C’est le cas du département de l’Aisne avec la métropole rémoise et la région Champagne-Ardenne.
Monsieur le ministre, si la carte idéale n’existe pas, comme vous le dites, et vous avez raison, nous devons néanmoins la faire progresser, encore et encore. Mais pour cela, il faut le vouloir et il faut non seulement écouter mais aussi et surtout entendre les élus et les populations qui émettent d’autres avis. « […] le débat n’a de véritable intérêt – au plan parlementaire comme au plan politique – que s’il conduit chacun, fort de ses convictions, à aller au bout de son raisonnement, tout en essayant, dans ce mouvement, de bâtir un compromis avec l’autre qui éventuellement ne pense pas comme lui. » C’est vous qui avez prononcé ces mots au Sénat, monsieur le ministre ; je ne peux que les reprendre et vous donner raison. Vous avez d’ailleurs insisté sur les notions de compromis et de consensus lors de votre intervention voilà quelques instants.
Pourtant, force est de constater que les compromis proposés par nos collègues sénateurs n’ont pas fait long feu dans la moulinette de la commission des lois… Les nombreux échanges que nous avons eus au nom du collectif du département de l’Aisne avec le Président de la République, vous-même, monsieur le ministre, M. le secrétaire d’État André Vallini, le directeur de cabinet du Premier ministre ou encore M. Carlos Da Silva, rapporteur de ce projet de loi, ont connu le même destin. À la fin de nos aimables entretiens, il nous a toujours été dit que nos propositions étaient pleinement justifiées et que, bien entendu, l’Aisne n’avait rien à faire dans la nouvelle région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, ce qui est très agréable à entendre, j’en conviens. Cela n’a cependant jamais été pris en compte. En d’autres termes : « Cause toujours, nous ferons ce que nous voudrons. »
Vous comprendrez ainsi mon manque d’enthousiasme au moment où nous nous engageons dans cette deuxième lecture. Pourtant, en faisant fusionner la Picardie, donc en particulier l’Aisne, avec le Nord-Pas-de-Calais, on ne suscite rien d’autre que de l’incompréhension, à la fois dans ce département et auprès de certains élus du Nord-Pas-de-Calais, de Mme Martine Aubry et bien d’autres encore.
Ainsi que le sénateur Michel Delebarre l’exprimait clairement devant vous, monsieur le ministre, le Nord-Pas-de-Calais n’a rien à voir avec la Picardie dans le domaine des coopérations et des perspectives de développement. L’avenir économique de ces territoires est orienté non pas vers le sud ou l’est, mais vers la Belgique et le nord de l’Europe.
Monsieur le ministre, si nous pouvons nous entendre sur la cohérence d’un rapprochement entre la Somme et le Nord-Pas-de-Calais, il n’en est pas de même concernant la Picardie dans son ensemble, car la Picardie ce n’est pas que la Somme ! L’Aisne n’a jamais été picarde, et nous ne serons jamais davantage nordistes !
Monsieur le ministre, aucun élément consistant ne permet de légitimer ce mariage contre-nature, et vous avez eu bien des difficultés à trouver des arguments pour le légitimer au Sénat. Ainsi, vous avez évoqué comme seule coopération le partenariat entre l’université de technologie de Compiègne et l’université de Lille. C’est un peu maigre, alors qu’il en existe de nombreux entre les établissements d’enseignement supérieur de Picardie et l’université de Reims.
Nous disposons d’ailleurs d’une véritable étude d’impact justifiant la pertinence du rapprochement avec la Champagne-Ardenne. Elle est ici, monsieur le ministre, je viens de vous la montrer. Nous attendons en vain celle qui a présidé à la décision de fusionner les régions de Picardie et du Nord-Pas-de-Calais, car nous savons bien sûr qu’il n’y en a pas, et que ce choix repose sur des arbitrages partisans visant à favoriser M. Untel plutôt que Mme Unetelle.