Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 5 novembre 2014 à 16:
Commission élargie

Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur :

Permettez-moi d'apporter quelques éléments au débat en insistant, en préambule, sur le contexte de contrainte budgétaire globale. Pour des raisons qui tiennent au redressement de nos comptes publics, nous avons consenti un effort de diminution d'un milliard d'euros en valeur de la dépense publique, afin d'inverser les tendances qui se sont enkystées au cours des dernières années.

De fait, entre 2002 et 2012, le niveau d'augmentation de la dépense publique a été en moyenne de 2 %, et entre 2007 et 2012, de l'ordre de 1,7 %. L'an dernier, le budget affichait une progression de 0,9 %, et cette année de 0,2 %, avec un niveau d'exécution très significatif. C'est dans ce contexte de maîtrise forte de la dépense publique que s'inscrit l'exercice budgétaire.

Par-delà la contrainte budgétaire, le Gouvernement affirme sa volonté politique de transformer en profondeur la politique de l'asile en France, ainsi que sa politique d'accueil des étrangers. Les procédures d'asile de notre pays ne sont pas conformes aux directives de l'Union européenne, et ce malgré les invitations de celle-ci à y remédier depuis de très nombreuses années. Le Gouvernement a décidé de prendre le problème à bras-le-corps en présentant deux textes, l'un relatif à l'asile, l'autre à l'accueil des étrangers.

S'agissant de l'asile, notre volonté est de réduire sensiblement la durée moyenne de traitement des dossiers, en la faisant passer de vingt-quatre mois à neuf. Nous sommes essentiellement mus par des considérations humaines : une attente trop longue plonge les demandeurs d'asile dans la détresse et, lorsqu'ils sont déboutés, rend difficiles les reconduites à la frontière dans des conditions humainement soutenables. Nous mettons les moyens : en même temps que nous augmenterons significativement le nombre de postes à l'OFPRA et renforcerons les moyens de la CNDA, nous allons accroître les capacités d'accueil des demandeurs d'asile en poursuivant la création de postes en CADA.

Pour que les droits des demandeurs d'asile soient davantage reconnus dans les procédures, nous allons mettre en place un recours suspensif contre les décisions de reconduite à la frontière dans le cadre de la procédure accélérée, et les associations pourront accompagner les demandeurs d'asile à l'OFPRA.

Le texte relatif à l'accueil des étrangers introduira de nouveaux dispositifs assouplissant considérablement les conditions de traitement des dossiers de ceux qui arrivent dans notre pays, en mettant davantage l'accent sur l'intégration, à travers notamment le titre pluriannuel de séjour ou le passeport talents. Le traitement administratif des dossiers gagnera ainsi en efficacité et en humanité.

J'en viens aux réponses plus précises aux différents intervenants.

Mme Saugues, mais pas seulement elle, m'a interrogé sur le sens de l'opération Triton par rapport à l'opération Mare Nostrum. D'abord, Mare Nostrum n'est pas une opération de l'Union européenne ; elle a été décidée, après le drame de Lampedusa, par les seuls Italiens, pour réagir à la disparition de nombreux migrants, noyés au large de leurs côtes. Se tenant au plus près des côtes libyennes, elle a eu toutefois des conséquences inattendues : des filières toujours plus nombreuses de l'immigration irrégulière, du crime organisé et de la traite des êtres humains se sont installées sur la façade nord-africaine, notamment en Libye à la faveur de la déréliction de l'État, et ont envoyé de plus en plus de migrants, non sans avoir prélevé sur eux une dîme très lourde, sur la mer à bord de frêles embarcations. L'opération Mare Nostrum s'est ainsi traduite par davantage de sauvetages, mais aussi davantage de morts.

Ceux qui arrivent en nombre sur le territoire européen ne sont pas animés par leur amour irrépressible du code Schengen. Ce sont des hommes, des femmes, des enfants, qui ont pris le chemin de l'exode pour fuir les persécutions, les tortures et la mort, comme ce fut toujours le cas dans l'histoire de l'humanité. Voilà pourquoi il est illusoire de penser qu'il suffirait de modifier Schengen pour dissuader certains de prendre le chemin de l'exode lorsqu'ils sont persécutés.

