pour les crédits de la fonction publique et de la mission « Provisions ». Il convient aussi d'aider le ministère de la fonction publique, dans une période extrêmement difficile.
Je vous renvoie à la lecture de mon rapport, qui fait apparaître une baisse nuancée des crédits du programme 148, « Fonction publique », une stabilisation des moyens consacrés à la formation des fonctionnaires et une diminution de la dotation dédiée à l'action sociale interministérielle. J'ai notamment auditionné le directeur général de l'administration et de la fonction publique, la direction de l'ENA et les représentations syndicales. Mais je souhaite surtout évoquer quatre points.
Premièrement, au moment où l'on commence à réfléchir au prochain acte de décentralisation, beaucoup s'inquiètent du transfert de personnels de l'État aux collectivités territoriales : comment va-t-il s'organiser ? Sera-t-il conduit sur le modèle de 2004, c'est-à-dire sans discussion possible pour les agents ?
L'opération de 2004 aurait pu représenter une aubaine pour les finances de l'État. Cependant, dans un rapport, la Cour des comptes a relevé qu'elle a en réalité coûté aux finances publiques au sens large – finances de l'État et finances des collectivités territoriales. Les collectivités ont souvent été stigmatisées pour avoir augmenté leurs dépenses, mais le processus de transfert n'a pas été maîtrisé dans son ensemble.
Compte tenu de cette expérience, comment envisagez-vous, madame la ministre, de redéfinir les missions et le périmètre de la fonction publique d'État dans le cadre du prochain acte de décentralisation ? Quelle méthode comptez-vous employer ?
Deuxièmement, la défiscalisation des heures supplémentaires dans la fonction publique a coûté 1,6 milliard d'euros et a bénéficié à 680 000 agents. Sans revenir sur les conclusions du rapport de nos collègues Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot, elle a suscité un effet d'aubaine pour les agents de l'État, comme pour les autres salariés. On ne peut pas en dire autant du point de vue de l'État employeur : la Cour des comptes a constaté une dérive des dépenses de personnel de l'État, imputable pour l'essentiel aux mesures catégorielles et au financement de la défiscalisation des heures supplémentaires. La fin de cette mesure va se traduire par des recettes nouvelles pour le budget de l'État, que je ne suis toutefois pas en mesure de chiffrer. Comptez-vous utiliser ces nouvelles marges de manoeuvre, madame et monsieur les ministres, pour revaloriser la rémunération des fonctionnaires ? Si oui, de quelle manière ?
Troisièmement, je souhaite poser une série de questions sur l'École nationale d'administration (ENA). La suppression du classement de sortie est devenue un serpent de mer : est-elle encore à l'ordre du jour ou l'abandonne-t-on définitivement ? De mes contacts informels avec d'anciens élèves de l'ENA, il ressort que les points de vue sont très partagés.
En outre, certaines méthodes sont révélatrices d'un pilotage stratégique défaillant. Pour l'ENA – c'est peut-être le cas pour d'autres établissements –, le contrat d'objectifs et de performance et le contrat triennal ne recouvrent pas les mêmes périodes, ce qui compromet la capacité de l'école à anticiper les réformes. Ne pourrait-on pas faire coïncider les bornes de ces deux contrats ? Cela simplifierait la vie de l'école et lui permettrait de gagner en efficacité.
Enfin, un rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) relatif à la formation initiale des fonctionnaires préconise de réserver les activités de recherche et de publication aux établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel. Or l'innovation ne se réduit pas aux nouvelles technologies et à la recherche et développement. Elle concerne également les services publics : de nouvelles conceptions du service public, manières d'envisager la relation aux usagers ou méthodes d'organisation peuvent contribuer à améliorer leur performance globale. Ces questions sont abordées dans le secteur privé. Je souhaiterais qu'elles le soient également dans les écoles de formation de l'État, non seulement à l'ENA – qui a adhéré au pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) Hautes Études-Sorbonne-Arts et Métiers (HESAM), troisième PRES parisien –, mais également dans les instituts régionaux d'administration (IRA) et les autres établissements. Nous devons envisager l'innovation dans son acception la plus large et, s'agissant de la formation des agents de l'État, ne pas la réserver aux seules écoles d'ingénieurs.