Intervention de Ségolène Royal

Réunion du 6 novembre 2014 à 9h00
Commission élargie

Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie :

…mais, de surcroît, l'entreprise privée qui a obtenu le privilège de ce marché a également obtenu que sa rémunération soit garantie, quel que soit le rendement de la taxe, sachant, d'une part, que l'addition du prélèvement et de la rémunération des capitaux privés – de l'ordre de 17 % – coûtait à l'État 40 % des recettes attendues, et que, d'autre part, que la complexité du dispositif et les risques de dysfonctionnement du système laissaient ouvertes les hypothèses d'une fraude massive ou d'un recouvrement imparfait de la taxe. Une fois, en effet, que le portique a vérifié que le camion étranger est bien porteur du boitier, que le satellite a mesuré avec précision le nombre de kilomètres parcourus, que l'entreprise de transport a ventilé le coût de la redevance entre ses différents chargeurs eux-mêmes domiciliés, le cas échéant, aux quatre coins de l'Europe, comment s'assurer que les sommes dues soient bien recouvrées ?

En tant qu'ancienne magistrate administrative, je suis très attentive à l'application du droit et j'irai jusqu'au bout des investigations juridiques. S'il y a eu préjudice, c'est aussi au détriment de l'État et des contribuables, qui ont dû supporter un certain nombre de dépenses. J'entends donc tout remettre à plat pour déterminer la responsabilité de l'État et le montant d'une éventuelle indemnisation.

La privatisation de l'aéroport de Toulouse étant une belle affaire, je ne suis nullement inquiète à cet égard. Néanmoins, afin d'éviter les problèmes rencontrés lors de la privatisation de nos autoroutes, j'ai demandé à ce que l'on veille à la rédaction de l'appel d'offres et à la bonne fin du processus. Il est normal et fréquent que de nombreux candidats se désistent sans avoir à motiver leur retrait. La procédure en cours est gérée par l'Agence des participations de l'État (APE) dans le contexte du secret qui caractérise une telle procédure, mais également, bien sûr, dans la transparence. Plusieurs investisseurs, en provenance de plusieurs pays, sont en lice, ce qui démontre l'attractivité de la concession et, plus généralement, de notre territoire. Il nous faudra nous assurer que les conditions posées ne seront pas exorbitantes et ne nous feront pas regretter un jour ce type de privatisation.

Je remercie M. Lambert d'avoir évoqué la COP 21 et l'économie circulaire. Il a parfaitement raison en ce qui concerne Gardanne : j'ai d'ailleurs demandé à ce que soient effectuées des investigations complémentaires, car je ne souhaite pas qu'un tel équipement déstabilise la filière bois sur l'ensemble du territoire, ni ne vienne phagocyter la ressource locale et ruiner les petites installations de biomasse déjà en place. J'ai demandé au groupe E.ON de revoir son plan d'approvisionnement en faisant émerger des apports nouveaux en bois sans préempter les ressources déjà utilisées par d'autres. Enfin, j'ai demandé au préfet de région de me fournir un point actualisé sur ce nouveau plan d'approvisionnement, et c'est sur le fondement de son analyse que je déciderai d''approuver ou non ce plan.

J'approuve M. Chevrollier quant à l'importance de la rationalité budgétaire. Le chantier de la simplification administrative et de la modernisation du droit de l'environnement est en cours, et j'ai décidé de l'accélérer. En instaurant l'autorisation unique, le Parlement a fortement contribué à ce processus, et l'on peut citer plusieurs exemples pour les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) dans diverses régions. Nous en menons notamment une qui concerne les autorisations d'installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA). Nous avons également simplifié les démarches des usagers et propriétaires de navires de plaisance, ainsi que la signalétique des produits et emballages relevant d'une consigne de tri. Nous avons lancé la révision de la réglementation des équipements sous pression, l'expérimentation du certificat de projet et l'extension du régime d'enregistrement aux ICPE. Enfin, nous procédons actuellement à la dématérialisation de la déclaration des ICPE, à la simplification des schémas et des plans d'urbanisme et à la création d'une autorisation unique pour les projets électriques en mer. M. Chevrollier a cependant raison d'insister sur la nécessité d'accélérer ce chantier, car la simplification est une condition-clé de la création d'emplois comme du succès de la transition énergétique.

Les surcoûts liés à la mise en place du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), notamment dus à l'acquisition de son logiciel et à l'installation de son siège, sont restés limités et ont été financés au moyen de redéploiements de crédits, des économies ayant été réalisées grâce aux synergies qui se sont développées au sein de l'établissement. Le surcoût lié à la taxe sur les salaires a été compensé intégralement et ne représente pas une charge nouvelle pour le budget du Centre, puisque la dépense et la recette nouvelles s'équilibrent. D'ailleurs, l'engagement que j'ai pris devant vous de stabiliser la dotation du CEREMA au cours des deux premières années de son existence est tenu, l'évolution inscrite en 2015 étant justifiée par des ajustements de périmètre. En 2016, le CEREMA sera en mesure d'accroître quelque peu ses ressources propres, ce qui lui permettra de faire face à ses missions nouvelles. Je reste en tout cas très vigilante vis-à-vis de sa situation et, afin de répondre à vos préoccupations, je réunirai prochainement les équipes du Centre et me rendrai sur place pour lancer un audit sur sa gestion.

M. Lambert m'a demandé si l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) pouvait jouer le rôle de tiers financeur pour la rénovation énergétique des logements des anciens mineurs. Sa proposition est difficilement applicable aux trois quarts des ayants droit qui ne sont pas logés gratuitement et bénéficient d'une prestation de logement en espèces, car l'Agence n'entretient aucune relation particulière avec le bailleur et l'ayant droit utilise comme il l'entend l'indemnité qui lui est versée. Pour le quart restant, c'est-à-dire pour les quelque 30 000 ayants droit logés gratuitement, cette possibilité est théoriquement concevable, mais l'idée que l'Agence se rembourse en réduisant les indemnités de chauffage des ayants droit est assez peu réaliste. Tout d'abord, je ne suis pas certaine que les bénéficiaires l'accepteraient ; certains, au demeurant, ont choisi de capitaliser ces prestations. En outre, le temps de retour sur investissement de ce type de montage est assez long. Enfin, 70 % des logements concernés ont déjà bénéficié de travaux d'amélioration de l'habitat, sans doute insuffisants, mais qui ont permis certaines économies d'énergie. Le projet de loi relatif à la transition énergétique ayant instauré le tiers financement par les régions, il convient, je le crois, de nous en tenir à un dispositif unique, auquel tout le monde pourra avoir accès, et auquel peuvent s'ajouter les aides versées par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) aux familles aux revenus modestes – sans oublier, bien sûr, le crédit d'impôt pour la transition énergétique, qui, étant un crédit d'impôt et non une simple réduction, permettra aux contribuables dont l'impôt serait inférieur à son montant de recevoir un chèque du Trésor public.

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