Les opérations en Libye étaient interarmées. Elles ont bien illustré un type d'opérations aériennes que l'on retrouvera à l'avenir. On occulte trop souvent les phases de transport logistique et de reconnaissance pré-crise. Cette dernière permet précisément de pénétrer les défenses sol-air. Si nous devions intervenir sur d'autres théâtres, ce travail serait indispensable : il faudrait connaître parfaitement les systèmes d'armes de grande qualité qui pourraient nous être opposés. C'est une des raisons de notre attachement au programme de capacité de renseignement électromagnétique spatiale (Ceres).
Lorsque nous avons commencé les opérations en Libye, nous ne connaissions que 60 % de l'ordre de bataille adverse. Je note qu'au niveau européen nous ne disposons pas des capacités permettant de supprimer les défenses par missiles à détection électromagnétique. C'est une capacité dont seuls les Américains disposent. Le Rafale est cependant capable, grâce à son système de détection électromagnétique et du missile A2SM, qui peut être tiré à plusieurs dizaines de km de distance, de disposer d'une certaine capacité de destruction des batteries de missiles sol-air.
La maîtrise de l'espace aérien suppose des combats symétriques donnant une prime à l'armée disposant de la force la plus importante. À cet égard, disposer de la capacité d'entrer en premier est fondamental. Il faut donc concentrer nos efforts pour conserver une partie de notre flotte de combat particulièrement bien équipée et entraînée pour cette mission spécifique. Nous allons devoir mettre fin à une conception maximaliste de l'entrainement au profit d'un entrainement différencié, sachant qu'il nous faut pouvoir entrer en premier et ensuite tenir dans la durée en assurant les « missions de deuxième jour ». Mais nous pouvons repenser l'entraînement des pilotes sur l'ensemble du spectre d'intervention.
S'agissant du théâtre national, 10 à 15 000 avions survolent chaque année le territoire national. Notre mission est d'identifier chacun d'entre eux au titre de la surveillance générale et d'assurer une surveillance particulière de certains points sensibles, tels les centrales nucléaires. Cela suppose de rénover tous nos radars, touchés par l'obsolescence. Les effets du décalage de SCCOA IV ont pu être atténués dans la région sud-est grâce au maintien de la mise à niveau du radar de Nice et à l'acquisition d'un radar mobile.