À la fin du mois d'août, la France a adressé aux pays de l'Union européenne une série de propositions, parmi lesquelles la substitution à Mare Nostrum d'une opération portée par Frontex et localisée plus au nord, au plus près des côtes européennes. Cette proximité est justifiée par la nécessité, pour avoir une politique d'accueil soutenable, d'être en situation de contrôler nos frontières. Qui plus est, c'est un moyen de dissuader les filières de l'immigration irrégulière, qui se trouvent ainsi gênées dans leurs activités. Cette opération de contrôle extérieur des frontières de l'Union européenne, baptisée Triton, ne se fait pas au préjudice du sauvetage puisque le droit de la mer obligera les moyens de l'opération Frontex à intervenir en cas de nécessité.

Comme nous en avons pris l'engagement avec Laurent Fabius, nous allons accueillir plusieurs centaines de réfugiés irakiens et syriens supplémentaires. Nous avons notamment mis en place un dispositif spécifique pour recevoir les représentants des minorités persécutées, et nous faisons en sorte que leurs dossiers soient instruits dans les meilleures conditions. Enfin, 500 réfugiés syriens seront accueillis dans le cadre de la réinstallation, comme le Président de la République l'a indiqué.

L'accueil de ces réfugiés a légitimement fait débat. Faut-il accorder l'asile à ceux qui sont persécutés en Irak et en Syrie, en donnant le sentiment aux partisans de Daesh qu'ils sont chez eux ? Faut-il, au contraire, faire en sorte que ceux qui vivent sur place puissent continuer à y vivre ? Nous sommes intervenus dans le cadre d'une coalition. En même temps, ceux qui sont persécutés au point de perdre la vie doivent pouvoir être accueillis.

M. Grandguillaume a fait un rapport extrêmement complet, qui pose de nombreuses questions auxquelles je voudrais essayer de répondre rapidement.

Le ministère de l'intérieur, en la personne du directeur général des étrangers en France, est appelé à être désigné comme autorité responsable du fonds « Asile, migration et intégration » et du fonds « sécurité intérieure » 2014-2020. Ces deux fonds prennent la suite de six fonds ou instruments européens qui avaient été mis en place pour la période 2007-2013 en matière de politique migratoire et de politique de sécurité. Ils permettent de mettre en oeuvre le contenu des différentes directives et règlements récents régissant l'asile au plan européen, ou le retour en lien avec les projets de loi en cours d'examen, dont je vous ai parlé à l'instant. Le cadrage de ces nouveaux fonds a pris du retard au niveau européen, puisque les règlements sont entrés en vigueur en mai 2014 et que leurs textes d'application ne sont pas tous adoptés aujourd'hui.

Conscient qu'un certain nombre de bénéficiaires associatifs risquaient de subir des contraintes de trésorerie considérables en raison de ces retards, j'ai demandé à mes services d'anticiper au maximum le travail de la commission permettant de valider ces programmes. En outre, l'appel à projets du Fonds Asile Migration Intégration (FAMI) et du Fonds Sécurité intérieure (FSI) a été lancé en avril 2014. Les demandes de subventions ont été instruites et sélectionnées en juillet, puis conventionnées en septembre. Cette anticipation s'est notamment concrétisée par le paiement des avances en octobre 2014, grâce à la mise en place d'un dispositif exceptionnel de financement validé par la Commission européenne, après le dispositif classique d'audit des fonds européens.

S'agissant de l'insuffisance de l'enveloppe de l'ATA, force est d'admettre que, ces dernières années, l'augmentation très significative des affaires pendantes devant l'OFPRA et la CNDA ont contribué à accroître les délais d'instruction des dossiers de demande d'asile et donc, mécaniquement, le nombre de bénéficiaires de l'ATA. Nous avons mis en place des dispositifs pour accélérer le traitement des dossiers et faire en sorte que les dépenses publiques mobilisées au titre de l'ATA diminuent progressivement. Toutefois, les renforts successifs des capacités de traitement de l'OFPRA n'ont pas suffi. À ce stade, il n'est pas possible d'inverser la tendance en l'espace de quelques mois. Malgré tout, on note, depuis le début de l'année 2014, une inversion très prometteuse et assez inédite, grâce aux efforts de réorganisation interne entrepris par le nouveau directeur général de l'OFPRA, Pascal Brice. Nous attendons beaucoup des prochains efforts qui seront accomplis, de la future loi, des moyens supplémentaires et des cinquante-cinq emplois budgétaires alloués à l'OFPRA.

