Intervention de Marylise Lebranchu

Réunion du 4 novembre 2014 à 16h20
Commission élargie

Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique :

Mesdames et messieurs les députés, c'est toujours une grande difficulté que d'avoir à diminuer la dépense, et la baisse de 11 milliards d'euros des crédits n'a pas constitué une bonne nouvelle pour les ministres en charge. Même s'il s'agit d'une nécessité absolue, partagée par le Premier ministre et par le Président de la République, les conséquences seront difficiles et demanderont un examen de détail.

La répartition de cette baisse s'effectuera au prorata de la part de chaque strate dans les recettes totales, soit 2,071 milliards d'euros pour le bloc communal, 1,148 milliard pour les départements et 451 millions pour les régions. Le Gouvernement a ainsi repris les règles proposées par le Comité des finances locales (CFL). Sans être nécessairement parfaites, elles ont fait l'unanimité au cours de nos discussions.

Au sein des catégories de collectivités, cet effort sera réparti au prorata des recettes réelles de fonctionnement pour le bloc communal, de façon péréquée pour les départements, et au prorata des recettes totales pour les régions.

Bien sûr, le Gouvernement ne nie pas les difficultés que cela peut engendrer, mais il faut nuancer notre inquiétude collective. Les efforts demandés représentent une baisse des ressources des collectivités locales de l'ordre de 1,6 % de leurs recettes totales et de 1,9 % de leurs recettes de fonctionnement. Dans le même temps, cependant, les recettes fiscales continueront de progresser. Représentant 60 % des recettes de fonctionnement, elles augmenteront non du fait d'une hausse des taux, mais grâce à une progression de leur base.

Par ailleurs, le Gouvernement a souhaité atténuer les effets de cette baisse pour les collectivités les plus pauvres. L'amendement adopté en première partie de la loi de finances à l'initiative de M. François Pupponi a encore accentué le doublement des transferts au titre du fonds de péréquation, accroissant les garanties pour les communes-cibles de la DSU et de la DSR. Mais cet amendement, répondant à l'urgence du débat, n'a pu faire l'objet d'une étude d'impact. Des simulations ont dû vous être diffusées aujourd'hui. En accord avec le Premier ministre et avec mon collègue André Vallini, la proposition cheminera à l'Assemblée nationale et au Sénat. Selon les effets attendus, la position du Gouvernement pourra évoluer.

Le Premier ministre, qui a tenu à se rendre devant toutes les associations nationales d'élus, a pu se rendre compte de l'inquiétude qui entoure la baisse des dotations sur l'investissement local. Il a pris, en réponse à cette inquiétude, des engagements qui ont été tenus, puisque le FCTVA a finalement été exclu de l'enveloppe normée globale, progressant ainsi de 166 millions d'euros en faveur des collectivités. De même, le taux de remboursement du FCTVA supporte une réfaction de 0,905 points qui apportera aux collectivités 25 millions d'euros dès 2015, et près de 300 millions d'euros en régime de croisière. Certes, le rapporteur pour avis et quelques autres estiment que l'on pourrait aller encore plus loin, mais cette proposition reste à préciser.

Au cours de l'examen de la première partie de la loi de finances, un amendement a été adopté qui vise à ventiler autrement les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) au profit de dotations qui servent l'investissement des collectivités, à savoir la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de développement urbain (DDU) et la DGE des départements.

Le débat n'est pas encore tranché par le Gouvernement. Car cet accord trouvé en première partie ne comble pas toutes les attentes, puisqu'il ne s'agit pas d'argent supplémentaire, mais seulement d'une ventilation différente. La volonté de l'Assemblée nationale, qui veut privilégier le logement, le développement durable et les centres-bourgs, peut susciter des difficultés, mais va dans le même sens que les ambitions des ministres successives du logement, Cécile Duflot et Sylvia Pinel, en leur donnant peut-être une chance de se réaliser enfin : des dotations aux maires bâtisseurs ne sont pas envisageables, puisqu'il convient de lutter contre l'étalement urbain en cessant de faire obstacle à la densification des bourgs et des villages ; le moyen peut cependant être trouvé d'accompagner les maires désireux de construire des logements sur le territoire de leur commune.

J'insiste sur le fait qu'il n'y a ni fatalité ni évidence à répercuter sur les investissements la totalité de la baisse des dotations. Globalement, nos collectivités sont en bonne santé. (Exclamations sur plusieurs bancs.) Leur contribution à l'effort de redressement des finances publiques est supportable, même s'il faut s'attendre à une dégradation temporaire de leur épargne brute. Lorsque j'ai pris mes fonctions, une ancienne ministre du budget, que je ne nommerai pas mais que vous reconnaîtrez, préconisait déjà de la faire baisser de 2 milliards d'euros par an. Nous sommes donc tous d'accord, toutes familles politiques confondues, sur la nécessaire participation des collectivités locales à la réduction des déficits.

Quant à la réforme de la DGF, des parlementaires devraient être prochainement missionnés pour mener à terme la réflexion. La réponse du président du Sénat est encore attendue, car des membres des deux assemblées seraient sollicités.

Au sujet de la péréquation, l'Assemblée nationale souhaite accentuer les garanties accordées aux communes qui perçoivent la DSU ou la DSR. Les amendements adoptés pourraient cependant amener des communes non riches à contribuer davantage. Une étude d'impact précise est donc nécessaire. Il faut veiller à ne pas étrangler ce qu'on peut appeler la « classe moyenne » des collectivités.

Les économies apportées par la fin de la clause générale de compétence sont difficiles à chiffrer. Lors de la première proposition de suppression, l'étude d'impact ne s'engageait pas sur le terrain d'une telle évaluation. Il conviendrait de l'envisager au terme d'une stabilisation des financements à un horizon de dix ans. Le président de l'Association des départements de France (ADF) relève cependant que 20 % des dépenses des départements sortent du champ des dépenses obligatoires, ce taux s'élevant à 25 % pour les régions. Il n'en reste pas moins que ces dépenses sont également des dépenses utiles ; elles échoiront nécessairement, in fine, au bloc communal.

Aussi est-il nécessaire que le projet de loi « NOTRE » réaffirme la solidarité territoriale. Après la fin de la clause générale de compétences, comment une commune pourra-t-elle être aidée si elle est incapable, même dans le cadre élargi de l'intercommunalité, de développer déjà par elle-même un projet ? La clause de solidarité inscrite dans le projet de loi devrait répondre à l'inquiétude que vous exprimez. Le texte nous donnera par ailleurs l'occasion de concrétiser, en matière d'étude d'impact, les progrès que vous êtes nombreux à attendre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion