Je vous remercie pour la clarté de votre intervention, monsieur Maillard : nous aurons appris beaucoup de choses au cours de cette Commission d'enquête. Je voudrais vous poser à peu près les mêmes questions que mes collègues, mais sous une forme différente. Les interrogations que suscite aujourd'hui l'électricité me rappellent un vieux débat se rapportant à l'informatique, où l'on opposait autrefois le distribué et le réparti. En raisonnant par rapport à l'effet Joule, on pourrait ainsi en venir à considérer que, pour rapprocher le lieu de production du lieu de consommation, et donc limiter les déperditions, il faudrait installer une éolienne sur le toit de chaque maison, et installer des turbines sur le moindre cours d'eau !
Je voudrais savoir si vous parvenez à modéliser les systèmes afin de déterminer lequel présenterait, dans les années à venir, le moins d'inconvénients : d'une part, un système ressemblant au système actuel, composé pour l'essentiel d'une cinquantaine de centrales nucléaires – il est prévu de passer aux réacteurs de génération IV à l'horizon 2030 – et d'un réseau à 400 000 volts, peut-être davantage, qui générera quelques pertes en ligne mais se caractérisera par une grande simplicité ; d'autre part, un système très complexe comportant une multitude de microsolutions, et dont la gestion risque de devenir inextricable.
Nous venons de débattre d'un texte sur la transition énergétique qui, de manière étonnante, ne s'est pas appuyé sur les études et les rapports qui venaient d'être produits – je pense notamment à l'intéressant rapport d'Hervé Mariton sur la fermeture de la centrale de Fessenheim – et avons pris la décision de privilégier les énergies dites renouvelables par rapport au nucléaire, sans même qu'aient été trouvées de vraies solutions pour remplacer le nucléaire : nous avons préféré reconnaître que la production d'électricité allait diminuer, et prévoir de compenser la différence par une baisse de la consommation. Il me paraît essentiel d'informer les Français comme il se doit, en leur expliquant à quel point il importe de ne pas rater le passage de la génération III à la génération IV, ce qui serait dramatique pour notre pays. Alors que nous étions en avance en 1998 avec Superphénix, nous nous sommes laissé rattraper lors des années suivantes, et nous devons veiller à ne pas commettre d'autres erreurs aussi graves – je pense à celle qui consisterait à multiplier les microsolutions, avec une interconnexion servant à remédier à l'aléa de l'outil de production – si nous voulons conserver une chance de faire baisser les coûts. Avez-vous engagé des réflexions sur la base de modèles correspondant aux différents scénarios pour les prochaines années, afin de définir les stratégies politiques à mettre en place ? À défaut, j'ai bien peur que le politique ne joue l'apprenti sorcier sur les questions de sécurité liées au nucléaire.