Les départements sont définis comme regroupant un certain nombre de communes, et les régions comme regroupant un certain nombre de départements. Le droit actuel s'oppose à ce qu'une commune nouvelle fasse partie de plusieurs départements, car cela poserait plusieurs problèmes. D'un point de vue pratique, je ne suis pas sûre que cela simplifie la vie des citoyens, qui relèveraient par exemple de deux académies et de deux caisses d'allocations familiales – ainsi l'organisation des activités périscolaires se ferait-elle en fonction de calendriers scolaires différents. Ce serait également un cauchemar statistique : si l'INSEE doit répartir la population d'une commune entre deux départements, certains services pourront se contenter de la rattacher au département où est situé le chef-lieu de la commune nouvelle.
Une telle disposition nécessiterait de remettre en place des sections électorales ou un système similaire, alors qu'elles ont été supprimées en 2013. Elle poserait également des problèmes de répartition des compétences exercées au niveau départemental, et l'on ne cesserait de se demander quel comptable public, quel conseil général est compétent pour tel ou tel dossier. Lorsque le maire d'une commune dont le chef-lieu est situé dans un département s'abstiendrait de prendre des mesures de police pour un événement ayant lieu dans l'autre partie de la commune nouvelle, quel préfet serait compétent ?
Effectivement, certains EPCI sont déjà situés à cheval sur plusieurs départements, mais les EPCI ne sont pas des collectivités : ils ne sont que des groupements de collectivités. On peut imaginer que, lorsque la nouvelle carte intercommunale sera stabilisée, la question de la rectification des limites des départements pourra également se poser.
Pour ce qui est plus spécifiquement de l'agglomération redonnaise, située à cheval sur trois départements et deux régions, il revient aux élus locaux de constater que les limites de 1790 ne sont effectivement pas adaptées à la réalité actuelle, et de proposer une solution de rattachement de toutes les communes de l'agglomération à un seul département. Les recherches auxquelles nous avons procédé ne nous ont d'ailleurs permis de trouver aucune trace de refus d'un conseil général de procéder à une évolution en ce sens. Par exemple, la croissance de l'agglomération lyonnaise a justifié un mouvement d'extension vers l'est du département du Rhône : en 1852, quatre communes de l'Isère – Vénissieux, Bron, Vaulx-en-Velin et Villeurbanne – ont été ainsi rattachées au département du Rhône ; en application de la loi du 29 décembre 1967, six communes de l'Ain et vingt-trois communes de l'Isère ont connu le même sort, ainsi que la commune de Colombier-Saugnieu en 1971.
La recherche d'une administration locale efficace implique que l'on reconnaisse sur le terrain que les limites administratives ne sont pas taboues et qu'elles peuvent effectivement évoluer afin de permettre la mise en place d'une commune nouvelle. Pour l'ensemble de ces raisons, je demanderai à M. Molac et à M. Marsac de retirer leurs amendements et, à défaut, j'émettrai un avis défavorable.