Je tiens également à souligner que l'écart entre la budgétisation des crédits et l'exécution s'est beaucoup réduit depuis 2012. C'est d'autant plus méritoire que la dépense est particulièrement difficile à prévoir. En 2011, les crédits d'ATA en loi de finances initiale représentaient 34 % des dépenses réelles ; en 2013, nous couvrons 94 % de cette dépense, ce qui montre bien les efforts accomplis.

Au regard de l'augmentation du flux de demandeurs d'asile depuis 2007, les crédits inscrits en loi de finances pour leur prise en charge se sont révélés très insuffisants entre 2008 et 2012. Comme vous l'avez souligné les uns et les autres à juste titre, cette sous-dotation a concerné tout particulièrement les crédits d'hébergement d'urgence qui ont fait l'objet, depuis plusieurs années, d'abondements significatifs par redéploiements internes, décrets d'avance, voire loi de finances rectificative. Afin de tenir compte de la hausse continue des demandes d'asile, le Gouvernement a augmenté à plusieurs reprises le montant des crédits d'hébergement d'urgence inscrits en loi de finances. Le taux de couverture de la dépense réelle par la dotation en LFI est ainsi passé de 30 % en 2012 à près de 83 % en 2013. Cette consolidation va se poursuivre en 2015, dans la continuité de ce qui s'est passé en 2013 et en 2014. Le niveau de cette dotation tient compte des objectifs de la réforme de l'asile qui doit entrer en vigueur au cours de l'année prochaine et qui, encore une fois, doit permettre de réduire les délais.

S'agissant toujours de l'hébergement d'urgence et de l'ATA, une question portait sur l'exécution 2014. Le besoin en fin de gestion est, comme souvent, très important, même si le montant exact fait l'objet de discussions techniques, en cours avec le ministère des finances. Dans le cadre de ces discussions, une ouverture de crédits a été demandée pour couvrir ce besoin. Je tiens, par ailleurs, à souligner que, depuis 2012, le Gouvernement s'est attaché, chaque année, à réduire l'écart constaté entre la dotation initiale et la dépense exécutée.

Comme toutes les structures que nous avons sous notre responsabilité, l'OFII doit faire l'objet de réformes internes visant à dégager des marges de manoeuvre et des économies afin de redéployer des moyens vers les urgences. Dans le contexte actuel, il faut apprendre à faire plus avec autant d'argent. Le ministère de l'intérieur a besoin de financements, mais il fait aussi des économies. C'est ainsi que, avec l'OFII, nous avons travaillé à l'établissement d'un véritable plan d'économies pour financer ses nouvelles attributions. Ces économies proviennent de mesures de simplification administrative : réduction du nombre d'allers-retours imposés aux étrangers entre les préfectures et l'OFII, sans réelle plus-value du point de vue de leur intégration ; suppression, pour les talents internationaux, des visites médicales pouvant être faites dans un autre cadre.

En outre, l'OFII a pu économiser plusieurs millions d'euros grâce à la diminution drastique des aides au retour pour les ressortissants européens. Au cours des années précédentes, les statistiques sur ces aides étaient largement alimentées par les pratiques de ressortissants roumains et bulgares notamment, qui touchaient la prime en partant et revenaient pour en bénéficier à nouveau. Certains, paraît-il, allaient passer Noël dans leur pays puis revenaient toucher l'aide pour les fêtes suivantes. Le dispositif n'existe plus ; il y a là, par conséquent, des moyens budgétaires à mobiliser.

S'agissant des immigrés âgés, le rapport parlementaire préconisait deux mesures principales : la délivrance d'une carte de résident permanent pour les immigrés âgés en situation régulière – dispositif relevant du ministère de l'intérieur et entériné par mon prédécesseur par voie de circulaire en juillet 2013 ; l'accès facilité à la nationalité française des migrants âgés parents d'enfants français. Cette mesure a été intégrée dans la récente loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement, portée par Marisol Touraine.

