Notre politique familiale s’est construite pas à pas depuis trois quarts de siècle. L’ensemble des mesures prises depuis le décret-loi de 1938 a permis d’atteindre un même et seul objectif : celui de relancer et, surtout, de maintenir une natalité aussi haute que possible dans notre pays. Dans ce bref rappel historique, je veux bien sûr saluer le rôle éminent du Conseil national de la Résistance, qui a ensuite modifié la structure administrative et l’organisation financière des caisses d’allocations familiales grâce à la création de la Sécurité sociale.
Le texte qui, en 1945, mit fin au monopole patronal en intégrant les caisses d’allocations familiales dans la structure unifiée et centralisée de la Sécurité sociale est fondateur de notre système. Il convient de le rappeler.
Aujourd’hui, nombre de nos voisins européens voient poindre les conséquences possibles du vieillissement de leur population pour leur économie. Cette perspective est souvent la résultante d’une absence ou d’un défaut de prises de décisions et de mesures en faveur des familles pendant de longues décennies, à l’inverse de ce que nous avons fait ici en France.
L’appui financier aux familles n’est certes pas le seul élément qui fait que notre pays reste largement dans le peloton de tête pour le taux de fécondité. Les autres paramètres, nous les connaissons : développement des structures d’accueil des tout-petits, maintien d’une véritable école maternelle, avec un accueil même pour les moins de trois ans, garantie de services de qualité, adaptation des horaires de travail dans les collectivités, mais aussi dans les entreprises. Ces éléments sont reconnus comme permettant aux hommes et aux femmes – soyons honnêtes : le plus souvent aux femmes – d’avoir une activité professionnelle tout en ayant des enfants. Tout cela assure à la France un taux de fécondité bien supérieur à celui de nos proches voisins européens, qui nous l’envient.
Mes chers collègues, nous en sommes toutes et tous convaincus, la réussite de notre politique familiale s’est construite grâce aux allocations familiales et aux prestations financières versées aux familles, mais aussi à l’ensemble des dispositifs que je viens d’évoquer. Ce débat qui s’engage sur le budget de la Sécurité sociale, et plus particulièrement sur les allocations familiales, est-il de nature à remettre tout cela en question ? Ma réponse est non : dire que la modulation des seules allocations familiales en fonction des ressources des foyers viendrait mettre à mal notre politique familiale relève, pardonnez-moi de le dire ainsi, d’une certaine « hypocrisie ».