Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du 21 octobre 2014 à 15h00
Questions au gouvernement — Explications de vote communes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

…ou le renoncement, qui placera inévitablement la France sous une forme de contrôle de Bruxelles et surtout des marchés financiers.

En effet, mes chers collègues, tous les indicateurs sont au rouge. La croissance, malgré l’optimisme gouvernemental, reste extrêmement faible.

En 2013, comme en 2012, elle n’a pas dépassé 0,3 % ; en 2014, le Gouvernement l’a réévaluée à 0,4 %, au maximum. Et pour 2015, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous prévoyez à présent une croissance de 1 %, ce que le Haut conseil des finances publiques lui-même juge toujours optimiste car cela supposerait « un redémarrage rapide et durable de l’activité que n’annoncent pas les derniers indicateurs conjoncturels ».

Le Gouvernement persiste – il n’est pas le premier – dans un optimisme excessif en continuant d’afficher des taux de croissance encore trop élevés par rapport à la réalité. Peut-être cette attitude s’explique-t-elle par la nécessité de ne pas afficher une nouvelle croissance des déficits publics en 2015 !

En outre, les résultats sont tout aussi inquiétants pour ce qui concerne tant les déficits publics que le non-respect de nos engagements européens.

Le candidat Hollande promettait de ramener le déficit public sous la barre des 3 % du produit intérieur brut en 2013. Il a aujourd’hui renoncé à cet objectif. Après sa révision à 3,7 % du PIB, le déficit a finalement dérapé à 4,1 % en 2013. Et en 2014, il repart à la hausse puisqu’il atteindra, d’après vos prévisions, 4,4 % !

Enfin, en 2015, il excédera les 4,4 % de 2014 car les moins-values fiscales liées à une moindre croissance dépasseront largement les 2 milliards d’euros. Le Gouvernement a donc décidé, en fait, d’abandonner toute réduction importante du déficit, et cela sans consultation préalable de nos partenaires européens.

Au fond, mes chers collègues, Martine Aubry a déjà gagné, qui pense que la réduction des déficits n’est plus la priorité !

Quant aux économies dont vous prétendez qu’elles vont atteindre en 2015 21 milliards d’euros sur l’ensemble des administrations publiques, je n’en ai trouvé que 7,4 milliards c’est-à-dire le tiers !

Une approche analytique de ce projet de loi de finances permet de constater que le budget de l’État réalisera à peine 1 milliard d’euros d’économie, sur les 5,4 milliards d’euros annoncés.

Sur le budget de l’Union européenne, il n’y a pas d’économie mais une dépense supplémentaire de 800 millions d’euros.

Quant aux dépenses des opérateurs de l’État, hors taxes affectées, elles passent de 21,3 milliards d’euros en 2014 à 21,3 milliards d’euros en 2015. Où sont les économies ?

Sur le bloc des collectivités territoriales, les économies espérées sont de l’ordre de 2 milliards d’euros au maximum, loin des 3,7 milliards annoncés, qui concernent les recettes – puisque l’État réduit ses dotations de 3,7 milliards d’euros – et non les dépenses des collectivités territoriales.

Concernant les 10 milliards d’euros d’économies de la Sécurité sociale, seuls 2,8 ou 2,9 milliards sont réels.

Faisons la synthèse de tout cela. Nous arrivons à 6,1 milliards d’économies réelles, et 7,4 si nous ajoutons la branche chômage et les régimes complémentaires vieillesse qui sont gérés par les partenaires sociaux et non par le Gouvernement, soit à peu près 1,3 milliard d’euros. Mais 7,4 milliards sur 21, ce n’est que le tiers ! Il manque donc 14 milliards. Et où sont-ils ? Nulle part !

D’ailleurs, mes chers collègues, la part des dépenses publiques, y compris les crédits d’impôts remboursables, qui sont à présent considérés comme des dépenses dans la nomenclature européenne, est en augmentation. Il n’y a donc pas de réduction du poids des dépenses publiques dans la richesse nationale.

Enfin, mes chers collègues, sans des réformes structurelles, le redressement de la France est impossible ! En refusant de les engager, vous condamnez le pays au marasme économique et au déclin pendant encore deux ans et demi.

Avec ce projet de loi de finances pour 2015, vous faites le choix du renoncement : vous renoncez aux objectifs fixés dans un cadre européen en termes de déficit, vous renoncez à tout faire pour favoriser le retour de la croissance, vous renoncez à inverser la courbe du chômage, vous renoncez à baisser la dépense publique dans la justice, vous renoncez, enfin, à rétablir la confiance.

Vous renoncez également aux six grandes réformes structurelles indispensables au redressement du pays : une vraie réforme de l’État et des collectivités territoriales, une réforme de la protection sociale et de la santé, la rénovation de la démocratie sociale, la transition écologique et la valorisation de la ressource humaine de la nation.

Une autre voie est possible, mes chers collègues. Nous vous demandons solennellement de faire ce choix du courage, en revenant sur les erreurs commises depuis le début de ce quinquennat et en engageant sans tarder les six réformes structurelles que tous, sur ces bancs, savent nécessaires.

C’est pour toutes ces raisons que les députés du groupe UDI voteront contre le projet de loi de finances pour 2015.

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