Je tiens seulement à rappeler que la France dépasse le plafond autorisé de déficit depuis 2003, c'est-à-dire bien avant le déclenchement de la crise financière, et que, contrairement à l'Allemagne, notre pays n'avait pas rétabli, avant la crise, le respect des taux prévus par le traité.
M. Michael Roth, secrétaire d'État aux affaires européennes de la République fédérale d'Allemagne. (Interprétation) Nous nous sommes félicités non de mon travail mais du travail de M. Désir. La critique est toujours stimulante : elle nous fait avancer. Elle permet d'obtenir de meilleurs résultats.
La situation en Ukraine est loin d'être détendue : la condition sine qua non d'une détente est l'application totale de l'accord de Minsk par les deux parties, à savoir l'Ukraine et la Russie, qui doit maintenant agir en ce sens. Tant que l'accord de Minsk n'est pas appliqué, nous ne pouvons donner aucune garantie en ce qui concerne la levée des sanctions économiques, et ce, alors même que les pays d'Europe centrale qui dépendent du gaz russe à plus de 80 % – je rentre de Hongrie – sont très inquiets. C'est pourquoi la solidarité est importante. Même s'il est possible de critiquer l'Union européenne, il convient de noter qu'en dépit du caractère très hétérogène des situations de chacun des États membres, l'Europe a réussi à parler d'une seule voix. La déclaration conjointe des ministres des affaires étrangères du triangle de Weimar – France, Allemagne, Pologne – y a été pour beaucoup.
Les élections qui se sont récemment tenues en Ukraine ont été déclarées légitimes par les observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Même si elles n'ont pas pu être organisées en Crimée et dans la partie est de l'Ukraine, l'OSCE a donné son feu vert à leur validation par la communauté internationale. Il est très important à nos yeux que les élections locales prévues par l'Ukraine en décembre dans le sud-est du pays puissent avoir lieu. En revanche, nous ne pouvons pas considérer comme légitimes les élections prévues par les séparatistes au mois de novembre : la Russie doit convaincre ces derniers d'y renoncer.
Les négociations du traité de libre-échange transatlantique suscitent beaucoup d'émotion tant en France qu'en Allemagne. Mes propos ne plairont pas à tous : je ne comprends pas pourquoi l'Europe manque autant d'audace. Étant un social-démocrate moderne, je souhaite participer à la constitution du cadre de la mondialisation. Si nous voulons exercer une influence sur elle, nous avons besoin de signer des traités de libre-échange. C'est pourquoi l'Union européenne doit être capable de conduire des négociations et d'y défendre ses vues.
L'Allemagne n'est pas favorable aux procédures d'arbitrage prévues : elle souhaite qu'elles ne fassent pas partie des négociations. Il en est de même du traité de libre-échange entre l'Europe et le Canada, dont, toutefois, les négociations sont terminées : revenir sur les tribunaux d'arbitrage sera donc plus difficile.
Ces négociations sont d'autant plus mal acceptées par les citoyens européens qu'elles ont été enveloppées du voile du secret. Même si le commissaire qui les a conduites a beaucoup obtenu, il est toujours dangereux de donner l'impression qu'on dissimule des choses importantes. C'est une des raisons pour lesquelles ces négociations ont suscité autant de protestations. Il convient toutefois de les poursuivre, puisque ce sera aux vingt-huit parlements nationaux qu'il appartiendra de donner leur accord, et non au seul Parlement européen.
Par ailleurs, l'Allemagne a tout fait pour renforcer le travail de l'Union européenne dans son combat contre le virus Ebola. C'est le ministère allemand des affaires étrangères qui pilote la coordination gouvernementale dans ce domaine. Les moyens ont été renforcés, des experts ont été envoyés sur place, en dépit de conditions de travail très difficiles. La situation de l'Afrique occidentale est d'autant plus dramatique qu'elle est très complexe. Nous avons également proposé l'envoi de Casques blancs et préparé une proposition commune visant à nommer un coordinateur de l'Union européenne contre Ebola – il s'agit du commissaire européen aux affaires humanitaires, le Chypriote Christos Stylianide. Travailler chacun dans son coin ne sert à rien. Pour obtenir des résultats, tous les pays doivent coopérer.
Monsieur Cordery, vous avez évoqué le projet de plan d'investissement de 300 milliards d'euros. Une telle proposition n'allait pas de soi ! Nous ne pouvons donc que nous en féliciter. M. Junker a mérité notre soutien ; il en a de plus besoin. Nous sommes très reconnaissants envers la France d'avoir présenté des propositions de réformes. L'Allemagne et d'autres pays l'ont fait également.
S'agissant des investissements, il conviendra de prévoir un paquet, composé de différentes sources de financements. Ce projet devra évidemment tenir compte du montant encore élevé des dettes de certains États membres. Il conviendra aussi de compter sur l'effet de levier de la Banque européenne d'investissement, lequel lui permet d'accorder à peu de frais des crédits importants pour financer des projets importants. Quant aux project bonds, ils permettront d'impliquer le capital privé. Comme il existe des millionnaires en Europe, il est important de canaliser leur investissement vers des projets d'infrastructures ou d'éducation, plutôt que de les laisser spéculer en investissant dans des secteurs à risque – personne ne souhaite voir éclater une nouvelle crise.
Le pacte de stabilité a été au centre d'une grande polémique en Allemagne, à laquelle le vice-chancelier et moi-même avons participé. Ce débat a été très utile car il a permis de clarifier la situation. Il faut souligner qu'il ne s'agit pas d'un simple pacte de stabilité mais d'un pacte de stabilité et de croissance – la chancelière l'a également rappelé. Maintenant, c'est à la Commission d'agir et nous ne saurions lui dicter sa politique. Le commissaire Jyrki Katainen a évalué les propositions de la France de manière constructive. Il faut éviter à tout prix de créer l'impression que les grands pays peuvent bénéficier de dérogation contrairement aux petits pays, qui devraient subir seuls les règles existantes dans toute leur rigueur. Pour que la croissance et l'emploi soient nos premières priorités, il faut en réaliser les conditions. Je suis certain que les propositions dont nous prendrons connaissance au mois de décembre seront constructives. Nous pouvons avoir confiance dans ces personnalités très qualifiées chargées de remettre un rapport, que sont MM. Pisani-Ferry et Enderlein.