S'agissant de l'observation relative au risque budgétaire, il faut distinguer le risque de refinancement, c'est-à-dire un risque pour l'accès au marché, du risque de hausse des taux.
Aucun grand pays de l'OCDE, je le souligne, n'a mis en place de contrôle budgétaire a priori au sens défini par la Cour. Seuls des États dont les volumes de dette sont infiniment moins importants que ceux constatés en France l'utilisent. C'est ainsi le cas de la Suède, dont la dette représente un tiers du PIB, soit 125 milliards d'euros, à comparer à 1 380 milliards d'euros de dette française. Le programme d'émissions de la dette suédoise représente environ 14 milliards d'euros par an, contre de l'ordre de 180 milliards d'euros pour la dette française. Les ordres de grandeur ne sont donc pas du tout les mêmes.
Nous avons d'ores et déjà des moyens de contrôler le risque de refinancement – moyens que nous utilisons plus que la plupart de nos homologues européens. Nous pouvons ainsi procéder à des opérations de rachat par anticipation, ce qui permet notamment de lisser la charge d'amortissement sur plusieurs années, et d'éviter les à-coups dans le volume d'émissions. Le volume d'émissions et le déficit budgétaire lui-même évoluent ainsi de façon aussi similaire que possible. Cela permet d'assurer la régularité et la prévisibilité de notre accès au marché : en 2010, nous avons racheté pour plus de 22 milliards d'euros de dette, et en 2011 pour plus de 23 milliards. Nous pouvons également échanger des titres entre différents points de la dette française.
Quant au risque de taux, il faut savoir que l'essentiel de la dette française est émise à taux fixe : une hausse des taux ne se diffuserait donc que très progressivement. Une évolution brutale des taux d'intérêt menacerait donc surtout les titres émis à court terme, que nous utilisons pour gérer les chocs économiques et financiers – nous y avons beaucoup recouru par exemple en 2008 et 2009. Mais s'ils représentaient plus de 18 % de notre dette en 2009, ils n'en représentent plus aujourd'hui que 12 %. C'est le reflet non seulement de l'évolution du déficit, mais bien de notre volontarisme – nous avons notamment agi sur la gestion de la trésorerie des correspondants du Trésor.
S'agissant des obligations indexées, nous avons constaté que les titres indexés arrivés à échéance nous avaient permis de gagner environ vingt points de base par rapport aux obligations nominales émises au même moment et de même maturité : en effet, ils protègent ceux qui les souscrivent des risques d'inflation, et les investisseurs sont prêts à rémunérer cette garantie. De plus, ces titres permettent d'accroître la diversité de la base des investisseurs, donc de diminuer la pression sur les obligations nominales, ainsi vendues dans des conditions plus favorables pour le contribuable français.
Le montant émis oscille autour de 10 % des émissions nettes depuis le début de la crise en 2008. Ce chiffre n'est pas arbitraire : il résulte d'une modélisation réalisée par l'Agence France Trésor, qui prend notamment en considération le caractère contracyclique de cette charge d'intérêt. On a vu notamment en 2009 les effets de ce lissage de la charge d'intérêt : cette année-là, nous avons ainsi économisé 2,1 milliards d'euros, puisque les prévisions d'inflation étaient beaucoup plus élevées que l'inflation qui s'est réalisée.