Intervention de Arnaud Leroy

Réunion du 22 octobre 2014 à 9h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Leroy, rapporteur :

L'alinéa 17, qui offusque certains d'entre vous, résulte de discussions que nous avons eues à la Commission des affaires européennes, à la suite d'une proposition de Bernard Deflesselles – qui n'est pas encore passé dans le groupe majoritaire – sur l'effet d'entraînement de l'Europe.

Il ne s'agit pas de néocolonialisme : l'Europe émet 12 % des gaz à effet de serre mais elle représente le premier marché mondial, et certains industriels européens de l'énergie – français notamment – figurent dans la liste des principaux groupes du secteur. C'est ainsi que le groupe Magritte milite pour l'adoption d'une référence climatique ambitieuse à l'échelle européenne, qui lui permettrait de valoriser son savoir-faire. Une partie de l'industrie attend la visibilité offerte par les textes français et européens.

Comme Laurence Abeille, je considère que l'élevage n'est pas suffisamment pris en compte et je vais organiser prochainement une rencontre dans le cadre du groupe d'étude changement climatique sur le thème de l'agriculture. Outre les émissions de gaz à effet de serre, il faudrait aborder des thèmes comme celui de la transformation de prairies en terres cultivées. Quelles initiatives la France va-t-elle prendre ? Ces questions sont toujours traitées en pointillé dans les négociations de la politique agricole commune (PAC). Dans le cadre du verdissement, peut-être y aura-t-il des évolutions de certains types d'élevage vers d'autres ? Pour être franc, je n'en sais rien.

À Françoise Dubois, je répondrais que 20 % du budget européen, adopté il y a un an pour la période 2014-2019, est dédié au financement de politiques de lutte contre le changement climatique. C'était l'une des rares bonnes nouvelles de ce budget. Chaque fois que la Commission des affaires européennes auditionne un responsable européen qui connaît un peu le sujet, je l'interroge sur les critères retenus et le mode de pilotage retenu pour distribuer cette manne financière. Le plan d'investissements de 300 milliards d'euros annoncé par Jean-Claude Juncker en fait-il partie ? Tous ces projets sont encore en gestation.

Une autre question portait le déficit de la balance commerciale auquel le projet de loi relatif à la transition énergétique vise à apporter des réponses. Sur 70 milliards d'euros de déficit commercial, 62 milliards sont liés à notre facture énergétique : il est temps de se redonner des marges de manoeuvre. Comme M. Julien Aubert, je pense que nous devons rattraper notre retard en matière de chaleur renouvelable, d'hydrogène et de géothermie profonde. Dans ces domaines, nous possédons un savoir-faire que nous savons exporter mais que nous avons du mal à imposer chez nous.

Je ne suis pas trop inquiet concernant le surcoût de ces énergies par rapport au nucléaire : les études effectuées récemment par la Cour des comptes, notamment sur l'éolien offshore, montrent que les écarts de prix de revient se réduisent, parfois même jusqu'à se rapprocher de l'épaisseur du trait. Une fois effectués les investissements en capital, et compte tenu des progrès réalisés au cours des dernières décennies, le coût de revient du kilowattheure produit dans les centrales photovoltaïques et éoliennes est beaucoup moins élevé que ce que d'aucuns affirment et tend à se rapprocher du prix du kilowattheure produit dans les centrales nucléaires. Il est nécessaire d'avoir une information objective dans ce domaine.

Lorsqu'il est question de politique énergétique, nous continuons à avoir un réflexe très national alors que nous devons faire le saut européen, en allant au-delà du slogan sur l'Union de l'énergie. Dans ma circonscription, la poussée des énergies renouvelables se heurte à une barrière naturelle, les Pyrénées, qui rend les exportations de l'Espagne et du Portugal difficiles. Ces pays sont en attente des programmes d'interconnexion qui ont été bloqués pendant des décennies en raison des réflexes des monopoles nationaux. Une fois dépassés ces blocages, nous aurons une meilleure visibilité en termes de politique énergétique.

Les changements attendus sur le marché des quotas d'émission vont se produire mais entre le marché carbone et le marché de l'énergie, c'est un peu l'histoire de l'oeuf et de la poule. La situation actuelle est assez ubuesque : la valeur de la tonne de carbone oscille entre 3 et 5 euros, ce qui est insuffisant. La contribution énergie-climat a été créée dans la loi de finances, il y a un peu moins de deux ans, mais nous ne savons pas quel sera son avenir après 2016. Il est donc nécessaire de dessiner des trajectoires et s'y tenir, comme le demandent les secteurs économiques qui ont besoin de visibilité.

Pour ma part, je suis un fervent partisan de la création d'une taxe carbone aux frontières de l'Europe, et je rejoins les préoccupations exprimées par Guillaume Chevrollier. Nous produisons 12 % des émissions de gaz à effet de serre mais nous sommes le premier marché en termes de consommation, et nous avons les moyens d'imposer nos critères dans ce domaine comme dans d'autres qui touchent à des questions plus éthiques telles que le droit du travail. Il est possible de s'assurer que des biens importés sont produits selon des systèmes d'éco-conception assez développés – capture de gaz à effet de serre et mobilisation de chaleur renouvelable – dans les grandes zones franches du Mexique, de Chine ou de Turquie

Enfin, l'idée de mener une politique publique d'économies d'énergie dans les hôpitaux me semble intéressante à explorer.

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