Intervention de Laurence Rossignol

Séance en hémicycle du 21 octobre 2014 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 — Présentation

Laurence Rossignol, secrétaire d’état chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie :

La politique familiale ne se résume pas aux allocations versées par la branche famille, car elle forme un tout cohérent et interdépendant, qui doit être appréhendé dans son ensemble. On ne peut pas la résumer aux seules prestations familiales.

Elle comprend aussi des aides fiscales, des dépenses des collectivités, des dépenses d’éducation, notamment pour ouvrir l’école maternelle aux enfants de moins de trois ans, ainsi que les crédits de l’aide sociale à l’enfance.

L’ensemble de ces dispositifs avoisine 120 milliards d’euros par an : c’est ce que la collectivité publique consacre à l’accueil et à l’éducation des enfants.

L’action sociale y joue un rôle important pour offrir des solutions concrètes, au plus près des familles, qu’il s’agisse du soutien à la parentalité, du développement des activités extrascolaires et périscolaires ou de la création de places d’accueil pour les jeunes enfants. C’est d’ailleurs cette complémentarité qui confère à la politique familiale française son excellence.

Je voulais, pour ma part, attirer votre attention sur le fait que les mesures qui vont être largement débattues, cette semaine, dans votre hémicycle sont assorties d’un plan de développement des places d’accueil pour la petite enfance.

Et je rappelle que le budget de la CNAF consacré à l’action sociale continuera d’augmenter au rythme annuel moyen de 7,5 %, ce qui ne saurait être en aucun cas assimilé, vous en conviendrez, à une quelconque austérité.

C’est une décision forte que nous avons prise lorsque nous avons signé la convention d’objectifs et de gestion – COG – 2013-2017 avec la CNAF.

Le Gouvernement tient, aujourd’hui plus que jamais, à réaffirmer son objectif d’offrir, d’ici à 2017, 275 000 places d’accueil supplémentaires : 100 000 dans les crèches, 100 000 auprès des assistantes maternelles et 75 000 à l’école maternelle. Cet objectif nous conduira, en seulement cinq ans, à augmenter de 20 % le nombre de places d’accueil disponibles.

Le Gouvernement a reçu, le 9 octobre, les conclusions du Haut conseil de la famille – HCF – sur le développement de l’accueil des jeunes enfants. Le HCF a montré que les objectifs 2013 n’ont été atteints qu’à hauteur de 54 %. Il fournit plusieurs éléments d’explication : 2013 a été à la fois la première année d’application de la COG et l’année précédant les élections municipales. Or l’expérience passée montre que ces deux facteurs se traduisent toujours par des moindres créations de places.

Nous n’en avons pas, pour autant, déduit qu’il suffisait d’attendre tranquillement que les objectifs se réalisent d’eux-mêmes.

C’est pourquoi le Gouvernement a, immédiatement, choisi d’accélérer l’effort. Nous sommes d’ailleurs bien conscients que le développement des places d’accueil est une des conditions de réussite du partage plus équilibré du congé parental que nous portons.

Une aide exceptionnelle de 2 000 euros doit donc être débloquée pour chaque nouvelle place de crèche dont la création sera décidée en 2015. C’est une mesure simple, lisible, et qui va dans le sens de ce que souhaitent les maires. Le Gouvernement va donc, dans les prochains jours, proposer au conseil d’administration de la CNAF d’adopter cette recommandation du HCF.

Pour relancer les créations de places, une aide exceptionnelle ne suffira cependant pas. Je souhaite que nous traitions le sujet dans sa globalité : nous allons donc lancer, dès maintenant, un chantier de simplification pour alléger les normes qui encadrent la construction de places de crèches.

Un groupe de travail, comprenant des représentants de l’Association des maires de France – AMF – et de la CNAF, rendra des conclusions avant la fin de l’année. Par ailleurs, une expertise sur les causes de l’augmentation des coûts de construction des places de crèches va être lancée dans les tout prochains jours avec la CNAF.

Toujours en vue d’offrir davantage de solutions aux parents, nous souhaitons aussi, avec Marisol Touraine, porter un plan global de développement des places auprès des assistants maternels, car on ne peut pas opposer les modes de garde les uns aux autres. On ne dit pas assez que les assistants maternels sont des professionnels formés, qui offrent à 900 000 enfants un accueil adapté au rythme de vie et de travail de leurs parents. Ils apportent à ces enfants, de plus, une première expérience de la sociabilisation.

Le paradoxe de la persistance d’un manque global de places et d’un nombre important de places vacantes chez les assistants maternels continue de nous interroger. Je souhaite donc que nous fassions sauter certains verrous pour que se rencontrent ces parents sans solution d’accueil et ces assistants maternels sans enfants à accueillir.

Nous allons ainsi expérimenter, à partir du 1er janvier 2015, le versement en tiers payant du complément de libre choix du mode de garde pour les familles modestes. Je tiens, par ailleurs, à souligner que, grâce à la modulation des allocations familiales, le complément de mode de garde ne sera pas réduit pour les familles les plus aisées comme cela avait pu, à un moment donné, être envisagé.

Je tiens aussi à préciser que l’idée d’une augmentation des tarifs de crèche pour les familles les plus aisées, qu’évoquait le rapport du HCF, n’a pas été retenue. Il n’a jamais été question qu’elle le soit.

Nous allons aussi co-financer la création de relais d’assistants maternels – RAM –, car il faut que les assistants maternels et les parents disposent de lieux d’information et d’échange. Enfin, la prime à l’installation des assistants maternels sera augmentée dans les zones où il manque des professionnels.

L’investissement dans la pierre pour créer des crèches est un premier axe, mais nous devons aussi penser à l’investissement dans l’humain, et, en particulier, dans les métiers de la petite enfance. Il s’agit d’investissements d’avenir : ces métiers représentent un gisement d’emplois.

Ce sont des métiers extrêmement féminisés, mais nous cherchons à améliorer leur mixité, sans pour autant penser qu’il vaut mieux proposer aux femmes de longs compléments de libre choix d’activité – CLCA –, qui parfois deviennent des trappes à inactivité, que de développer les métiers dans lesquels elles sont les plus nombreuses.

Pour dynamiser ces métiers, il faut agir sur plusieurs fronts, et d’abord sur celui des assistants maternels et des gardes à domicile. Ceux-ci doivent pouvoir mieux faire reconnaître leurs acquis professionnels, et nous devrons réfléchir à la mise en oeuvre de la validation des acquis de l’expérience. Cette certification ne fonctionne, pour le moment, pas aussi bien que nous le souhaiterions. Or elle peut constituer un des chantiers de simplification du Gouvernement.

Nous pourrons ainsi offrir, à celles et ceux qui le souhaiteraient, un véritable déroulé de carrière pouvant évoluer vers l’accueil collectif.

Nous devons aussi réfléchir avec nos partenaires à une offre de formation aujourd’hui insuffisante, notamment concernant les auxiliaires de puériculture, et à des passerelles plus souples entre les métiers.

Voilà les axes de travail sur lesquels nous allons avancer. Voilà ce qui fait l’excellence de la politique familiale française, une politique familiale qui permet à la France d’avoir à la fois un haut taux d’activité professionnelle des femmes, un taux de natalité que l’Europe nous envie, et des enfants heureux et épanouis dans des modes d’accueil diversifiés et adaptés aux besoins des familles.

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