Intervention de Yves Censi

Réunion du 25 octobre 2012 à 9h30
Commission élargie : gestion des finances publiques et des ressources humaines

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Censi, rapporteur spécial pour les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d'affectation spéciale « Pensions » :

En 2013, les crédits demandés pour le financement des retraites de la fonction publique et des régimes spéciaux s'élèvent à 62,6 milliards d'euros. Ce chiffre représente 21,5 % des dépenses inscrites sur le budget général et progresse de 2,7 % par rapport à 2012.

Les retraites de l'État et des régimes spéciaux représentent donc un enjeu absolument capital pour les finances publiques. Au 31 décembre 2011, l'engagement de l'État à ce titre était évalué à 1 200 milliards d'euros.

Je rappelle qu'un compte d'affectation spéciale (CAS) a pour but d'isoler du budget de l'État certaines recettes et dépenses qui, en raison de leur nature, doivent faire l'objet d'une comptabilisation particulière. C'est une exception au principe de non-affectation puisque, normalement, l'affectation d'une recette à une dépense est interdite.

Le compte d'affectation spéciale « Pensions » permet donc de centraliser et de présenter de façon synthétique l'ensemble des crédits que l'État consacre au service des pensions et des allocations viagères. Les autorisations d'engagement et les crédits de paiement demandés pour 2013 s'élèvent à 56,1 milliards d'euros, en hausse de 2,7 % par rapport à 2012.

Le compte se compose de trois programmes : le programme 741, « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » ; le programme 742, « Ouvriers des établissements industriels de l'État » ; le programme 743, « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions ».

En 2013, on observe que les dépenses, au titre du programme 741, s'élèveront à 51,799 milliards et seront en augmentation de 2,87 % et qu'elles représenteront 92 % des dépenses inscrites dans le CAS.

Le taux de contribution « employeur » augmente une nouvelle fois pour se situer à 74,28 % – contre 68,59 % en 2012 pour les fonctionnaires civils, et à 126,7 % – contre 121,55 % en 2012 – pour les militaires. Enfin, le taux de cotisation salariale passe de 8,39 % à 8,66 %, conformément aux dispositions de la loi portant réforme des retraites de 2010.

La mission « Régimes sociaux et de retraites » regroupe des crédits concourant à financer des régimes sociaux et de retraite qui sont structurellement déficitaires, ou des dispositifs de cessation d'activité. Les crédits inscrits sur cette mission s'élèvent à 6,543 milliards d'euros, en hausse de 2,7 % par rapport à 2012, à périmètre constant.

Cette mission comporte trois programmes d'inégal volume.

Le programme 198, « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres », essentiellement constitué des subventions versées aux régimes de retraite de la SNCF et de la RATP, est doté au total de 4,2 milliards d'euros, ce qui est considérable. Dans son rapport de septembre 2012 sur la SNCF et la RATP, la Cour des comptes observe que les différentes réformes de ces régimes se caractérisent davantage par leur « aspect symbolique » que par « leur contribution à l'équilibre des finances publiques » – faisant sans doute référence à l'allongement de la durée de travail qui a été compensée par une accélération vertigineuse des carrières et des fins de carrière. On pourrait penser que, à la SNCF notamment, la pénibilité du travail justifiait de telles compensations. Or l'espérance de vie y est la plus longue de tous les secteurs.

Le programme 197, « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins », retrace principalement la subvention d'équilibre de l'État pour les charges de retraite.

Enfin, le programme 195, « Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers », est doté de 1,518 milliard d'euros.

L'examen de ces crédits m'inspire quelques questions. Dans son rapport relatif aux deux réformes de la RATP et de la SNCF, la Cour des comptes affirme que « l'importance des mesures compensatrices accordées et leur impact sur la structure d'emploi des entreprises amènent à anticiper […] un bilan financier global négatif pour la présente décennie et sans doute seulement légèrement positif pour les vingt ans qui viennent ». On peut se demander comment il se fait que le contribuable, dont l'âge de départ a été retardé et la durée des cotisations allongée sans compensation, subventionne des régimes de retraite pour lesquels des efforts moins importants ont été demandés. J'aimerais avoir votre avis sur ce sujet.

La réforme de 2009 ayant porté création du Service des retraites de l'État avait pour objectif de centraliser la gestion des pensions civiles et militaires de l'État pour en améliorer l'efficacité et en réduire le coût. Toutefois, les réductions d'emplois prévues ont été revues à la baisse. En 2010, la réduction des effectifs était estimée à 757 équivalents temps plein (ETP), alors qu'elle était de 1 200 ETP en 2007. Selon la note d'exécution budgétaire sur le CAS de la Cour des comptes de mai 2012, cette baisse des réductions d'effectifs prévues s'expliquerait par une résistance partielle des ministères employeurs qui expriment ainsi le besoin de conserver des services pour la gestion et surtout l'information du personnel sur ces questions. Comment accélérer les économies d'échelle en centralisant définitivement la gestion et l'information des retraites de l'État ?

Dans sa note d'exécution budgétaire de mai 2012 sur le CAS « Pensions », la Cour des comptes a annoncé que la Direction du budget et le Service des retraites de l'État travaillaient depuis 2010 à un projet de décret, qui a notamment pour objet d'« infliger des pénalités aux ministères qui ne verseraient pas à temps leurs subventions », comme cela se pratique dans le secteur privé vis-à-vis des employeurs retardataires. Je souscris, pour ma part, à cette importante recommandation, car les retards dans les versements de subventions fragilisent sensiblement la trésorerie du compte. Pourriez-vous détailler les modalités d'application de ce décret et nous donner éventuellement sa date d'entrée en vigueur ?

La mission « Régimes sociaux et de retraite » n'intègre pas l'ensemble des crédits engagés par l'État pour le financement des régimes de retraite : il ignore par exemple ceux de l'Opéra de Paris ou de la Comédie française. Je m'étonne que le périmètre de la mission ne présente pas l'ensemble des régimes spéciaux de retraite qui sont largement subventionnés par le contribuable. Quel est votre avis à ce sujet ?

Enfin, le compte d'affectation spéciale fait face à un problème récurrent de surestimation des retraites, quelle que soit la couleur politique des gouvernements. En loi de finances initiale pour 2011, la surévaluation des recettes était de 300 millions d'euros. L'administration a donc été contrainte de proposer un versement de 237 millions d'euros en provenance du budget général, au moyen de la loi de finances rectificative de décembre 2011 et, bien sûr, d'un décret de transfert, ce qui est contraire au droit budgétaire. Pour résoudre le problème, le gouvernement d'alors a proposé l'inscription, dans la loi de finances pour 2012, de 250 millions d'euros de crédits qui faisaient office de provision sur le programme 195, afin de pallier les éventuelles difficultés de financement du CAS. Dans sa note d'exécution budgétaire de mai 2012, la Cour des comptes a estimé que ce « stratagème » ne pouvait tenir lieu de solution. Quelle est l'analyse du Gouvernement sur cette question, pour l'exercice 2013 comme pour les années à venir ?

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