La nature des capitaux des futures sociétés de projet, ou SPV (Special Purpose Vehicle), n'est pas encore arrêtée. Il est certain qu'une partie du capital viendra de la cession de participations de l'État sur le marché ; le ministre l'a dit. Il est parfaitement légal d'utiliser ces crédits pour monter une société qui fera du leasing. Quant aux investisseurs privés, soit ils produisent eux-mêmes du matériel, soit ils ne sont que des opérateurs sur le marché – sachant qu'il y a aujourd'hui sur la place de Paris beaucoup de fonds disponibles, à des taux d'intérêt très faibles. Les grands industriels de défense ont-ils intérêt à participer à ce type de montage ? À eux d'en décider. Cette activité peut en tout cas leur permettre de maintenir leur flux de commandes et de livraisons, ce qui est sécurisant. À mon sens, ces entreprises devraient donc accompagner le mouvement et faire en sorte de pouvoir utiliser les SPV si les ventes de fréquences ne sont pas au rendez-vous. Les investisseurs privés peuvent quant à eux être sensibles à la signature de l'État, qui s'engage à louer les matériels et à payer les loyers.
Comment articuler ces différents types de capitaux ? Comment la société sera-t-elle organisée ? Son capital sera-t-il majoritairement public ou l'État préférera-t-il laisser la main au privé ? Ces questions restent à trancher, à la lumière de différents critères liés à la dette publique, à la consolidation, au déficit global.
Le coût, vous le connaissez : c'est le loyer de l'argent. Le loyer qui sera acquitté rémunère le fait de payer sur la durée et non instantanément, ainsi que l'amortissement d'une partie du matériel. Pourra-t-on envisager de mettre fin au versement du loyer de manière anticipée en cas de rentrées supplémentaires ? D'offrir des options d'achat, comme dans le secteur automobile ? Il reste à le déterminer, ce qui nous mobilisera à coup sûr jusque début décembre.
La charge de la maintenance est elle aussi à l'étude. Je ne vois pas comment une société qui ne serait pas impliquée d'une manière ou d'une autre dans la fabrication des équipements pourrait en assurer la maintenance. Nous devrons trouver un dispositif permettant d'articuler les différentes composantes de l'armée – par exemple, pour les matériels aériens, celles de l'armée de l'air : équipes sur le terrain, service industriel de l'aéronautique (SIAé) – et les compétences de ces divers opérateurs. Nous verrons cela au cas par cas.
S'agissant des exportations, l'augmentation est effectivement très marquée. Plusieurs contrats importants sont entrés ou vont entrer en vigueur en 2014 : après le contrat LEX d'entretien de frégates avec l'Arabie saoudite et la vente de corvettes à l'Égypte, ce sera le cas, d'ici à la fin de l'année, de la vente de satellites d'observation au Pérou et aux Émirats arabes unis – le ministre a confirmé la signature de ce dernier contrat et nous attendons l'acompte qui permet son entrée en vigueur effective. Il s'agit enfin d'équiper l'armée libanaise, avec le concours d'un sponsor que je ne nommerai pas, mais que le ministre a lui-même mentionné.
Parallèlement, certaines entreprises réalisent dans ce domaine des chiffres d'affaires absolument colossaux, à l'insu de tous. Ainsi, la société alsacienne Lohr, peu connue sinon pour ses fardiers qui transportent les automobiles sorties d'usine, fournit en véhicules blindés la garde nationale d'un pays dont je vous laisse deviner le nom, en quantité astronomique : les contrats dépassent de beaucoup le milliard d'euros et près de deux tranches ont déjà été prises. Il existe donc des niches, qu'il ne faut pas hésiter à explorer.
Du côté des prospects, d'importants contrats sont envisagés avec des pays du Moyen-Orient, en particulier le Qatar : outre les Rafale, il est question de NH90 – il n'est pas exclu que le contrat soit signé avant la fin de l'année –, de VBCI, en cours d'évaluation comparative, et de frégates de défense aérienne pour protéger les plates-formes gazières, voire les installations sensibles comme celles qui accueilleront la Coupe du monde de football en 2022.