Intervention de Michelle Demessine

Réunion du 23 octobre 2014 à 11h00
Commission d'enquête chargée d'étudier les difficultés du monde associatif dans la période de crise actuelle, de proposeer des réponses concrètes et d'avenir pour que les associations puissent assurer leurs missions, maintenir et développer les emplois liés à leurs activités, rayonner dans la vie locale et citoyenne et conforter le

Michelle Demessine, présidente de l'Union nationale des associations de tourisme, UNAT :

Merci de nous accueillir ; je ne doute pas que les conclusions de votre commission d'enquête constitueront une aide précieuse pour le secteur associatif.

Présidente de l'UNAT depuis quatre mois, je connais parfaitement le secteur du tourisme pour y avoir consacré beaucoup d'énergie en tant que secrétaire d'État au tourisme de 1997 à 2001.

L'émergence du tourisme social s'inscrit dans le mouvement des grandes conquêtes sociales de notre pays : la création des congés payés en 1936, d'une part, et la création des grands mouvements d'éducation populaire et des comités d'entreprise en 1945, d'autre part. Ces deux avancées majeures ont favorisé la massification du tourisme, auparavant réservé aux classes privilégiées. Ainsi est né un vaste réseau d'accueil sur l'ensemble du territoire, caractérisé par un fort contenu éducatif et culturel, avec les plus belles destinations de la première destination touristique mondiale, ce qui en fait un modèle dans le monde.

La richesse du tourisme social, c'est son patrimoine, acquis par ceux qui l'ont créé grâce à des actions de solidarité, mais aussi à une intervention publique forte au début de son existence. Ce patrimoine est en danger, nous y reviendrons. La richesse du tourisme associatif, ce sont aussi les hommes et les femmes qui le font vivre : des professionnels de qualité, bénéficiaires d'une convention collective nettement plus favorable que celle du secteur privé, mais aussi des bénévoles.

L'UNAT fédère 56 grandes organisations nationales et 524 membres régionaux réunis au sein de 20 unions régionales des associations de tourisme. Elle couvre un secteur économique très divers : villages de vacances, centres de vacances pour enfants et adolescents, centres sportifs, auberges de jeunesse, voyagistes, organisateurs de séjours, refuges, gîtes, centres internationaux de séjour, campings. Cet ensemble représente 1 600 établissements, 230 000 lits, 5 millions de vacanciers chaque année, et un chiffre d'affaires annuel de l'ordre de 2 milliards d'euros.

S'agissant des vacances familiales, l'UNAT s'investit dans plus de 500 sites, ce qui représente 140 000 lits, 2 millions de vacanciers, 8 000 emplois et 90 millions d'euros de retombées économiques, avec notamment VVF Villages et Cap France comme membres partenaires. Pour le tourisme des jeunes, avec en particulier l'Union nationale des centres sportifs de plein air (UCPA) et la Fédération unie des auberges de jeunesse (FUAJ) comme membres partenaires, elle gère plus de 190 sites, ce qui équivaut à 20 000 lits, 1 million de personnes accueillies, 1 500 emplois et 11 millions d'euros de retombées économiques. Le secteur enfants et adolescents nous amène à intervenir sur 400 sites, soit 43 000 lits, 1 million de jeunes accueillis, 7 500 emplois et 50 millions d'euros de retombées économiques. Notre secteur voyage accueille 40 000 vacanciers pour 1,5 million d'euros de retombées économiques, mais avec moins d'emplois puisque nous travaillons avec les agences de voyage. Enfin, notre réseau offre des gîtes, des refuges, des campings sur 220 sites pour 16 000 lits, soit 450 000 personnes accueillies, 1 800 emplois et plus de 23 millions d'euros de retombées économiques.

Le tourisme social et associatif présente de nombreux atouts.

D'abord, notre patrimoine est réparti sur l'ensemble du territoire, y compris la Côte d'Azur – le château d'Agecroft à La Napoule, par exemple, a été sauvé grâce au tourisme social et reçoit encore chaque année des personnes de condition modeste. Un tiers de ce patrimoine appartient en propre à nos organisations, la moitié aux collectivités territoriales, et le reste aux comités d'entreprise.

Grâce à ce patrimoine, le tourisme social est un véritable aménageur du territoire. Nous sommes présents dans 1 600 communes, dont plus de 60 % comptent moins de 3 000 habitants, essentiellement situées en zone rurale. Notre activité est essentielle à la vie des territoires car les petites communes campagnardes n'intéressent pas les grands groupes du tourisme privé. L'ensemble de nos équipements génère 175 millions d'euros de retombées fiscales et sociales, et nos seuls villages de vacances permettent d'injecter plus de 300 millions d'euros dans l'économie locale.

Ensuite, notre secteur porte des valeurs. En effet, les grandes organisations rassemblées au sein de l'UNAT s'engagent en faveur d'un tourisme de qualité, ouvert à tous, vecteur de cohésion et de progrès social au service d'une société plus solidaire et durable. Notre mission historique trouve à cet égard toute sa justification puisque notre pays compte encore un nombre important de personnes qui ne partent jamais en vacances, en particulier aujourd'hui les jeunes couples avec enfants, faute de revenus suffisants. Il s'agit là d'un recul social important, sachant que nos générations ont accédé très rapidement au droit aux vacances.

Cette audition est d'autant plus importante pour nous que l'un des rôles de l'UNAT est également de faire reconnaître l'importance économique de notre secteur qui génère 19 000 emplois et 205 millions d'euros d'impôts et taxes grâce aux 5 millions de personnes accueillies pour 27 millions de journées de vacances offertes.

En plus d'être un aménageur du territoire, le tourisme social est porteur d'innovations. En effet, les organismes du tourisme social et de plein air furent les premiers à proposer des aménagements, tels les sentiers de randonnées pédestres, les pistes de ski de fond, les pistes cyclables, l'aménagement des rives, etc., permettant de démocratiser la pratique d'activités. Le Club Méditerranée, un des fleurons du tourisme français, s'est développé sur le modèle des grands villages du tourisme social des années soixante. Aujourd'hui, le tourisme social est encore capable d'innovations, pour peu que des remèdes soient apportés aux difficultés auxquelles il est confronté.

Depuis quelques années, le tourisme social participe au développement d'initiatives que je trouve très importantes. Je pense en particulier aux conventions qu'il passe avec des communes rurales ne disposant pas d'équipements sportifs et de loisirs, afin de mettre ses propres équipements à la disposition des populations locales, comme les piscines, ce qui lui permet de contribuer à l'apprentissage obligatoire de la natation chez les jeunes.

Pour finir, je dirai que la réforme territoriale est pour nous un motif d'inquiétudes, comme pour un grand nombre d'associations, notamment au regard de nos financements. En outre, le poids des normes et des règlements est un réel problème pour notre association d'utilité publique qui regroupe des organismes à but non lucratif.

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