Intervention de Isabelle Attard

Réunion du 29 octobre 2014 à 9h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Attard :

À mon tour, j'aimerais féliciter nos deux rapporteures pour leur passionnant travail, qui nous oblige à nous poser des questions qui vont bien au-delà du domaine de la culture, en particulier pour ceux d'entre nous qui sont élus de territoires ruraux.

Annie Genevard a souligné la nécessité de cartographier nos territoires afin de fournir des outils d'aide à la décision pour l'attribution de subventions. À cet égard, nous pouvons déplorer que, de manière générale, les services de nos brillantes universités de géographie et des systèmes d'information géographiques, qui existent depuis plus de vingt ans, soient sous-utilisés par les administrations en matière d'aménagement du territoire.

Ces outils doivent permettre de déterminer quelles zones et quels équipements favoriser. Les villes sont suffisamment arrosées et nous avons coutume de dire, au groupe écologiste, qu'il ne faut pas arroser là où c'est déjà mouillé ! Mais en zone rurale, comment orienter l'argent public ? Vous avez cité, madame Genevard, le travail admirable effectué par la DRAC Rhône-Alpes ou encore l'étude fine menée par le CNC sur les salles de cinéma. De telles observations devraient être disponibles pour d'autres équipements : quel temps de trajet pour accéder à une salle de spectacle, une galerie d'art, un lieu d'exposition ?

Je citerai dans ma circonscription l'exemple incroyable du DOC, le Doigt dans l'Oreille du Chauve. Animé par des bénévoles, ce lieu de musiques actuelles repose sur un défi : dans une commune de 325 habitants, attirer des jeunes, pour qu'à leur tour ils attirent des plus âgés et transmettent des savoirs nouveaux. Si le conseil régional de Basse-Normandie a l'intention de subventionner de telles structures, il doit pouvoir s'appuyer sur une bonne connaissance du maillage territorial et savoir quelles distances séparent ce type d'équipement des bourgs les proches et des villes plus importantes.

Votre propos fait écho à la réforme territoriale en cours. Pourquoi, dans le cadre des discussions sur la nouvelle cartographie des régions, n'avons-nous pas sollicité en priorité nos géographes ? Pourquoi n'avons-nous pas procédé à la superposition de cartes produites par les systèmes d'information géographiques ? Croiser les cartes des densités, des bassins d'emploi, des réseaux de transports, des lieux de culture, voilà qui nous aurait permis de procéder à un découpage territorial pertinent tenant compte des réalités des bassins de vie d'aujourd'hui et non de ceux du début des années 1980, voilà qui nous aurait permis de mener une réflexion plus ancrée dans les besoins des Français.

Sophie Dessus, vous avez choisi d'axer votre propos sur la réhabilitation du patrimoine industriel. De manière générale, nous aurons à faire des choix. Nous ne pourrons pas mettre en valeur toutes les anciennes mines de charbon cévenoles. Nous ne pourrons pas non plus sauver toutes les églises et les chapelles de France qui menacent de s'effondrer. Nous sommes tous ici concernés par la rénovation d'un clocher, d'une nef ou d'un chevet, même si, en milieu urbain, le problème se pose moins, les cathédrales relevant de l'État. De quels outils disposerons-nous pour procéder aux choix qui s'imposent ? Quel budget accorderons-nous ? Tout n'est cependant pas une question d'argent, pensons aussi aux idées nouvelles. Dans ma commune de Rosel, il a été ainsi proposé d'utiliser l'église comme salle des fêtes tout en continuant à y célébrer des mariages.

En France, nous manquons cruellement de lieux de création. Toute personne se rendant à Londres, au Leake Street Tunnel, près de la gare de Waterloo, pourra constater ce qu'est la liberté de créer en regardant les artistes s'activer jour et nuit pour peindre des graffs appelés à être remplacés par d'autres le lendemain, à la suite de l'artiste Banksy dont les oeuvres sont aujourd'hui cotées à plus de 500 000 euros. Lorsque nous aurons en France des lieux comparables, nous pourrons enfin sentir un libre bouillonnement de créativité. Et comme nous le savons, la culture rapporte déjà à notre pays plus que l'industrie automobile.

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