Intervention de Bernard Labat

Réunion du 21 octobre 2014 à 17h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Bernard Labat, chargé de mission au sein de l'association Humanité et Biodiversité :

Je reviendrai tout d'abord sur le principe de non-régression, que nous avons fait inscrire dans la feuille de route du processus de modernisation du droit de l'environnement supervisé par le sénateur Alain Richard. C'est un concept délicat car il est borné, à la manière d'un flipper ou d'un billard. Plusieurs repères permettent de poser la réflexion. Tout d'abord, il existe déjà dans le droit international : quand un traité succède à un autre, les dispositions les plus avantageuses doivent s'appliquer, y compris dans la période transitoire. En droit national, il y a quelques exemples timides d'inscription de ce principe dans la substance du droit : la constitution japonaise prévoit son application pour la protection des droits fondamentaux et des droits humains. Enfin, il y a la doctrine : Michel Prieur, professeur émérite à l'université de Limoges, y a consacré plusieurs études considérables. Par ailleurs, il ne faut pas s'interdire de constater des effets de seuil quantitatifs dans la succession des textes juridiques portant sur un même objet : on note ainsi une progression du caractère impératif des exigences pour la sécurité des véhicules à moteur, et, dans le droit de l'environnement, pour les eaux de baignade.

Des discussions que nous avons au sein de la Commission spéciale de modernisation du droit de l'environnement au sujet du principe de non-régression, il ressort clairement que son opportunité ne fait pas consensus. Certains estiment qu'il ne faudrait pas durcir la substance du droit. Nous considérons, pour notre part, qu'il importe d'aller plus loin.

J'en viens au domaine maritime, plusieurs fois évoqué. Beaucoup des objectifs politiques, y compris au niveau international, comme l'objectif des 10 % d'aires marines protégées fixé par la Convention sur la diversité biologique, se heurtent à un principe de réalité. Le programme des mers régionales mis en place par le Programme des nations unies pour l'environnement (PNUE) recouvre une quinzaine de conventions internationales régionales. Ces conventions comportent plusieurs protocoles, dont un protocole dédié à la pollution tellurique, principal facteur de pollution des zones marines. Le problème est qu'ils n'ont aucune efficacité. Ainsi le fait que l'Indonésie ait signé l'un d'eux n'a pas empêché le fleuve Citarum de devenir un véritable cloaque, entièrement recouvert de papiers, de morceaux de plastique, de métaux, et de déjections.

Au moment de la conférence environnementale de 2013, je m'étais posé la question de savoir s'il existait en France une industrie naissante de la dépollution marine. Ce secteur compte actuellement plusieurs entreprises disposant d'un véritable savoir-faire et je pense que certaines ont même déposé des brevets pour protéger leurs procédés. Il faudrait réfléchir à leur modèle économique et se donner la peine de favoriser leur essor car le développement de la pollution plastique en haute mer, liée en partie en l'inefficacité de l'action du PNUE en matière de pollution tellurique, appellera certainement des actions de dépollution en haute mer : il serait bon que notre pays dispose d'un temps d'avance en ce domaine.

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