Intervention de Henri Proglio

Réunion du 22 octobre 2014 à 17h00
Commission d'enquête relative aux tarifs de l'électricité

Henri Proglio, président-directeur général d'EDF :

Merci, madame Dubié, pour l'hommage que vous rendez à nos équipes. Je ne manquerai pas de leur transmettre vos félicitations.

Bruno Lafont, président de Lafarge, est également administrateur d'EDF ; il connaît donc parfaitement la question des tarifs de l'électricité s'appliquant aux industries électro-intensives. Les institutions de contrôle comme nos concurrents en attestent : la France dispose d'un outil de production qui produit à ce jour l'électricité la moins chère d'Europe. Les rapports de la Cour des comptes de 2013 et 2014 confirment ainsi que le parc nucléaire existant produit de l'électricité à 55 euros le mégawattheure, coûts de démantèlement et de stockage compris. La production d'un mégawattheure thermique coûte actuellement environ 75 à 80 euros ; la crise ukrainienne vient pourtant rappeler que les prix historiquement bas du charbon et du gaz peuvent évoluer. Un mégawattheure éolien revient à 90 euros onshore et à 200 euros offshore ; photovoltaïque, entre 280 et 300 euros. Pour les énergies intermittentes, il faut ajouter 30 % de plus.

Disposant d'un parc nucléaire et hydraulique exceptionnel – l'ancienneté des installations hydrauliques en fait de surcroît un investissement déjà amorti, expliquant le coût de revient très bas de cette énergie –, la France se présente comme le pays le plus compétitif tant pour les particuliers que pour les industriels. Certes, certains pays comme l'Allemagne versent des subventions massives à leurs industries électro-intensives ; mais cette exception – qui conduit l'Allemagne devant les tribunaux – ne semble ni normale ni durable. En effet, les règles européennes interdisent aux opérateurs de faire des discriminations entre utilisateurs ; toute initiative de ce type prise par un opérateur vis-à-vis d'un type particulier de clientèle l'expose aux poursuites de la justice européenne et des organes de la concurrence. Devant ce réseau de contraintes, il faut combiner deux stratégies distinctes : maintenir la compétitivité de nos coûts de production – garante de celle de notre pays – tout en essayant de contourner les règles, dans les limites de la légalité, pour réserver quelques avantages aux professions particulièrement importantes en termes d'emplois.

Dans quelques cas particuliers, nous avons essayé de venir au secours de telle ou telle entreprise. Vous avez d'ailleurs été les témoins engagés d'opérations que nous avons menées, notamment dans certaines vallées alpines. Mais il fallait que des conditions très particulières soient réunies. Nous avons d'ailleurs longuement essayé d'analyser, de formaliser et de mettre en avant ces conditions de manière à sauver les entreprises en question. Cependant, cela reste du cas par cas, du sur mesure. En aucune manière, cela ne peut être considéré comme une réponse globale.

Si nous n'en faisons pas davantage, ce n'est pas par manque d'ambition ou de bonne volonté, mais parque que c'est interdit. Et, à force de ne pas respecter les interdictions, on finit par se faire attraper. De plus, cela finit par coûter très cher et par nous condamner collectivement.

Il est donc très difficile d'oublier les fondamentaux. Il est de la responsabilité de l'entreprise que j'ai l'honneur de présider pour quelques jours encore de donner à la France un atout de compétitivité dans le domaine de la production d'électricité. Il est de notre responsabilité collective – et, donc, de la vôtre – de faire en sorte que les règles européennes soient changées afin que nous puissions venir au secours de l'emploi dans des circonstances définies. L'entreprise, elle, ne peut rien à cela.

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