Intervention de Jean-Michel Genestier

Réunion du 14 novembre 2012 à 9h30
Commission des affaires économiques

Jean-Michel Genestier, directeur général adjoint de SNCF Géodis :

Je répondrai d'abord aux questions relatives au transport routier, qui suscite l'inquiétude de nombreux parlementaires.

La transposition de la directive 9671CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services — dite « directive Détachement » — aboutirait à accroitre la compétitivité des transporteurs étrangers, au moins sur le segment français. Les entreprises françaises auraient à en souffrir et l'on voit bien, d'ores et déjà, un certain nombre de « tractions » captées par des chauffeurs de nationalité roumaine ou ressortissant de pays du centre et de l'est de l'Europe.

S'agissant des corridors ferroviaires européens, ces lignes potentiellement dédiées, il me semble qu'il y aurait là un important facteur de compétitivité globale : le transport ferroviaire trouve en effet sa pertinence sur la longue distance. La moitié des flux de Fret SNCF et Voies ferrées locales et industrielles passe au moins une frontière et pouvoir emprunter des corridors sur lesquels une priorité existe constituerait un atout important.

Contrairement à l'idée selon laquelle le « wagon isolé » aurait été abandonné par la SNCF, celui-ci existe bien dans une forme différente, notre offre « multi-lots, multi-clients ». Il y a aujourd'hui deux cent mille trajets de wagon isolé opérés par Fret SNCF sur l'ensemble du territoire : un wagon représentant le volume de deux camions, l'ensemble avoisine donc quatre cent mille équivalents routier. Mais il est vrai que le wagon isolé est en compétition avec la route et que seules des décisions majeures, sans doute de nature législative, seraient à même de renforcer la compétitivité du rail — un univers beaucoup plus contraint que la route, parfois plus onéreux, mais où les capacités d'emport sont bien supérieures : ce qui explique que de gros chargeurs comme Arcelor-Mittal, l'industrie automobile, l'agriculture ou les carriers continuent à y faire appel massivement.

Nous sommes favorables à un schéma directeur logistique national, à condition que celui-ci corresponde aux réalités économiques et prenne en compte la localisation des points de massification. Par le passé, il y a eu trop d'exemples de chantiers de transport combiné jamais opérés en raison de mauvais choix d'implantation.

Nous ne sommes pas opposés à la taxe poids lourds, qui peut permettre de financer des investissements dans les infrastructures, mais nous ne pensons pas qu'elle puisse permettre à elle seule le report modal. Compte tenu de la faiblesse des marges des transporteurs routiers, celle-ci risque de conduire à la disparition des plus petites entreprises. C'est donc un sujet sur lequel il faudra se montrer vigilant.

L'autorisation des camions ayant des capacités d'emport très élevées (44 et 60 tonnes) n'est pas cohérente avec une politique de report modal car ce mode de transport entre en concurrence avec le ferroviaire.

Nous souhaitons participer à la transition écologique, évoquée par M. André Chassaigne. Le transport combiné peut être un facteur de cette transition. Dans cette perspective, il faut s'interroger sur la position des autorités sur l'aide à la pince versée aux opérateurs de transport combiné, qui a été portée à 18 euros il y a deux ans. Il serait souhaitable de créer une mission d'information parlementaire sur le sujet plus large des équilibres économiques du transport combiné. Ces équilibres sont en effet très instables en raison des charges multiples qui pèsent sur ce secteur. Les autoroutes ferroviaires connaissent également des équilibres instables mais l'axe Bettembourg – Le Boulou a démontré sa pertinence économique.

Monsieur François- Michel Lambert, vous avez estimé que les acteurs de la logistique devraient arbitrer les décisions mais je considère que celles-ci relèvent de l'État. Il est nécessaire de pouvoir disposer de grandes orientations adaptées à l'économie, sur la base desquelles les logisticiens puissent mener leurs activités, elles-mêmes liées aux réglementations. Certaines posent des difficultés : par exemple, dans le cadre des plans de déplacement urbain, compte tenu du fait que le dernier kilomètre représente 40 % des coûts, les disparités de réglementation des collectivités dans les conurbations posent problème.

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