Le grand mérite de l'accord conclu avec EDF est de rendre le prix Exeltium à nouveau compétitif sur le marché français, conformément à l'objectif initial. Mais est-ce suffisant dans la compétition mondiale ? La réponse est clairement non. Dès lors, la question qui se pose est celle de savoir comment parvenir à donner aux industries présentes sur le territoire français une chance de s'y maintenir.
La réponse ne consiste pas forcément à s'aligner sur le prix le plus bas, car, pour un certain nombre de ces industriels, la production locale présente un avantage lié notamment à la proximité des clients et au transport des produits. Néanmoins, les écarts constatés sont tellement importants qu'il reste du chemin à parcourir pour que la situation soit soutenable.
Les mesures prises par certains de nos voisins sont-elles compatibles avec les règles européennes ? Si la question peut se poser pour un certain nombre de nos compétiteurs, tel n'est pas le cas pour ceux d'entre eux qui ne se situent pas en Europe. Au Canada, par exemple, les prix pratiqués sont extrêmement bas ; ils sont le fruit d'une volonté politique de maintenir, pour des raisons stratégiques, des industries vitales sur le sol national. À cet égard, on m'a interrogé sur la construction tarifaire par empilement. Celle-ci s'applique, me semble-t-il, dans tous les secteurs, mais si l'on veut être à même de maintenir ces industries en France, il faut prendre une décision politique, qui peut consister à déroger à cette structure d'empilement tarifaire.
Je veux souligner qu'Exeltium, qui est certes un montage complexe, qui a mis du temps à se mettre en place et a dû être profondément remanié en 2008 suite aux remarques de la DG Concurrence, présente aujourd'hui l'avantage d'être conforme au droit européen.
Le consortium était à l'origine ouvert à l'ensemble des industriels électro-intensifs. Ses membres sont actuellement au nombre de vingt-sept, mais il est difficilement envisageable d'étendre le périmètre du dispositif actuel, parce qu'une somme considérable, 1,75 milliard d'euros, a été investie, financée par l'emprunt sur les marchés financiers. En revanche, si un « Exeltium 2 » devait être créé – le projet n'ayant pu être réalisé que pour la moitié de la capacité initialement prévue –, on pourrait imaginer, d'une part, qu'il soit ouvert aux industriels qui n'ont pu adhérer au premier dispositif et, d'autre part, qu'il soit fait appel dans ce cadre non seulement au nucléaire, mais aussi à l'hydraulique. Exeltium s'appuie en effet sur les spécificités du parc de production français, pourvu que ces moyens de production soient durables et prévisibles de façon à bénéficier d'une compétitivité et d'une visibilité sur le long terme.
Le groupement Exeltium est-il le lien exclusif entre ses clients et EDF ? A cette question, la réponse est clairement non, ne serait-ce que parce qu'il ne répond qu'à une partie – entre un tiers et la moitié selon les sites – des besoins de ces grands industriels, qui doivent donc négocier l'ensemble de leurs approvisionnements hors Exeltium. Aussi ont-ils des discussions non seulement avec EDF, mais aussi avec l'ensemble des fournisseurs alternatifs potentiels.
Plusieurs questions ont porté sur la limitation annoncée du nucléaire dans le mix énergétique français. Ma réponse comportera deux volets. Tout d'abord, le partenariat industriel sous-jacent au contrat entre Exeltium et EDF comprend une participation à l'évolution du parc nucléaire. Dès lors, une réduction significative de celui-ci peut conduire à un renchérissement du prix Exeltium. Mais j'ai souligné tout à l'heure que la récente négociation avec EDF avait permis de limiter plus qu'auparavant l'impact potentiel de ce renchérissement. Quant au débat concernant le nucléaire et l'énergie renouvelable, tout ce que je puis dire, c'est que l'important pour les électro-intensifs est de pouvoir se fonder sur un moyen de production qui soit en ligne avec leur profil de demande, qui offre donc une stabilité dans le temps et une continuité de production. Partout dans le monde, on constate que les solutions apportées aux électro-intensifs s'appuient nécessairement sur des moyens d'une production continue, qu'il s'agisse du gaz, là où il est bon marché grâce aux gaz de schiste, du charbon, de l'hydraulique ou du nucléaire. Il convient donc que tout pays industriel conserve, dans son mix énergétique, une base conséquente de moyens de production continue et adaptée à un fonctionnement en base : on ne peut imaginer un parc de production fondé sur une part trop importante de moyens interruptibles.