convient de baisser la TNSA de certains aéroports pour augmenter celle des aéroports parisiens où les besoins sont élevés. J'ai proposé au Premier ministre de procéder à ces ajustements, y compris avec un taux zéro pour Strasbourg. Ces dispositions seront inscrites dans le PLFR pour 2015. Je prendrai les arrêtés d'application dès qu'elles auront été adoptées. Il convient d'améliorer le système, qui fonctionne actuellement comme un guichet, mais dans lequel le montant de la recette liée au trafic aérien est indépendant des flux de demandes. C'est pourquoi nous ferons une circulaire visant à établir des priorités et à en programmer les dépenses en concertation avec les commissions consultatives locales. La solution la plus efficace pour résorber les files d'attente serait d'obtenir une avance sur les ressources futures de la TNSA. Cette possibilité existe déjà dans la loi pour les collectivités locales qui le souhaitent. Nous réfléchissons à élargir cette possibilité aux exploitants d'aéroport.

L'Agence des participations de l'État (APE), qui gère l'appel d'offres, est très attentive à l'ouverture du capital de la société aéroportuaire de Toulouse-Blagnac. La société Airbus ne l'est pas moins ; elle est en relation régulière avec mes services. Les conséquences de la décision doivent être maîtrisées, les acteurs y veillent sur le terrain.

La compétitivité du transport aérien fait partie de la mission qui a été confiée à M. Bruno Le Roux. La situation des compagnies est difficile, tous les acteurs de l'aérien doivent en être conscients. Nous devons garantir la compétitivité des compagnies confrontées au développement des vols à bas coût et aux initiatives prises par des compagnies du Moyen-Orient. C'est dans cet esprit que je mènerai mon action en la matière.

Monsieur Yves Albarello, je vous répondrai par écrit sur la question très précise que vous avez posée à propos de l'accueil des déblais des tunnels.

S'agissant du Grand Paris Express et des questions d'attractivité, de nombreux projets sont déjà en cours de réalisation à Orly et Roissy-Charles-de-Gaulle. Vous avez envisagé, à juste titre, une modification législative sur le tréfonds : une disposition inscrite dans la loi relative à la transition énergétique permettra de prendre une ordonnance visant à accélérer les travaux.

Le Premier ministre s'est exprimé sur la SNCM. Le débat aura lieu dans les prochains jours. Il devra tenir compte de l'histoire de la compagnie et de sa situation financière et juridique. Dans cette affaire, personne ne pourra s'affranchir ni des contraintes financières ni des contraintes européennes qui pèsent sur nous et qui sont considérables. Il conviendra de se montrer à la fois respectueux des décisions prises par les actionnaires et attentif aux situations humaines. Ce dossier d'une très grande complexité doit entrer dans une phase de décision.

M. Laurent Furst m'a interrogé sur la dimension européenne de l'écotaxe : puisse-t-il être entendu ! Je joins ma voix à la sienne. Malheureusement, nous ne sommes pas dans l'Europe telle que nous la rêvons, sinon nos concitoyens y croiraient davantage.

Une réponse a été apportée lors des questions au Gouvernement sur l'aéroport Bâle-Mulhouse.

Monsieur Rémi Pauvros, s'agissant des TET, je vous confirme la prolongation de la convention et la création d'une mission.

Madame Françoise Dubois, je ne saurais apporter la réponse à votre question avant la tenue de la réunion, demain, avec les transporteurs. Le relevé des conclusions que Mme Ségolène Royal et les transporteurs ont signé, prend acte, non seulement de la suspension de la taxe de transit poids lourds, mais également du fait que le groupe de travail se penchera sur les problèmes de la profession et sur sa participation au financement des infrastructures. Tel est le cahier des charges du groupe de travail.

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