M. Dufau et M. Ciotti m'ont interrogé sur le nombre de places en CADA. Le Gouvernement s'est fixé l'objectif ambitieux de créer, dans les années qui viennent, jusqu'à 5 000 places supplémentaires, dont 1 000 pourraient être réalisées en transformant des hébergements d'urgence. Cette évolution est rendue possible grâce à la réduction des délais de traitement des dossiers, qui aura un effet vertueux sur le niveau des dépenses d'ATA. Sa mise en oeuvre dépend du vote de la loi relative à la réforme de l'asile. Ces créations s'ajoutent aux 4 000 places réalisées en 2013 et 2014. Parallèlement, certaines prestations assurées en CADA peuvent, à terme, évoluer. Pour examiner cette question sensible, j'ai souhaité une consultation approfondie du secteur associatif, que j'ai personnellement engagée en juillet dernier. Les débats entre les différents acteurs ont débuté en octobre et se poursuivront jusqu'à ce que nous trouvions un accord.

Dans le cadre du système Dublin, monsieur Dufau, la France n'étant pas un pays d'entrée sur le territoire européen, elle sollicite davantage les autres États membres qu'elle n'est elle-même sollicitée. La France a procédé à près de 5 300 saisines tandis qu'elle n'a été saisie par les États membres que d'un peu plus de 3 000 demandes. Elle obtient de ses partenaires un taux d'accords de l'ordre de 75 %, alors qu'elle délivre, pour sa part, des accords dans 67 % des cas. Les préfectures, d'ailleurs, rencontrent de nombreuses difficultés dans le transfert effectif des demandeurs d'asile vers les États membres devant instruire la demande. Ces difficultés sont dues essentiellement au comportement des demandeurs d'asile au moment du transfert. Bien entendu, nous essayons, dans le cadre d'un dialogue le plus humain possible, de régler ce problème.

J'ai demandé à l'IGA un rapport dont j'attends les conclusions prochainement, afin de mettre en place des mesures visant à une meilleure application du système Dublin en France. Il faudra, par ailleurs, dans le cadre du projet de loi sur l'asile, renforcer le suivi des étrangers sous procédure Dublin pour garantir leur transfert effectif vers les États de l'Union européenne compétents.

Vous avez également rappelé, monsieur Dufau, la baisse de plus de 20 % des crédits du programme 104 entre 2010 et 2014, au moment où le Gouvernement entend rénover les politiques d'intégration. Nous poursuivrons, dans le cadre de la réforme de la politique d'accueil et d'intégration, l'effort considérable de formation linguistique que nous avons initié. En 2015, le dispositif doit conduire les bénéficiaires des formations vers le niveau A1 du Cadre européen commun de référence pour les langues. Nous continuerons à mobiliser des fonds pour atteindre cet objectif. La loi de programmation des finances publiques pour 2015-2017 a, par ailleurs, prévu une hausse de 11 millions d'euros pour les deux premières années. Pour la période 2016-2017, nous poursuivrons l'augmentation de ces fonds afin de permettre la mutualisation des formations et le recentrage sur les personnes qui en ont le plus besoin.

Madame Chapdelaine, nombre de vos questions concernent des sujets traités par les deux lois qui seront présentées par le Gouvernement. J'ai répondu à la plupart d'entre elles, mais je voudrais tout de même apporter quelques compléments d'information.

Nos objectifs d'intégration ne se limitent pas à quelques cours de langue. Nous voulons créer un véritable parcours d'intégration pour ceux qui veulent rejoindre notre pays. Une évaluation complète des dispositifs d'intégration a été réalisée dans le cadre de la modernisation de l'action publique. Il en est ressorti trois éléments essentiels.

D'abord, la nécessité de renforcer le niveau de langue pour amener tous les migrants au niveau A2. C'est une condition importante de leur intégration, qui permettra de renforcer à la fois leur employabilité et leur insertion économique et culturelle dans la société française.

Ensuite, nous voulons renforcer le maillage avec des dispositifs de droit commun et donner du temps pour une intégration réussie. Un an, c'est trop court ; il faut trois à cinq ans pour réussir un parcours d'intégration. Qui plus est, ceux qui ont vocation à s'intégrer dans la société ne doivent pas être soumis à des procédures annuelles qui créent de l'incertitude et embolisent les services préfectoraux. Nous souhaitons mettre en place le titre pluriannuel de séjour, non pas comme un solde de tout compte qui conduirait l'État français à ne plus s'intéresser aux migrants effectuant leur parcours d'intégration, mais au contraire pour leur donner la visibilité permettant de s'intégrer vraiment.

