La réforme territoriale inquiète tout le monde, car qui sait dans quelle situation se retrouveront les collectivités ? Nous craignons que l'existence de collectivités massives renforce la conception technocratique des choses. Sans compter que nos unions régionales devront s'adapter, bouleversement dont nous espérons sortir par le haut.
Le tourisme social souffre d'un problème d'image très important : bon nombre de nos concitoyens y voient un tourisme au rabais – certains ignorent même que les villages VVF en font partie. Certes, quelques villages ont besoin d'être rénovés, mais l'offre est généralement acceptable par rapport aux prix demandés. Lorsque j'étais secrétaire d'État au tourisme, une grande campagne de communication avait été mise en place pour améliorer l'image de ce secteur. Il faut relancer cette communication, par exemple à l'occasion des grands reportages télévisés au moment des vacances, qui malheureusement ne sont jamais réalisés sur les lieux de nos structures, alors que nous faisons partir 5 millions de personnes.
Pour casser cette image d'un tourisme social au rabais, nous avons besoin d'être soutenus financièrement. Lors de la création de ce secteur, le soutien financier public était important, avec un plan patrimoine, l'intervention des caisses d'allocations familiales, etc. Aujourd'hui, pratiquement plus personne ne nous soutient : le budget de l'État ne prévoit plus aucun plan patrimoine – le dernier date de la période où j'étais secrétaire d'État au tourisme. Au demeurant, il n'existe pas de ministère du tourisme – tout est regroupé dans des agences – et le seul dispositif existant, celui de la Caisse des dépôts, se met difficilement en place : la Caisse a mis très longtemps à accepter l'ouverture d'une ligne pour le tourisme social, laquelle n'est d'ailleurs pas entièrement consommée.
L'économie touristique, qu'elle soit sociale ou privée, doit faire face à des investissements très importants : nos structures ont besoin d'être rénovées, comme les hôtels. Elles tentent de survivre, de boucler leurs budgets, pour continuer d'offrir un accueil de qualité. Mais il est très difficile de sauvegarder sa vocation sociale quand on doit lutter pour sa survie économique. D'où l'importance d'un soutien financier par les pouvoirs publics.
Le label « tourisme et handicap » est une fierté personnelle car c'est moi qui l'ai créé lorsque j'étais secrétaire d'État au tourisme. Depuis 2001, il a été pris en main par toutes les structures, comme par les régions et les départements. La mise aux normes des équipements ne suffit pas, il faut aussi réfléchir à des parcours touristiques adaptés, travail très important auquel se sont attelées nos structures.
La modernisation technique elle-même renvoie au problème financier. Comme les collectivités, nous faisons installer des ascenseurs, par exemple, à l'occasion d'une rénovation.
Vous avez raison de m'interpeller sur les comités d'entreprise, car notre secteur se portera bien si ce partenaire essentiel est au rendez-vous. Or aujourd'hui, on ne peut pas dire que le concept de droit aux vacances pour tous est au coeur des politiques des CE. Certains, et nous le déplorons, ne font plus la différence entre tourisme privé et tourisme social, alors que ce dernier présente un intérêt éducatif et culturel avec comme objectif premier de permettre au plus grand nombre de partir en vacances.
Quant au mouvement syndical, il devrait reprendre son bâton de pèlerin pour reposer la question des non-départs. Nos structures pourraient accueillir beaucoup plus de monde, mais les gens ne sont plus aidés financièrement comme autrefois. Il est terrible pour nos générations de constater que nos petits-enfants n'imaginent pas pouvoir partir en vacances. C'est un problème politique qui nous est posé à tous !
L'UNAT est d'autant plus capable de répondre aux enjeux actuels qu'elle est l'émanation des grands réseaux. Ces grands réseaux sont des entreprises animées par des professionnels de qualité, qui ont une vraie expérience, des savoir-faire, et dont la force est d'avoir conservé des valeurs. Alors que l'esprit militant s'est effiloché au fil du temps dans bon nombre de domaines, notre réseau réunis encore des gens de très bon niveau et qui se battent pour maintenir une offre de qualité – même s'ils sont très occupés par la survie de leur structure. Nous sommes donc capables de faire face à tous ces défis, pour peu que nous soyons aidés.
Je pense que nous sommes au rendez-vous de l'évolution des besoins, car nous nous montrons depuis toujours très soucieux de l'accueil de nos bénéficiaires en termes de bien-être, de découverte du territoire, de participation aux activités. Nos réseaux commencent à s'adapter pour proposer des séjours plus courts et pourraient aller plus vite dans l'adaptation des besoins s'ils disposaient de moyens supplémentaires leur permettant de rénover leur patrimoine. Beaucoup y sont prêts, mais ne trouvent pas les soutiens financiers nécessaires, si bien que certains baissent les bras. Aujourd'hui, nous nous trouvons dans une situation très critique : des réseaux vont fermer des villages ou sont obligés de les vendre au secteur privé. Malheureusement, les villages vendus sont d'abord ceux situés dans les plus beaux lieux, car ils attirent beaucoup d'acheteurs. Cela nous privera d'une offre sur l'ensemble du territoire, alors que notre mot d'ordre est que les gens de conditions modestes ont aussi le droit d'aller sur les plus beaux sites.
Faute de ministère du tourisme, la promotion du tourisme relève du ministère des affaires étrangères, mais l'aspect territorial revient au secrétariat d'État de Carole Delga en charge du commerce et de l'économie sociale et solidaire. Notre faiblesse réside dans cette absence d'interlocuteur – nous manquons d'un « lobbying politique ». J'ai donc pris l'initiative de créer un club de parlementaires de défense et de promotion du tourisme social et associatif – je sais que les élus défendent bec et ongles les équipements présents sur leurs territoires. Nous avons besoin d'une voix plus forte pour être entendus et défendre notre patrimoine qui nous a été légué par nos prédécesseurs : les bâtiments des villages AEC, par exemple, ont été payés à l'origine par des souscriptions citoyennes. Il est important de défendre ce patrimoine, afin qu'il ne disparaisse pas, et nous comptons sur votre aide pour y parvenir.