Intervention de Nicolas Sansu

Réunion du 7 novembre 2012 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Sansu :

À mon tour, je félicite le commissaire général pour son travail, tout en m'étonnant de la date à laquelle se tient cette réunion. Il aurait fallu auditionner M. Gallois avant la remise de son rapport, et auditionner le Gouvernement aujourd'hui, dans la mesure où le lancement du « pacte national » a déjà été annoncé…

Votre rapport est intéressant en ce qu'il révèle l'incurie de l'ancienne majorité. Il suffit de citer ces quelques chiffres : 720 000 emplois industriels perdus en dix ans, un excédent brut d'exploitation de l'industrie manufacturière passé de 34 % en 2000 à 21 % aujourd'hui, des échanges de produits manufacturés qui accusent un déficit de 42 milliards d'euros en 2010. Tel est le résultat de dix ans d'inaction en matière de développement industriel.

M. Fasquelle a prétendu que le problème venait du coût du travail, qui aurait explosé en France. C'est une contre-vérité. Selon le rapport publié en octobre 2009 par le Conseil des prélèvements obligatoires, le coût, en France, du travail par unité de production – c'est-à-dire compte tenu de la productivité – est l'un des plus faibles de la zone euro : il s'élève à 83,75, contre 96,33 en Allemagne, pour une base 100 correspondant à la moyenne dans la zone euro. Voilà la réalité !

La situation de l'industrie française est grave, nous partageons tous ce constat. Mais, je le répète, ce n'est pas le coût du travail qui la pénalise. M. de Courson a dit que la compétition était parfois mortifère. C'est en effet le cas, en particulier pour le retraité grec, le salarié allemand payé 4,50 euros de l'heure ou le petit commerçant français.

Les députés du Front de gauche regrettent qu'il ne soit jamais question du coût de la rémunération du capital. Pourtant, en trente ans, dans les entreprises non financières – c'est-à-dire l'industrie et les services –, alors que la masse salariale a été multipliée par 3,6, la somme des dividendes versés aux actionnaires a été multipliée par 20 ! L'année 2002 est la dernière où les investissements réalisés par les entreprises ont dépassé les dividendes versés. En 2010, les premiers représentaient 180 milliards d'euros, les seconds 230 milliards. Les 20 milliards d'euros destinés à soutenir la réindustrialisation ne peuvent-ils pas être obtenus par la baisse des charges financières payées par les entreprises et celle des dividendes ?

De même, vous proposez de créer un plan d'épargne en actions « PME », mais n'y a-t-il pas moyen de sortir de l'addiction aux marchés financiers ? Ne serait-il pas préférable de créer un vrai pôle public pour mobiliser l'épargne longue ?

Il n'est pas acceptable de financer le crédit d'impôt bénéficiant aux entreprises par une augmentation de la TVA, prélevée sur les ménages. C'est dangereux pour la croissance. Pourquoi ne pas prévoir une modulation de l'impôt sur les sociétés favorisant les entreprises qui investissent au détriment de celles qui nourrissent la spéculation ?

De même, il est inacceptable que de telles aides soient accordées sans condition, et que le crédit d'impôt puisse ainsi profiter aux établissements bancaires, aux sociétés d'assurance ou à la grande distribution, voire être redistribué sous forme de dividendes plutôt qu'être dirigé vers l'investissement productif. C'est pourquoi les salariés doivent non seulement donner leur avis, mais intervenir directement dans la gestion des entreprises.

Enfin, il est urgent de porter l'effort sur un nouveau modèle de production et d'assurer la transition écologique en mettant en place un véritable plan de filière européenne d'industrie verte. À titre personnel, j'estime d'ailleurs que toute recherche est utile : elle peut permettre de mettre au point des techniques respectueuses de l'environnement, de réduire les coûts de l'énergie et de garantir notre indépendance énergétique.

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