Intervention de Marisol Touraine

Séance en hémicycle du 21 octobre 2014 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 — Présentation

Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes :

Et elle est juste, puisqu’elle consacre des droits nouveaux, comme la prise en compte de la pénibilité, et renforce les solidarités, avec la revalorisation, effective depuis le 1er octobre, de l’allocation de solidarité aux personnes âgées à 800 euros, ainsi que le versement d’une prime exceptionnelle de 40 euros aux retraités qui perçoivent moins de 1 200 euros de pension globale.

Réforme efficace et juste, également, de notre système de santé : ce n’est pas en réduisant sa qualité ou en rabotant la prise en charge par l’assurance maladie que nous réaliserons des économies durables ; c’est en le transformant pour qu’il réponde mieux aux besoins et aux attentes des Français et des professionnels de santé.

Tel est le sens du projet de loi de santé que j’ai présenté la semaine dernière en Conseil des ministres. Ce texte contient des réformes structurantes visant à permettre à tous de continuer à accéder à des soins de qualité et à favoriser l’innovation, tout en maîtrisant nos dépenses – car ce n’est pas contradictoire.

Le présent projet de loi de financement de la Sécurité sociale s’inscrit dans la même perspective, avec la même volonté structurante ; il s’articule autour de quatre axes forts, qui sont autant de priorités.

D’abord, la pertinence des soins. Prescrire les bons soins aux patients et leur éviter d’avoir à répéter inutilement analyses et consultations est un enjeu de santé publique. C’est pourquoi le texte vous propose de doter les agences régionales de santé d’une palette graduée d’outils afin de pouvoir modifier le comportement d’établissements ciblés en raison de problèmes de non-pertinence dans leurs pratiques ou leurs prescriptions.

La deuxième priorité est de maîtriser les dépenses de médicaments. Adapter les prix, les diminuer, mais pas de manière uniforme : voilà la ligne que nous tenons. Nous continuerons, j’y insiste, à soutenir l’innovation, mais en faisant baisser les prix des médicaments qui ne présentent pas d’amélioration du service médical rendu.

Nous devons poursuivre sans relâche l’effort en faveur des médicaments génériques, en incitant les médecins, en ville comme à l’hôpital, à les prescrire et en renforçant la confiance du public à leur égard. Je présenterai prochainement de façon plus détaillée les actions que j’entends mener dans ce domaine, à travers un plan pour les génériques.

Par ailleurs – et ceci est un point particulièrement sensible –, face à la progression exceptionnelle des dépenses de traitement de l’hépatite C, je vous propose d’adopter des mesures fortes de refonte de la régulation des dépenses de produits de santé.

Je veux avant tout rappeler que les traitements de l’hépatite C constituent une nouvelle formidable pour la santé publique, car ils apportent à un grand nombre de malades une amélioration réelle, et significative, de leur état de santé. Notre système de santé permet un large accès des patients aux bienfaits de l’innovation thérapeutique, et nous pouvons en être fiers : c’est une des « marques de fabrique » du système français. Mais nous devons être cohérents : si nous souhaitons préserver à la fois cette excellence et cette accessibilité, il nous faut réformer notre système de santé et nous donner les moyens de réagir à la situation présente.

Le défi financier que représente pour l’assurance maladie l’innovation, en l’espèce celle pour le traitement de l’hépatite C, est en effet redoutable. C’est pourquoi je propose la création dès 2014 d’un mécanisme de régulation pour les médicaments destinés au traitement de cette affection, visant à faire supporter aux laboratoires concernés un dépassement éventuel de l’enveloppe consacrée à ce traitement.

Troisième axe du projet de loi : rechercher l’efficience de la dépense hospitalière. Nous souhaitons amplifier les actions en ce sens en permettant la mutualisation des achats hospitaliers. Le projet de loi relatif à la santé, en créant les groupements hospitaliers de territoire, donnera aux hôpitaux des outils nouveaux pour ce faire. Votre rapporteur pour l’assurance maladie, M. Olivier Véran, a déposé un amendement sur le sujet, qui montre bien que nous faisons le pari d’une transformation de l’organisation territoriale des soins hospitaliers afin de permettre aux hôpitaux de mieux répondre aux exigences auxquelles ils sont confrontés. Nous définissons aussi – et je sais que c’est un sujet sensible pour l’ensemble des parlementaires – un mode de financement adapté aux hôpitaux de proximité, pour permettre à ceux-ci de jouer un rôle important de coordination entre ville, hôpital et secteur médico-social.

Enfin, quatrième orientation, j’engage un « virage ambulatoire » de notre système de soins ; il s’agit d’améliorer la prise en charge de nos concitoyens tout en maîtrisant les dépenses. Cette question sera au coeur des débats que nous aurons à l’occasion de l’examen du projet de loi de santé, mais nous devons d’ores et déjà inscrire ce fil conducteur dans les dispositions financières que je vous propose d’adopter. Le choix du premier recours se traduit d’abord, très concrètement, par la fixation, pour la deuxième année consécutive, à 2,2 % du taux de progression de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie – l’ONDAM – des soins de ville, soit un taux plus élevé que celui de l’ONDAM des établissements de santé. Difficile, dans ces conditions, de soutenir que les soins de ville sont désavantagés !

Nous poursuivons la démarche du pacte territoire santé, avec des mesures favorables à l’installation des médecins en zone sous-dense. En 2013, nous avions instauré la prise en charge du congé maternité pour les médecins généralistes s’engageant à s’installer durablement dans ces zones ; ce dispositif incitatif ayant fait ses preuves, nous allons l’étendre à des médecins spécialistes. Nous allons également créer une aide pour tenir compte des difficultés spécifiques de l’activité des médecins en zone isolée, notamment en montagne.

Au-delà de ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale, j’ai demandé aux directeurs généraux des agences régionales de santé de se mobiliser pour organiser et favoriser le virage ambulatoire dans leurs territoires. À ce titre, 19 millions d’euros d’aides sont prévues, dans le cadre du fonds de modernisation des établissements de santé, afin d’accompagner les projets de développement de la chirurgie ambulatoire, qui est l’une des orientations fortes que nous comptons soutenir dans les années à venir.

Les patients devant bien évidemment, tout comme les établissements, être accompagnés, votre rapporteur pour l’assurance maladie a déposé un amendement tendant à créer un cadre d’expérimentation pour des hôtels hospitaliers, destinés à l’ambulatoire.

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