Enfin, il faut adapter certaines prestations qui ne trouvent pas leur public ou qui ne font pas la preuve de leur efficacité. Je pense, par exemple, au bilan de compétences professionnelles.

Nous allons prendre en compte vos préoccupations sur le passeport talents et sur la carte pluriannuelle de séjour. Je précise que le titre pluriannuel de séjour ne se substitue pas à la carte de résident de dix ans, comme le craignent nombre d'associations et d'acteurs. Cela n'a rien à voir. La carte de résident était attribuée à ceux qui avaient préalablement passé cinq ans en France et s'étaient vus annuellement contraints de venir devant les services de la préfecture pour renouveler leur titre de séjour. Désormais, après un an de séjour en France, la personne étrangère pourra faire la demande de ce titre pluriannuel, valable quatre ans, au terme desquels, comme par le passé, dans des circonstances particulières et si les conditions sont retenues, elle pourra bénéficier de la carte de résident de dix ans. Nous utilisons donc le titre de séjour pluriannuel comme vecteur du parcours d'intégration pour délivrer la carte de résident de dix ans dans des conditions plus efficaces sur le plan administratif, plus humaines et moins budgétivores.

Monsieur Ciotti, si nous voulons une soutenabilité de l'asile, il faut faire preuve de responsabilité. Si, au bout de la période d'examen du dossier, qui va être considérablement raccourcie, la personne déboutée est maintenue sur le territoire national, l'asile n'aura plus aucun sens. Autant dire qu'il n'y aura plus ni politique de l'asile ni droit d'asile en France, et que tous ceux qui viendront dans notre pays auront vocation à y rester. Cela ne serait pas responsable. Nous serions confrontés à de sérieux problèmes d'accueil, d'accompagnement et de mobilisation des prestations à caractère social. Il faut porter une grande attention à ceux qui relèvent de l'asile, raccourcir les délais de traitement des dossiers des demandeurs, leur offrir des conditions d'hébergement dignes de ce nom et doter nos administrations des moyens de le faire. Quant à ceux qui ne relèvent pas de l'asile, il faut les reconduire, sans pour autant procéder avec brutalité, en faisant abstraction de toute considération humaine. Le retour doit être accompagné.

Pour ce faire, des dispositifs mobilisant l'administration et les associations doivent être mis en place, tenant compte de toutes les situations humaines. Le retour peut se faire en liaison avec les pays de provenance, avec un accompagnement garantissant des conditions sociales, de travail et d'hébergement. Cela implique un véritable travail bilatéral avec les pays amenés à dialoguer avec la France.

En 2011, le gouvernement de l'époque affichait 32 000 éloignements par an, se décomposant de la manière suivante : 13 478 retours aidés subventionnés par l'OFII et concernant majoritairement des ressortissants roumains et bulgares ; approximativement 5 500 départs spontanés mais tout de même comptabilisés en éloignements ; 13 824 éloignements forcés résultant directement de l'action des pouvoirs de l'administration, dont 4 002 seulement vers un pays tiers de l'Union européenne.

En 2013, les retours aidés de ressortissants roumains et bulgares ont marqué une baisse notable liée à la réduction drastique de la subvention versée par l'OFII, qui agissait comme un véritable aimant, en attirant autant de populations qu'elle en faisait partir. Il n'y a plus aujourd'hui que 6 228 retours aidés, dont seulement 1 517 concernent des ressortissants européens, contre plus de 8 000 en 2011 et 2012. La comptabilisation des départs spontanés est stable, à 5 354, et les retours forcés, en passant à 15 469, enregistrent une hausse marquée. Dans cette catégorie, les retours forcés au sein de l'Union européenne sont également en hausse de 13 %. Ce mouvement est également constaté en 2014.

Enfin, pour ce qui est de la présence des déboutés dans l'hébergement d'urgence généraliste, monsieur Ciotti, il est impossible d'en évaluer la part. Le Gouvernement a pris une circulaire en mars 2014 pour rappeler que cet hébergement ne devait pas être une réponse unique pour la population concernée. C'est pourquoi les préfets veillent à ce que les personnes placées fassent l'objet d'un suivi social approprié. Pour les déboutés, cela signifie une vérification de la possibilité de signalisation, la préservation des aides au retour et la réinsertion, voire, parfois, un dispositif d'assignation à résidence.

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